Le plus vite possible

Vue de la fenêtre de mon bureau à l’Hôtel de ville de Québec

3 février, déjà!… Il n’y a pas à dire, l’année 2024 est repartie sur les chapeaux de roues. J’ai l’impression qu’il y a quelque chose d’effréné dans l’air. Quelque chose dont on devrait se méfier.

Alors par ce beau samedi matin, je prends le temps d’y réfléchir un peu — et je me réjouirai si les commentaires de lecteurs venaient nourrir ma réflexion.

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Il est plus évident que jamais que nous faisons face, comme société, à d’immenses défis: de profondes transformations économiques, l’adaptation aux changements climatiques et la crise du logement, entre autres choses. À l’évidence, aucun de ces défis ne pourra être réglé d’un coup de baguette magique. Aucun geste isolé ne peut offrir une solution suffisante. Il va falloir coordonner un vaste ensemble d’actions et faire preuve de détermination dans leur mise en œuvre. C’est une période exigeante et complexe pour exercer le pouvoir. Très stimulante aussi, heureusement!

Il faut aussi constater à quel point l’action politique se réalise aujourd’hui dans un environnement médiatique qui, pour toutes sortes de raisons, impose un rythme élevé et qui nourrit plus facilement les controverses qu’il ne met en valeur les délibérations, la collaboration et les compromis qui en découlent — qui sont pourtant les indispensables rouages de la démocratie. Les médias ne sont pas des observateurs neutres de la dynamique politique, ils en sont aussi des acteurs — et leurs choix influencent le cours des choses. Il faut en être conscient, et s’adapter à cette réalité. Parce que ça fait partie de la game…

Dans ce contexte, il me semble plus déterminant que jamais que les acteurs politiques cultivent des espaces-temps propices à la réflexion et qu’ils privilégient une communication qui vise à susciter l’adhésion plutôt que de souffler sur les divisions. Ce n’est pas toujours facile, notamment parce qu’il faut, pour ça, accepter de prendre un peu de recul avant de réagir, alors que tout le monde attend une réaction, maintenant, tout de suite.

Ce matin, je me dis que ce début d’année frénétique est un bon moment pour se rappeler l’humilité qui devrait habiter les politiciennes et les politiciens: ils ne peuvent pas réaliser seuls les changements qu’ils initient. Le succès de leurs actions reposent surtout sur les citoyennes et les citoyens — et les entreprises et organismes dans lesquels ils travaillent et s’engagent.

Le premier rôle des hommes et des femmes politiques c’est de créer les conditions favorables au changement. C’est de réunir des conditions qui permettent à tout le monde d’avoir confiance que leurs actions comptent et peuvent faire la différence. Ils peuvent le faire en adoptant un discours fort, inspirant et déterminé, ils peuvent aussi le faire adoptant des lois et des règlements, mais le moyen le plus efficace reste probablement de valoriser l’engagement du plus grand nombre. Parce que si on ne le fait pas, et qu’on prive les gens de leur influence, comment s’étonner qu’ils se réfugient dans la protestation?

Pour cette raison, je pense que quand on a le privilège d’exercer le pouvoir politique, notre plus grande responsabilité c’est de nourrir la confiance dans la démocratie — en valorisant le dialogue, en créant des conditions favorables aux débats et en privilégiant des processus qui permettent de faire des essais et d’apprendre des erreurs. Il faut garder à l’esprit que c’est de cette façon qu’on pourra identifier et mettre en œuvre le plus vite possible des solutions.

En démocratie, l’objectif ne peut pas être l’unanimité, ni même le consensus. L’objectif c’est que les décisions nécessaires se prennent aussi rapidement que possible, dans le cadre de processus qui visent à susciter l’adhésion.

Je nous souhaite à tous cette sagesse en 2024 — parce qu’autrement, il y a plus de chances que les prochains mois nous essoufflent qu’ils nous permettent d’avancer vers un monde meilleur.

De quoi ce moment est-il l’occasion?

À la recherche d’un fil conducteur pour mon année 2024 (au lieu d’une simple résolution — merci Ana pour la suggestion!), j’ai lu aujourd’hui Avoir le temps, essai de chronosophie, de Pascal Chabot (présentation vidéo ici).

L’auteur fait dans ce livre un survol de quatre grands rapports au temps: le Destin, le Progrès, l’Hypertemps et le Délai — avant d’en proposer une cinquième, qu’il propose comme une forme de synthèse: l’Occasion.

Le Destin nous place dans un rapport de fatalité essentiellement déterminé par le passé.
Le Progrès nous place dans un rapport ouvert avec le futur en faisant une plus grande place à liberté.
L’Hypertemps se manifeste comme une présentification de l’histoire marquée par l’omniprésence du temps à travers les écrans, les horaires et le phénomène du crédit (en mobilisant aujourd’hui les ressources du futur).
Et le Délai, dont l’essence est d’analyser sous l’angle « du temps qui reste », à la manière d’un un compte à rebours qui nous approche d’une fatalité.

Ce quatrième rapport au temps, de plus en plus présent dans l’inconscient collectif, notamment dans le contexte des changements climatiques, pose particulièrement problème à Pascal Chabot:

« La récente prise de conscience du Délai fait naître des sentiments inédits. (…) J’aimerais par exemple nommer afuturalgie la douleur de se sentir privé de futur. Le Délai (…) a un retentissement émotionnel et affectif profond, qui peut s’accompagner d’angoisse ou de découragement. (…)

« Quel retournement curieux, que de voir des adolescents qui n’ont même pas eu le temps d’éprouver quelque nostalgie, faire déjà profession de foi afuturalgique! Avoir le sentiment de n’avoir pas de futur quand on n’a pourtant que cela, voilà la grande perversité de l’époque, qui doit nous rendre très prudents et même sceptiques dans la manière d’user de cette catégorie.

« Le plus élémentaire des devoirs envers la jeunesse est de ne pas lui livrer un manque d’avenir, ni concrètement – ce qui signifie qu’il faut agir –, ni intellectuellement, ce qui nous oblige à déboucher l’horizon, à investiguer pour savoir si d’autres schèmes temporels peuvent naître, car le Délai ne peut être le dernier mot.

« La responsabilité morale des intellectuels est ici engagée. Il y a comme un crime contre la jeunesse que de lui répéter qu’elle est la génération des tard-venus, des héritiers du monde de l’abondance qui n’en profiteront pas, ou encore des avant-derniers. »

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Pascal Chabot rappelle d’ailleurs tout au long du livre, de diverses façons que « des rapports divers à la liberté, à l’égalité et à la qualité sont en jeu derrière [ces différents rapports au temps], et [qu’il] est important de savoir choisir et favoriser. »

Dans le dernier chapitre, il porte notre attention sur le fait que le Destin, l’Hypertemps et le Délai sont en fait trois images de la fatalité, à la différence du Progrès, qui n’y participe pas. Et tout en reconnaissant que le Progrès n’est pas non plus une panacée, « ayant été la matrice d’une lecture triomphale de l’Histoire dont on a souligné la violence », il plaide « qu’il est essentiel de souligner que les qualités humanistes qu’il porte sont précieuses et doivent être cultivées. »

La question, « cruciale pour qui n’accepte pas la fatalité », devient alors de trouver « Comment réactiver le Progrès en le réorientant ? Comment sauver le Progrès de ses errements sans le sacrifier sur l’autel des culpabilités passées ? ». Ou, dit autrement « comment faire progresser notre conception du progrès ? »

Et c’est là qu’intervient à son avis le rôle de la philosophie — de la chronosophie — dont le mode de pensée doit être l’Occasion:

« L’Occasion est le moment opportun, que les Grecs appelaient kaïros. Ils avaient compris que si l’Occasion est un schème temporel, car rien ne concerne autant la chronosophie que de savoir comment agir et à quel moment, elle n’est en rien comparable au passé, au présent ou au futur. L’Occasion est comme une sortie du temps. C’est pour cela qu’elle est le temps philosophique par excellence : elle suppose le surplomb que la philosophie peut lui donner. (…)

« L’Occasion, c’est le temps philosophique de la résolution. La prise de conscience d’une fenêtre d’opportunité, qui signifie qu’il faut agir. »

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La lecture de Avoir le temps m’a donné envie de prendre un engagement envers moi-même.

Celui de me demander, aussi souvent que possible, de quoi le moment présent pourrait être l’occasion? — comme une façon d’éviter que le rythme du quotidien détermine à lui seul mon emploi du temps.

Conclusion de tout ça: le fil conducteur de mon année 2024 sera le désir de cultiver une conscience de l’Occasion.

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Photo: un ex-libris fabriqué pour moi par Capucine Baz-Laberge

Un pas à la fois

Près de Kamouraska, août 2023

Je prends quelques minutes pour lire chaque matin, avant même de me lever. Au cours des derniers mois, l’actualité a pris trop de place dans ce rituel.

Depuis le début de l’été, je tente de trouver un meilleur équilibre avec des textes plus nourrissants, qui permettent d’ancrer la journée à venir dans une démarche, plutôt que d’en faire une réaction aux événements.

Le dimanche est mon matin préféré pour ça, notamment parce que je reçois ce jour-là l’infolettre The Marginalian, de Maria Popova, et Sentiers, de Patrick Tanguay: deux extraordinaire sources de textes stimulants.

L’édition de ce matin de Sentiers était particulièrement riche. Elle mérite de s’y attarder longuement.

Un des textes suggérés par Patrick a particulièrement attiré mon attention: celui de Rebecca Solnit, dans The Guardian: We can’t afford to be climate doomers.

« Some days I think that if we lose the climate battle, it’ll be due in no small part to this defeatism among the comfortable in the global north, while people in frontline communities continue to fight like hell for survival. Which is why fighting defeatism is also climate work. »

Je crois, comme elle, qu’il est plus important que jamais de lutter contre le défaitisme en proposant des récits positifs, stimulants, qui permettent d’illustrer qu’aucun de nos gestes est inutile.

Il a aussi attiré mon attention parce que je me rappelais d’avoir lu d’autres textes de Rebecca Solnit.

J’ai donc fait une recherche dans mes archives.

Et là, bingo! La cascade de coïncidences. Les oiseaux du hasard se sont posés sur mon épaule, comme le dit si bien Milan Kundera (dont je suis en train de parcourir l’œuvre).

Dans un des plus récents textes publiés, Le rôle de l’imagination, (c’était il y a plus de six mois! — j’ai malheureusement publié trop peu ici en 2023), je faisais référence à un texte de Rebecca Solnit, encore une fois découvert dans Sentiers.

Le texte s’intitulait If you win the popular imagination, you change the game, et insistait sur la nécessité d’inventer de nouveaux récits pour stimuler notre capacité à faire face à la crise climatique.

« We are sadly lacking stories in which collective actions or the patient determination of organisées is what change the world. »

J’évoquais dans le texte que que les propos de Rebecca Solnit me rappelaient ceux de Cyril Dion dans son Petit manuel de résistance contemporained’abord lu en 2018 et que j’ai entrepris de relire au cours des derniers jours!

J’éprouve d’ailleurs la même impression en le relisant: l’essentiel est là, la clé pour la suite se trouve dans notre capacité à créer des récits stimulants, qui donnent envie aux gens de se mobiliser en collaborant pour faire face aux défis qui nous attendent.

C’est un livre dont la lecture me semble plus importante que jamais.

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Les réflexions de Rebecca Solnit et de Cyril Dion rappellent également l’importance de réussir à identifier les opportunités qui se cachent à travers ces défis, à venir ou immédiat, dans certains cas, particulièrement dramatiques, comme à Laihaina, sur l’île de Maui.

Une entrevue avec Kaniela Ing (que j’ai aussi lue ce matin, dans Heated), illustre d’ailleurs remarquablement tout ça, je trouve:

« I know it can sound a little wonky or too aspirational. But I was walking through the main evacuation facility yesterday, talking to folks and helping move goods, and they were telling me that exact thing. They’re like, “I just want to get back and start building houses, helping my neighbors.” They’re like, “What if we could just raise some money, buy back some of the land, and control it ourselves?” It’s intuitive. (…) I think this is an opportunity to build community in a way that it’s harder to do normally. »

Là aussi, l’existence d’un récit positif de la suite des choses apparaît aussi essentielle qu’urgente. Je pense même qu’il s’agit d’une condition à la réussite de la reconstruction.

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Il y avait une autre référence à Rebecca Solnit dans les archives de mon blogue. Le texte, daté du 7 janvier 2021, fait référence à un livre, reçu en cadeau, par la poste, de façon anonyme (le mystère demeure d’ailleurs entier à ce jour). Il s’agit de L’art de marcher, de… Rebecca Solnit!

C’est d’autant plus amusant que j’avais reçu ce livre à l’occasion de la fin d’une série de textes que je m’étais donné le défi d’écrire à la suite de courtes marches matinales (qui sont devenus Mon théâtre matinal). Alors que je m’apprête à conclure un projet d’écriture estival intitulé Des gens merveilleux.

Et pas que ça… parce que je me suis mis de plus en plus sérieusement à la marche en 2021, après mon théâtre matinal et la lecture de Rebecca Solnit, et que je me prépare à faire la semaine prochaine un grand défi de marche: 80km en deux jours, si tout va bien.

Une aventure qui, dans ce cas, me ramènera plutôt à la lecture de l’Autoportrait de l’auteur en coureur de fond, de Haruki Murakami (lu en 2012).

La conclusion (encore préliminaire!) de mes vacances: la marche et l’écriture seront certainement deux piliers de mon automne.

Entre l’ombre et la lumière

Je participais hier au colloque de l’AEESPUL qui se déroule sous le thème « Regards sur le Québec de demain ».

La table ronde à laquelle j’avais le plaisir de prendre part avait pour titre « Les acteurs de l’ombre ». Elle regroupait Martin Koskinen, directeur de cabinet du Premier ministre, Julie White, avocate, ancienne directrice de cabinet du ministre Gaétan Barrette, maintenant directrice chez TACT, et moi, à titre de directeur de cabinet du maire de Québec (représenté sur l’image par une vieille photo de 2014!).

Ça a vraiment été un très bel échange de plus de 90 minutes, avec des étudiantes et des étudiants très attentifs. Ça finissait bien la semaine — en marge du rythme un peu fou des autres jours.

Ça a été une belle occasion aussi pour faire une réflexion sur plusieurs aspects du rôle de directeur cabinet, et aux différentes façons de l’exercer. À trois, on pouvait témoigner d’une belle variété d’expériences.

Les réponses à la question « comment a été votre premier journée comme directeur / directrice de cabinet? » en a rapidement donné un bel aperçu. Pour Martin c’était au terme d’une longue période avec M. Legault. Pour Julie, une arrivée dans un cabinet pré-existant, pour moi, une invraisemblable journée avec tout à inventer.

Au sujet de la réalité des femmes dans le milieu politique — Julie a pu témoigner des défis variés, certains évidents, d’autres moins, par-delà les clichés. Martin a témoigné de l’impact de la parité dans les débats et arbitrages même (surtout?) au plus haut niveau. J’ai évoqué de mon côté des efforts à faire pour repenser certains mécanismes de la démocratie si on veut faciliter la participation de tout le monde. Quand on fait les consultations publiques toujours au mêmes heures, avec les mêmes contraintes, il ne faut pas s’étonner d’y voir toujours le même monde. Une plus grande diversité dans les moyens favorise aussi la diversité dans les participants. Ce n’est qu’un exemple. Il faut travailler aussi sur le fonctionnement des conseils municipaux et vraisemblablement de l’Assemblée nationale. Julie a eu raison de terminer ce segment en disant que malgré les défis, c’est un univers extraordinaire que les femmes doivent continuer d’investir avec vigueur. Les choses s’améliorent, il faut continuer.

Sur les aptitudes nécessaires pour un directeur ou une directrice de cabinet — Martin a spontanément évoqué la capacité d’offrir des conseils, avec humilité, pour que les personnes que nous servons puissent prendre la décision la mieux éclairée possible. Julie a insisté sur l’importance de la confiance: savoir faire confiance, et obtenir la confiance. J’ai ajouté le besoin d’avoir une lecture stratégique du temps et du rythme, parce qu’on ne peut pas tout faire en même temps, on ne peut pas toujours avoir la pédale au fond… il faut savoir doser, ralentir parfois certaines choses, pour faire du temps pour autre chose qui doit être accéléré, puis réajuster.

Martin s’est fait questionner sur une phrase de sa description sur Twitter: « Autodidacte assumé ». Ça a donné lieu à un bel échange sur l’importance des profils « généralistes ». J’ai dit que j’aimais beaucoup le paradoxe autodidacte assumé, parce qu’il suggère une humilité devant les experts, mais une confiance dans son jugement. On était tous les trois d’accord pour dire que les questions naïves ont souvent un rôle essentiel pour identifier des propositions politiques nouvelles.

En réponse à une question évoquant le fait que les directeurs et directrices de cabinet étaient souvent perçues comme des personnes cérébrales, les éminences grises d’un cabinet, Julie a spontanément souligné que ce n’était pas suffisant. Elle a souligné l’importance de la sensibilité et de la créativité. Ça me semble très juste. La capacité de sentir les choses et d’identifier la tendance un peu avant tout le monde, est effectivement cruciale. On ne peut pas réussir à chaque fois… mais quand on y arrive, c’est précieux.

Comment organiser le fonctionnement d’un cabinet? Quel équilibre trouver entre la centralisation et la distribution des responsabilités? D’où vient l’autorité du chef de cabinet? Nous nous entendions pas mal tous pour dire qu’il faut de l’agilité. J’ai évoqué le besoin d’accepter se remettre en question, de s’interroger sur le fonctionnement d’autres cabinets, de ceux qui nous ont précédés. Être leader, c’est aussi être capable de faire preuve d’humilité. Ne pas juger les autres, s’en inspirer plutôt.

Comment on fait pour garder une objectivité dans les conseils qu’on prodigue sans tomber dans la partisanerie? Nous étions pas mal d’accord pour dire qu’il ne faut pas voir la partisanerie comme quelque chose de négatif. J’ai soumis à la réflexion qu’un parti politique, c’est aussi un groupe de personnes qui se rassemblent parce qu’elles adhèrent à une certaine vision du monde, et sur la façon de faire de la politique. Et que quand on a ça en tête, intégrer une dimension partisane dans l’analyse des situations, c’est aussi se référer à cette vision du monde et de l’action politique. Je pense que n’est pas contradictoire avec l’objectivité, ça peut même être une forme de cohérence.

Qu’est-ce qui nous amène à accepter des boulots aussi exigeants? — Unanimement: la volonté de réaliser des projets, de changer quelque chose dans la société. Mon résumé: le désir et le plaisir de rendre possibles des choses improbables.

C’est d’ailleurs un critère de priorisation pour moi, au quotidien: les changements qui arriveraient de toute façon, qu’on soit là ou pas, quels qu’aient été les résultats de la dernière élection, ne devraient pas trop nous occuper… C’est ce qui n’arriverait pas, ou qu’on croit nécessaire de faire arriver plus vite, qui doit mobiliser nos ressources. Je pense que c’est nécessaire d’être conscient de ça si on veut faire avancer les questions les plus essentielles.

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Merci à mes deux copanélistes: nos échanges ont été vraiment très agréables.

Et surtout, un très grand merci aux étudiantes et aux étudiants pour nous avoir offert cette belle occasion de réflexion et de partage. J’espère que vous avez apprécié le résultat autant que moi (et Julie, et Martin, je pense!).

Soyez certaines et certains que le monde politique vous attend avec impatience!

Conclusion

Ce texte fait partie de la série Les images qui restent…

Dernier jour des vacances, déjà! — Mais que ça a fait du bien!

Par-delà les rencontres, toujours très agréables, les obligations et les imprévus, il y a eu de belles heures de popote, de jeux, quelques films (ce n’est pas là qu’on a eu le plus de flair!). De belles heures de lecture et d’écriture aussi.

J’ai commencé les vacances avec D’images et d’eau fraîche, de Mona Chollet, qui m’a donné l’idée d’écrire une série de textes sur les photos qui se trouvent dans mon iPhone.

J’ai poursuivi avec plusieurs récits de Sylvain Tesson, dont j’avais beaucoup apprécié Dans les forêts de Sibérie, il y a quelques années. J’ai d’abord lu S’abandonner à vivre — de courtes nouvelles — puis Blanc, puis Sur les chemins noirs et finalement La panthère des neiges — trois récits d’aventures.

Dans Les forêts de Sibérie, l’auteur a choisi de s’encabaner.

Dans Blanc et dans Sur les chemins noirs, l’auteur part à l’aventure, en skis dans les Alpes, dans un cas, et à pieds à travers la France rurale, dans l’autre.

Dans La panthère des neiges, que j’ai terminé hier soir (et que j’ai préféré à tous les autres!), l’auteur tente d’observer un animal. Dans ce cas, l’aventure ne consiste pas à atteindre une destination, mais plutôt à réussir à être à la bonne place au bon moment.

C’est le roman de l’affût, « ce luxe de passer une journée entière à attendre l’improbable».

C’est en lisant ça que toutes sortes d’associations imprévues sont apparues entre mes lectures et mes activités d’écriture des derniers jours.

Sinuosités, écrit le 3 janvier, est évidemment dans l’esprit de Blanc et Sur les chemins noirs.

Mais ce sont certains passages de La panthère des neiges qui m’ont particulièrement interpelés:

À la page 123:

« Je me jurais, une fois rentré en France, de continuer à pratiquer l’affût. Nul besoin de se trouver à 5 000 mètres dans l’Himalaya. La grandeur de cet exercice partout praticable était de toujours procurer ce qu’on exigeait de lui. À la fenêtre de sa chambre, sur la terrasse d’un restaurant, dans une forêt ou sur le bord de l’eau, en société ou seul sur un banc, il suffisait d’écarquiller les yeux et d’attendre que quelque chose surgisse. On ne l’aurait jamais noté si l’on ne s’était pas maintenu aux aguets. Et si rien n’arrivait, la qualité du temps passé s’était trouvée accrue par l’attention portée. »

Ça décrit bien le point de départ de l’exercice de relecture de mes photographies — et plus encore, l’esprit du texte Ma fenêtre, écrit le 27 décembre, et de la suggestion de lecture complémentaire, que m’a faite Luc Jodoin: Tentative d’épuisement d’un lieu parisien, auquel j’ai fait référence dans En temps réel, le lendemain.

À la page 70:

« Avec Munier, je commençais à saisir que la contemplation des bêtes vous projette devant votre reflet inversé. Les animaux incarnent la volupté, la liberté, l’autonomie : ce à quoi nous avons renoncé. »

Comment ne pas y voir un lien avec le texte Miroir animal, écrit le 4 janvier?

À la page 38:

« Si quelque chose advient ce sera la récompense. Si rien n’arrive, on lèvera le camp, décidé à reprendre l’affût, le lendemain. Alors, si la bête se montre, ce sera la fête. Et l’on accueillera ce compagnon dont la présence était sûre, mais la visite incertaine. L’affût est une foi modeste. »

Et à la page 181:

« Attendre était une prière. Quelque chose venait. Et si rien ne venait, c’était que nous n’avions pas su regarder. »

Quelques phrases que je reçois comme un rappel de l’importance d’avoir continuellement une attention active à ce qui se passe autour de soi — de ne jamais se laisser absorber par le quotidien — pour être en mesure de déceler l’improbable, et les curiosités, comme celles auxquelles j’ai fait référence le 1er janvier.

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C’est avec ce texte que je conclus la série Les images qui restent… et, du même coup, les vacances de fin d’année!

Demain, les contraintes de la vie quotidienne vont rapidement reprendre leurs droits… mais je vais tenter de rester à l’affût, tous les jours.

Ce sera ma résolution pour 2023.

Pauses

Ce texte fait partie de la série Les images qui restent…

J’ai ressenti un grand bien-être en retrouvant aussi plusieurs photos qui témoignent de courts moments d’écriture. Des moments assez spéciaux pour que je sente spontanément qu’il fallait en conserver une trace — pour m’en rappeler… et m’inciter à les multiplier.

Ce sont généralement des moments où j’aurais dû être en train de faire autre chose… mais que j’ai décidé de réclamer au quotidien. Des moments à contre-temps, pour casser le rythme.

Arrêt pour un café à la boulangerie en fin d’avant-midi le samedi — moment qui est progressivement devenu un rituel.

Très rare arrêt pour un drink dans un resto du Vieux-Port, question de faire le point au terme d’une journée particulièrement exigeante.

Pause dans le divan de la maison, dos à la fenêtre et au soleil de fin d’après-midi.

Samedi après-midi lecture et écriture d’un bilan de la semaine, dans le vieux fauteuil du chalet.

Rare dîner seul dans la cour d’un café près de l’Hôtel de ville, parce que si je ne le fais pas un vendredi au milieu de l’été, quand est-ce que je le ferai?

Court moment de recueillement avant d’ouvrir le cahier de note #1, à ma première journée dans le bureau du directeur de cabinet.

J’espère pouvoir multiplier ces courts moments d’écriture dans la prochaine année.

Miroir animal

Ce texte fait partie de la série Les images qui restent…

Quels liens entre les animaux qui se trouvent dans les photos de mon iPhone? Je pense que le plus probable, c’est la lenteur.

Les taquins me diront que c’est parce que ce sont les seuls que j’arrive à saisir.

Je pense que c’est plutôt parce qu’ils se trouvaient à réfléter mon état d’esprit au moment où nos routes se sont croisées. On s’est reconnus.

Est-ce que j’ai vu ces animaux lents parce que j’étais calme? Ou c’est leur lenteur qui a nourri mon calme? J’ose croire que c’est un peu des deux.

Il reste que ce n’est probablement pas un hasard si ces cinq photos ont été prises la fin de semaine.

Est-ce que j’aurais vu l’escargot sur ma route un jour de semaine?

Est-ce que j’aurais pris le temps de m’asseoir pour inviter le canard à s’approcher?

Est-ce que que je me serais interrogé sur la capacité des chats à apprécier un coucher de soleil?

Exception, peut-être, cet écureuil qui a l’air de me dire: « ne te trompe pas, c’est moi qui t’ai vu en premier! »

Pour voir un animal lent il faut être calme.

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L’escargot est naturellement héroïque: l’escargot ne recule jamais.

— Alexandre Vialatte

Sinuosités

Ce texte fait partie de la série Les images qui restent…

J’ai aussi retrouvé dans mon iPhone de nombreuses photos de chemins sinueux. Des voies ferrées, des chemins sur pilotis, des sentiers, des trottoirs, des côtes — autant en nature qu’en ville.

Certaines photos ont été prises au moment où je parcourais ces chemins. Je sais où ils mènent, j’ai le souvenir de ma destination. D’autres sont restés inaccessibles, mystérieux — ils restent des invitations.

Les chemins que je préfère sont ceux qui nous font oublier ce qui explique leurs méandres. Ceux dont les obstacles disparaissent dans l’élégance de leurs courbes.

Je pense que je prends spontanément des photos de ce type de chemins parce que leur beauté me rappelle à quel point il est important de savoir apprécier les détours que la vie nous impose parfois.

Associations

Cozic, Boule E (2007), photographiée au MNBAQ le 3 janvier 2020

Ce texte fait partie de la série Les images qui restent…

J’aime beaucoup les coïncidences — je les perçois comme des signes d’éveil; comme un signal de la qualité de la conscience que j’accorde à mon environnement.

Les associations d’images, ne sont pas vraiment des coïncidences, mais elles témoignent aussi d’une forme d’éveil, d’une attention continue, qui permet de faire des liens entre les choses par-delà l’instant.

J’ai donc, sans surprise, trouvé dans mon iPhone plusieurs paires de photos prises à des moments différents, simplement parce que la deuxième me faisait penser à une photo que j’avais déjà prise (que j’ai chaque fois dû retrouver: « à quoi ça me fait penser donc? recherche… recherche… ah, oui, celle-là!»).

Ce sont des photos de nature très variées. Trois exemples (les images correspondantes sont au bas du texte):

Première paire: Une photo prise lors d’une balade matinale sur le chantier de la troisième phase de la Promenade Samuel-de-Champlain: un trottoir en attente de son béton. C’était le 23 juillet, à 6h56. En après-midi, le même jour, j’ai reçu l’infolettre du New Yorker — qui contenait une illustration semblable. J’en ai conservé une copie d’écran.

Deuxième paire: En consultant Google Maps, le 16 mai 2022, la forme d’une sortie d’autoroute a attiré mon attention… elle me rappelle quelque chose… l’œuvre de Riopelle, évidemment! Google, recherche… «oui, celle-là!». Copie d’écran. Une association additionnelle dans ce cas: au centre de la sortie d’autoroute, le toponyme: Étang des Bernaches.

Troisième paire: Une oeuvre de Jean-Paul Jérôme vue à Baie-Saint-Paul le 19 août 2020, et une autre de Cozic, vue au MNBAQ le 2 janvier 2020. Carrée, sphérique: qu’importe! La parenté me semble évidente!

Dans ce cas, il s’ajoute même une coïncidence quand je relis la notice associée à l’œuvre, puisqu’elle fait référence à l’œuvre de Perec, vers laquelle Luc Jodoin me dirigeait à la lecture du premier texte de cette série consacrée aux images.

En fouillant dans les autres photos prises à Baie Saint-Paul, j’ai même pu trouver deux oeuvres de Jean-Paul Jérôme qui sont encore plus directement associées à celle de Cozic — mais pour lesquelles la parenté ne m’avait pas sautée aux yeux.

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Je pense que je conserve ces photos un peu comme des trophées de chasse. Comme autant de petites victoires de mon attention dans un monde rempli de sources de distractions.

Curiosités

Ce texte fait partie de la série Les images qui restent…

J’aime beaucoup quand l’imprévisible surgit dans le quotidien.

Quand mon attention est attirée par des choses rares, inhabituelles, originales ou improbables.

Parfois c’est arrêté à un feu de circulation que je dois saisir mon iPhone pour prendre une photo…

Comme dans le cas de ces mariées qui traversent la rue, à une période de la pandémie où il n’était probablement pas possible de célébrer des mariages dans une église.

Ou comme dans le cas de ce brigadier scolaire, habillé en Père-Noël pour le dernier jour avant les vacances.

Parfois c’est plutôt en marchant que les curiosités attirent mon attention…

Comme dans le cas de ce petit chien qui garde avec détermination (et jappements!) un spectaculaire véhicule stationné sur la rue Cartier.

Ou celui de ce bonhomme de neige qui attend très patiemment l’autobus sur le Chemin Sainte-Foy, près de chez moi.

Ou encore cet alignement de cinq voitures rouge, toutes différentes, près de chez moi, un soir d’été.

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Pourquoi prendre ces photos? Bonne question… peut-être pour pouvoir être certain que je n’ai pas juste imaginé ces moments?

Peut-être aussi parce que chacun de ces moments mériterait qu’on leur invente une histoire…

Je devrais peut-être les regrouper dans une collection que j’intitulerais « matériaux d’une fiction ».

Bricolages

Ce texte fait partie de la série Les images qui restent…

Parmi les photos des trois dernières années, je retrouve aussi plusieurs traces de séances de bricolage. Elles sont malheureusement plus rares en 2022.

La plupart des bricolages ont terminé leur route dans le bac de recyclage ou à la poubelle.

Ils ont été fait juste pour le plaisir de bricoler — pour penser à autre chose, pour voir les choses autrement, pour activer d’autres régions du cerveau, pour sortir de ma zone de confort. Et pour lâcher mon fou.

Aussitôt complété, direction poubelle pour cet ensemble de rouleaux de papier de toilettes pandémique (18 avril 2020). La photo est tout ce qu’il en reste. Souvenir d’une période très étrange où il valait sans doute mieux en rire…

Quelques autres survivent un peu plus longtemps. Pas nécessairement parce qu’ils sont plus « réussis ». Surtout par toutes sortes de hasards ou grâce à des complicités imprévues.

Le collage « courage » (14 janvier 2021), par exemple, qui s’est trouvé accroché sur le mur du salon, simplement parce que sa route a croisé un vieux cadre vide au bon moment. Plus important que d’autres? Pas du tout — juste un survivant.

Il y a aussi ce sac de papier recouvert de dessins farfelus — peint un après-midi d’été pour me vider l’esprit (12 juillet 2022)… qui s’est mérité une place sur un mur de l’hôtel de ville grâce à la complicité d’une collègue. Je pense que ça lui procure le statut d’oeuvre burlesque à quatre mains — malgré ce qu’indique la notice humoristique! (21 juillet 2022)

Il y a finalement quelques photos des processus de création — de la couleur, des pinceaux, des doigts sales.

Avec le recul, je pense que ces photos ont surtout pour objectif de me rappeler le plaisir et le bien-être que ces moments me procurent.

Mots publics

Ce texte fait partie de la série Les images qui restent…

Il y a aussi plusieurs photos de mots dans mon iPhone.

Les mots attirent manifestement mon attention, même (surtout?) quand ils ne me sont pas destinés.

J’aime les mots écrits à des endroits où on ne les imaginait pas. Les mots hors contexte, les mots codés, les mots qui font rêver.

Sur une photo: « Transition », inscrit sur une piste cyclable (1er octobre 2022, 16h38). Transition énergétique? Écologique? Ou juste l’inscription maladroite d’un détour?

Les travaux publics sont parfois source de philosophie.

Sur une autre photo, le mot « arbre » au bout d’un piquet, en bordure d’une rue fraîchement réaménagée (19 juin 2020, 20h57). Simple indication pour les ouvriers? Ou invitation poétique à fermer les yeux pour imaginer le paysage dans quelques années?

« Ceci n’est pas un arbre », aurait probablement répondu Magritte.

Il y a aussi cette photo de l’entrée de la cour de mon école primaire avec une large ligne hachurée, comme au centre d’une patinoire, avec d’un côté le mot « élèves » et de l’autre le mot « parents » — vestige des pires moments de la pandémie (8 novembre 2020, 7h20).

J’ai aussi le mot « tunnel », accompagné d’une flèche, sur un trottoir, au beau milieu de nulle part (23 juillet 2022, 7h48). Pourtant, aucun tunnel perceptible dans les environs. J’ai imaginé que c’était le reflet perdu d’un monde souterrain.

Il y a dans le paysage des mots qui indiquent, des mots qui ordonnent, des mots qui invitent à la rêverie. Il y a aussi parfois des mots qui font sourire.

Comme cet « amour » coloré, une broderie fixée là où on s’y attendait le moins: sur une clôture en bordure d’une voie ferrée (23 juillet 2022, 6h38).

Et si tous ces mots, apparemment dispersés ici et là, formaient des phrases? Quelle histoire se trouveraient-ils à raconter?

Marcher, c’est aussi parfois un peu écrire. Une photo à la fois.

Hommage

Ce texte fait partie de la série Les images qui restent…

En parcourant mes photos, je constate mon affection pour toutes sortes de curiosités trouvées dans les lieux publics. Comme ce cadre contenant un noeud papillon.

La photo a été prise le 12 août à 8h30, chez Steve-O-Reno’s, un très charmant café de Halifax.

Sous le noeud papillon, on peut lire « À la mémoire de Ted Worthington »

Sans autre explication.

Le cadrage maladroit de la photo témoigne bien que je l’ai prise à la dérobée, probablement au dessus de l’épaule de quelqu’un, au moment de quitter le café. Pas pour l’esthétique, mais comme une capture, un matériaux (pour en faire quoi? mystère! un texte? peut-être… quatre mois plus tard: le voilà!)

Le nom gravé sur une plaquette métallique m’a rappelé des inscriptions semblables sur les tables d’un café de la rue Cartier. Témoins des passages répétés des mêmes clients, aux mêmes endroits.

Et ce n’est que maintenant que je me demande qui était Ted Worthington.

Google: Ted Worthington

C’est sur son compte Twitter que je suis d’abord dirigé:

@seriauno

Avec un peu plus de recherche, sa notice nécrologique:

Captain C.R. « Ted » WORTHINGTON (1931-2021)

Je fais l’hypothèse que c’est l’amabilité de Ted Worthington qui a incité les propriétaires du café à souligner sa mémoire — bien plus que sa carrière ou d’autres accomplissements.

J’interprète mon réflexe à prendre ce type de photo comme un rappel, toujours utile, que c’est par notre façon d’être que nous marquons le plus durablement les gens autour de nous.

Ma fenêtre

Ce texte fait partie de la série Les images qui restent…

C’est la vue de la fenêtre de mon bureau.

J’y prends une photo presque tous les jours en arrivant à l’Hôtel de Ville. Je le fais depuis un peu plus d’un an — généralement autour de 7h30. Cette photo est une exception, elle a été prise à 19h36, le 28 avril.

C’est la lumière dorée sur la basilique qui a attiré mon attention et invité à prendre la photo.

Chaque journée passée à l’Hôtel de Ville commence par un regard par la fenêtre (et une photo). Elle se termine aussi par un regard à la fenêtre.

Je fais aussi de nombreux appels devant la fenêtre. Je dois y passer plus d’une heure chaque jour, observant les allées et venues sur la place — inventant parfois des personnages, des histoires ou m’imaginant observer la scène par une autre des fenêtres visibles de la Place de l’Hôtel de Ville.

Il y a toujours des choses à observer.

J’ai été particulièrement choyé cet été, parce que la Place a fait l’objet de très grands travaux. La circulation n’a pas toujours été la même, les habitudes des passants se sont modifiées…

Il y a eu des jours où les drapeaux étaient en berne. J’y ai vu des protestations et des réjouissances, des conférences de presse et nombreux élu.e.s se serrer la main. J’ai vu une statue disparaître et j’ai même pu y voir le pape parcourir la rue Buade en fauteuil roulant.

Impossible de ne pas souligner aussi le plaisir d’apercevoir la lumière de mon bureau allumée, à partir de la rue, quand j’arrive à l’Hôtel de Ville à l’aube. Accueil unique et bienveillant dont j’ai le privilège de bénéficier à mon tour.

Les images qui restent

Photo: Autoportrait, le 2 mars 2021

Le temps des Fêtes. Suspendre le temps. Prendre le temps de lire quelques livres.

J’ai commencé par D’images et d’eau fraîche, de Mona Chollet — reçu en cadeau au réveillon.

L’autrice, journaliste et essayiste, nous invite à un parcours de réflexion à travers les collections d’images qu’elle regroupe dans Pinterest. Les images sont parfois reproduites dans le livre, parfois elles sont seulement évoquées.

« Ce que nos collections disent de nous », indique le bandeau. C’est un bon résumé. La lecture m’a fait réfléchir aux images que je conserve dans mon iPhone.

Qu’est-ce qui attire suffisamment mon attention, au jour le jour, pour que je sorte le téléphone de ma poche pour prendre une photo? Qu’est-ce qui est assez important pour que je choisisse de conserver la photo? Quels sont les événements que j’aurais oublié si je n’en avais pas conservé quelques pixels? Y a-t-il des photos dont l’importance est imperceptible aujourd’hui, mais qui pourrait se révéler dans le futur? Qu’est-ce que je pourrais assurément effacer sans conséquence?

Peut-être plus intéressant: est-ce que ce qui attire mon attention évolue avec le temps? En fonction de ce qui m’occupe? Des lieux que je fréquente le plus fréquemment? Qu’est-ce que cela révèle de moi?

J’ai pris une heure ou deux ce matin pour de parcourir les photos conservées dans mon iPhone depuis le mois de mars 2020 — début de la pandémie. Pour remonter plus loin, il faudrait que je fouille dans mes archives.

Qu’est-ce que ces images disent de moi?

C’est la question qui sera au cœur de mon exercice d’écriture des prochains jours (un exercice que j’ai fait quelques fois par le passé, sur d’autres thèmes, souvent à la même période — comme une forme de rétrospective annuelle).

Textes de la série:

27 décembre: Ma fenêtre

28 décembre: Hommage

29 décembre: Mots publics

31 décembre: Bricolages

1er janvier: Curiosités

2 janvier: Associations

3 janvier: Sinuosités

4 janvier: Miroir animal

7 janvier: Pauses

8 janvier: Conclusion