
Je prends quelques minutes pour lire chaque matin, avant même de me lever. Au cours des derniers mois, l’actualité a pris trop de place dans ce rituel.
Depuis le début de l’été, je tente de trouver un meilleur équilibre avec des textes plus nourrissants, qui permettent d’ancrer la journée à venir dans une démarche, plutôt que d’en faire une réaction aux événements.
Le dimanche est mon matin préféré pour ça, notamment parce que je reçois ce jour-là l’infolettre The Marginalian, de Maria Popova, et Sentiers, de Patrick Tanguay: deux extraordinaire sources de textes stimulants.
L’édition de ce matin de Sentiers était particulièrement riche. Elle mérite de s’y attarder longuement.
Un des textes suggérés par Patrick a particulièrement attiré mon attention: celui de Rebecca Solnit, dans The Guardian: We can’t afford to be climate doomers.
« Some days I think that if we lose the climate battle, it’ll be due in no small part to this defeatism among the comfortable in the global north, while people in frontline communities continue to fight like hell for survival. Which is why fighting defeatism is also climate work. »
Je crois, comme elle, qu’il est plus important que jamais de lutter contre le défaitisme en proposant des récits positifs, stimulants, qui permettent d’illustrer qu’aucun de nos gestes est inutile.
Il a aussi attiré mon attention parce que je me rappelais d’avoir lu d’autres textes de Rebecca Solnit.
J’ai donc fait une recherche dans mes archives.
Et là, bingo! La cascade de coïncidences. Les oiseaux du hasard se sont posés sur mon épaule, comme le dit si bien Milan Kundera (dont je suis en train de parcourir l’œuvre).
Dans un des plus récents textes publiés, Le rôle de l’imagination, (c’était il y a plus de six mois! — j’ai malheureusement publié trop peu ici en 2023), je faisais référence à un texte de Rebecca Solnit, encore une fois découvert dans Sentiers.
Le texte s’intitulait If you win the popular imagination, you change the game, et insistait sur la nécessité d’inventer de nouveaux récits pour stimuler notre capacité à faire face à la crise climatique.
« We are sadly lacking stories in which collective actions or the patient determination of organisées is what change the world. »
J’évoquais dans le texte que que les propos de Rebecca Solnit me rappelaient ceux de Cyril Dion dans son Petit manuel de résistance contemporaine — d’abord lu en 2018 et que j’ai entrepris de relire au cours des derniers jours!
J’éprouve d’ailleurs la même impression en le relisant: l’essentiel est là, la clé pour la suite se trouve dans notre capacité à créer des récits stimulants, qui donnent envie aux gens de se mobiliser en collaborant pour faire face aux défis qui nous attendent.
C’est un livre dont la lecture me semble plus importante que jamais.
***
Les réflexions de Rebecca Solnit et de Cyril Dion rappellent également l’importance de réussir à identifier les opportunités qui se cachent à travers ces défis, à venir ou immédiat, dans certains cas, particulièrement dramatiques, comme à Laihaina, sur l’île de Maui.
Une entrevue avec Kaniela Ing (que j’ai aussi lue ce matin, dans Heated), illustre d’ailleurs remarquablement tout ça, je trouve:
« I know it can sound a little wonky or too aspirational. But I was walking through the main evacuation facility yesterday, talking to folks and helping move goods, and they were telling me that exact thing. They’re like, “I just want to get back and start building houses, helping my neighbors.” They’re like, “What if we could just raise some money, buy back some of the land, and control it ourselves?” It’s intuitive. (…) I think this is an opportunity to build community in a way that it’s harder to do normally. »
Là aussi, l’existence d’un récit positif de la suite des choses apparaît aussi essentielle qu’urgente. Je pense même qu’il s’agit d’une condition à la réussite de la reconstruction.
***
Il y avait une autre référence à Rebecca Solnit dans les archives de mon blogue. Le texte, daté du 7 janvier 2021, fait référence à un livre, reçu en cadeau, par la poste, de façon anonyme (le mystère demeure d’ailleurs entier à ce jour). Il s’agit de L’art de marcher, de… Rebecca Solnit!
C’est d’autant plus amusant que j’avais reçu ce livre à l’occasion de la fin d’une série de textes que je m’étais donné le défi d’écrire à la suite de courtes marches matinales (qui sont devenus Mon théâtre matinal). Alors que je m’apprête à conclure un projet d’écriture estival intitulé Des gens merveilleux.
Et pas que ça… parce que je me suis mis de plus en plus sérieusement à la marche en 2021, après mon théâtre matinal et la lecture de Rebecca Solnit, et que je me prépare à faire la semaine prochaine un grand défi de marche: 80km en deux jours, si tout va bien.
Une aventure qui, dans ce cas, me ramènera plutôt à la lecture de l’Autoportrait de l’auteur en coureur de fond, de Haruki Murakami (lu en 2012).
La conclusion (encore préliminaire!) de mes vacances: la marche et l’écriture seront certainement deux piliers de mon automne.
Merci pour ce clin d’oeil dans un horaire très chargé. Dans le propos, je me suis procuré un ouvrage québécois pour ce 12 août. Dernière publication d’Élise Gravel et avec Mélissa Mollen Dupuis. cette bande dessinée nous introduit au bain de forêt. Nutshimit est le titre.