Entre l’ombre et la lumière

Je participais hier au colloque de l’AEESPUL qui se déroule sous le thème « Regards sur le Québec de demain ».

La table ronde à laquelle j’avais le plaisir de prendre part avait pour titre « Les acteurs de l’ombre ». Elle regroupait Martin Koskinen, directeur de cabinet du Premier ministre, Julie White, avocate, ancienne directrice de cabinet du ministre Gaétan Barrette, maintenant directrice chez TACT, et moi, à titre de directeur de cabinet du maire de Québec (représenté sur l’image par une vieille photo de 2014!).

Ça a vraiment été un très bel échange de plus de 90 minutes, avec des étudiantes et des étudiants très attentifs. Ça finissait bien la semaine — en marge du rythme un peu fou des autres jours.

Ça a été une belle occasion aussi pour faire une réflexion sur plusieurs aspects du rôle de directeur cabinet, et aux différentes façons de l’exercer. À trois, on pouvait témoigner d’une belle variété d’expériences.

Les réponses à la question « comment a été votre premier journée comme directeur / directrice de cabinet? » en a rapidement donné un bel aperçu. Pour Martin c’était au terme d’une longue période avec M. Legault. Pour Julie, une arrivée dans un cabinet pré-existant, pour moi, une invraisemblable journée avec tout à inventer.

Au sujet de la réalité des femmes dans le milieu politique — Julie a pu témoigner des défis variés, certains évidents, d’autres moins, par-delà les clichés. Martin a témoigné de l’impact de la parité dans les débats et arbitrages même (surtout?) au plus haut niveau. J’ai évoqué de mon côté des efforts à faire pour repenser certains mécanismes de la démocratie si on veut faciliter la participation de tout le monde. Quand on fait les consultations publiques toujours au mêmes heures, avec les mêmes contraintes, il ne faut pas s’étonner d’y voir toujours le même monde. Une plus grande diversité dans les moyens favorise aussi la diversité dans les participants. Ce n’est qu’un exemple. Il faut travailler aussi sur le fonctionnement des conseils municipaux et vraisemblablement de l’Assemblée nationale. Julie a eu raison de terminer ce segment en disant que malgré les défis, c’est un univers extraordinaire que les femmes doivent continuer d’investir avec vigueur. Les choses s’améliorent, il faut continuer.

Sur les aptitudes nécessaires pour un directeur ou une directrice de cabinet — Martin a spontanément évoqué la capacité d’offrir des conseils, avec humilité, pour que les personnes que nous servons puissent prendre la décision la mieux éclairée possible. Julie a insisté sur l’importance de la confiance: savoir faire confiance, et obtenir la confiance. J’ai ajouté le besoin d’avoir une lecture stratégique du temps et du rythme, parce qu’on ne peut pas tout faire en même temps, on ne peut pas toujours avoir la pédale au fond… il faut savoir doser, ralentir parfois certaines choses, pour faire du temps pour autre chose qui doit être accéléré, puis réajuster.

Martin s’est fait questionner sur une phrase de sa description sur Twitter: « Autodidacte assumé ». Ça a donné lieu à un bel échange sur l’importance des profils « généralistes ». J’ai dit que j’aimais beaucoup le paradoxe autodidacte assumé, parce qu’il suggère une humilité devant les experts, mais une confiance dans son jugement. On était tous les trois d’accord pour dire que les questions naïves ont souvent un rôle essentiel pour identifier des propositions politiques nouvelles.

En réponse à une question évoquant le fait que les directeurs et directrices de cabinet étaient souvent perçues comme des personnes cérébrales, les éminences grises d’un cabinet, Julie a spontanément souligné que ce n’était pas suffisant. Elle a souligné l’importance de la sensibilité et de la créativité. Ça me semble très juste. La capacité de sentir les choses et d’identifier la tendance un peu avant tout le monde, est effectivement cruciale. On ne peut pas réussir à chaque fois… mais quand on y arrive, c’est précieux.

Comment organiser le fonctionnement d’un cabinet? Quel équilibre trouver entre la centralisation et la distribution des responsabilités? D’où vient l’autorité du chef de cabinet? Nous nous entendions pas mal tous pour dire qu’il faut de l’agilité. J’ai évoqué le besoin d’accepter se remettre en question, de s’interroger sur le fonctionnement d’autres cabinets, de ceux qui nous ont précédés. Être leader, c’est aussi être capable de faire preuve d’humilité. Ne pas juger les autres, s’en inspirer plutôt.

Comment on fait pour garder une objectivité dans les conseils qu’on prodigue sans tomber dans la partisanerie? Nous étions pas mal d’accord pour dire qu’il ne faut pas voir la partisanerie comme quelque chose de négatif. J’ai soumis à la réflexion qu’un parti politique, c’est aussi un groupe de personnes qui se rassemblent parce qu’elles adhèrent à une certaine vision du monde, et sur la façon de faire de la politique. Et que quand on a ça en tête, intégrer une dimension partisane dans l’analyse des situations, c’est aussi se référer à cette vision du monde et de l’action politique. Je pense que n’est pas contradictoire avec l’objectivité, ça peut même être une forme de cohérence.

Qu’est-ce qui nous amène à accepter des boulots aussi exigeants? — Unanimement: la volonté de réaliser des projets, de changer quelque chose dans la société. Mon résumé: le désir et le plaisir de rendre possibles des choses improbables.

C’est d’ailleurs un critère de priorisation pour moi, au quotidien: les changements qui arriveraient de toute façon, qu’on soit là ou pas, quels qu’aient été les résultats de la dernière élection, ne devraient pas trop nous occuper… C’est ce qui n’arriverait pas, ou qu’on croit nécessaire de faire arriver plus vite, qui doit mobiliser nos ressources. Je pense que c’est nécessaire d’être conscient de ça si on veut faire avancer les questions les plus essentielles.

***

Merci à mes deux copanélistes: nos échanges ont été vraiment très agréables.

Et surtout, un très grand merci aux étudiantes et aux étudiants pour nous avoir offert cette belle occasion de réflexion et de partage. J’espère que vous avez apprécié le résultat autant que moi (et Julie, et Martin, je pense!).

Soyez certaines et certains que le monde politique vous attend avec impatience!

Il faut faire le tramway

Sachant que je suis impliqué dans l’équipe de Bruno Marchand, et que je suis favorable au tramway, quelques personnes m’ont demandé ce que je pensais de sa position sur le sujet — parce qu’elles avaient l’impression que son engagement à réaliser le tramway avait diminué.

Je vous partage ma réflexion…

Ça m’exaspère évidemment que ce soit un sujet récurrent et omniprésent dans la politique municipale depuis dix ans. On devrait être passé à autre chose depuis longtemps. Mais que ça fasse mon affaire ou pas, ce n’est clairement pas le cas. C’est ça qui est ça.

Pourquoi c’est ça qui est ça? — Je pense que c’est parce que les raisons pour lesquelles le tramway est devenu nécessaire n’ont pas été suffisamment bien expliquées et (plus encore) parce que la confiance dans la gestion du projet est insuffisante. C’est ce qui créé des conditions favorables à son éternelle remise en question.

Force est de constater qu’il y a de plus en plus de monde (même chez les partisans du tramway), qui ont l’impression que le projet se développe par lui-même, en circuit fermé, en suivant une logique qui échappe à tout contrôle démocratique. Ça suscite de la méfiance.

Il faut réduire cette méfiance, c’est elle qui fragilise le plus le projet.

Pour y arriver, il ne suffira pas que les politiciens adoptent des positions dogmatiques du genre « je vais faire le tramway coûte que coûte ». Je pense que ce serait même contreproductif — ce serait mettre du bois dans le poêle de la méfiance.

Il est bien sûr nécessaire de réaffirmer un appui au projet et de réitérer la conviction de sa nécessité — mais je pense qu’il faut surtout s’engager à ce que le projet ne se développe pas en vase clos et qu’il puisse continuer d’évoluer en réponse aux interventions et aux propositions des citoyens.

Faire preuve d’un leadership positif, ce n’est pas juste prendre des positions fermes, c’est aussi (surtout!) démontrer la volonté de rallier — et de faire tout ce qui sera nécessaire pour y arriver.

Est-ce que j’aimerais mieux que le projet de tramway soit déjà fait? Évidemment! Est-ce que j’aimerais mieux qu’il n’ait jamais été remis en question? Bien sûr! Est-ce que je pense que le tramway aurait plus de chance de devenir réalité si le candidat que j’appuie avait dit qu’il allait faire le tramway à n’importe quel prix? Vraiment pas.

Je pense que si on veut que le tramway voit enfin le jour, il devient urgent de revoir la manière dont le projet est mené. On ne peut pas accepter que le projet perde des appuis chaque jour. Il faut inverser la tendance et faire en sorte que le projet regagne des appuis — en l’expliquant mieux, notamment au plan budgétaire, en rendant sa réalisation beaucoup plus ouverte et plus agile.

C’est ce que Bruno Marchand a dit cette semaine. Ça ne m’inquiète pas. Je suis même convaincu que ça augmente les probabilités que le tramway voit le jour.

Photo: Gros plan sur une oeuvre, d’un.e artiste inconnu.e, vue à la Maison culturelle Armand Vaillancourt, été 2021

Pourquoi j’appuie Bruno Marchand

Avec l’élection municipale qui s’approche, plusieurs personnes me demandent pour qui je vais voter. Parce que je suis resté discret jusqu’à présent… et que je n’ai jamais fait de secret de mes choix par le passé.

Je pense que c’est une forme d’engagement démocratique de partager sa réflexion à l’aube d’une élection.

Surtout dans une élection comme celle-ci où, à Québec, le résultat sera forcément un renouveau. Ça ouvre la porte à de nouvelles perspectives. 

***

J’ai rencontré Bruno Marchand une première fois il y a quelques mois. C’est son énergie qui m’a d’abord séduit, puis la qualité de son écoute.

Nos échanges m’ont amené à m’interroger sur ce qui était particulièrement important pour moi à la prochaine élection. Il y a bien des choses (évidemment!) mais une surtout: sortir du pour ou contre, du tout ou rien, du noir et blanc. Je pense que Québec souffre beaucoup, depuis plusieurs années, d’un climat où chacun doit continuellement choisir son camp, sans nuances.

Ça ne tient évidemment pas seulement au tempérament de Monsieur Labeaume et à l’approche politique de son équipe, mais ça n’y est pas étranger non plus. 

Je veux vraiment qu’on sorte de ça, parce que je pense que c’est en faisant collaborer les gens qui sont favorables à un projet et ceux qui y sont défavorables qu’on arrive à améliorer les choses. C’est vrai dans une organisation, dans une entreprise, c’est vrai aussi à l’échelle d’une ville.

Pour ça, il faut plus de transparence, plus de dialogue, la volonté de faire émerger des consensus. Il faut aussi avoir la capacité de faire accepter à tout le monde qu’il y a un moment où on a assez discuté, et qu’il faut faire arriver les choses. 

J’ai reconnu ce type de leadership chez Bruno Marchand — dans sa façon d’écouter, et de mener les débats au sein de son équipe. Dans sa façon de s’entourer aussi, de gens forts, d’horizons variés. 

Ça m’a progressivement donné le goût d’apporter ma contribution à sa campagne.

Ce que j’ai pu voir de Bruno et de son équipe depuis quelques semaines me donne maintenant le goût de vous inviter à appuyer vous aussi Bruno Marchand.

L’envahisseur

Je suis allé prendre une marche ce matin, et comme chaque matin cette semaine, j’en ai profité pour écouter CNN. Après 15 minutes, ça m’est apparu évident: Trump est un envahisseur. Il réfléchit et agit comme un envahisseur.

C’est un envahisseur de nos esprits; il occupe notre attention.

Une évidence me direz-vous? J’aurais pu comprendre ça bien avant? Sans doute, mais ça ne m’est jamais apparu plus clair que ce matin.

Parce que c’est évidemment pour ça qu’il lance des menaces de poursuites tous azimuts — pour rester dans l’actualité, pour rester dans nos esprits, encore un peu… pour ne pas perdre de terrain, pour nous empêcher de penser à autre chose que lui.

Et il réussit bien. Ça ne fait même pas 24h que Biden a été déclaré vainqueur et on ne parle déjà plus que de Trump. À nouveau! Les poursuites, réelles ou pas, à quel endroit seront-elles déposées, ont-elles des chances? Qu’en pensez-vous monsieur l’expert, et vous madame l’experte? Et vous cher passant, chère passante?

C’est à ce moment que j’ai fermé CNN.

Trump comprend très bien que l’élection est terminée et que les réseaux d’information en continue doivent encore meubler 24h de programmation — et il va s’en servir pour défendre l’espace qu’il occupe dans nos esprits depuis cinq ans.

On ne se débarrasse rarement d’un envahisseur sans poser des gestes. Il faut le chasser. Dans ce cas-ci: de nos esprits.

Je pense que ce sera notre travail à chacun dans les prochaines semaine de reconquérir notre espace mental, notre attention — pour la consacrer à mieux. Pour faire plus de place à du positif et à de l’optimisme. On en a bien besoin.

J’espère que les médias auront appris des cinq dernières années et qu’ils ne tomberont pas dans le piège — ça nous aiderait!

Je souhaite que les médias parlent du début de l’ère Biden-Harris et de la vision de la société qui l’inspire, qu’ils nous aident à interpréter les prochaines étapes et à comprendre les premiers gestes de ce réjouissant tandem… et qu’ils laissent Trump et ses sbires s’enfoncer progressivement dans l’insignifiance.

Je suis convaincu qu’il y a moyen de nous informer correctement sur les recours, légitimes, qui seront peut-être entrepris par l’équipe Trump, sans en faire une chronique constante — et sans offrir une visibilité indue à des manoeuvres qui sont essentiellement destinée à conquérir encore un peu plus nos esprits.

On s’est trop souvent indigné dans les dernières années. Il faut sortir de ça. Réapprendre à se réjouir. Arrêter de se laisser distraire.

En rappel:

Les médias, la culture et les géants du Web

À la lecture des nombreuses chroniques publiées depuis quelques jours en rapport avec la culture, les médias et les géants du Web, je sens le besoin de souligner le caractère complémentaire de trois éléments… qui m’apparaissent même indissociables.

1- Il est évidemment nécessaire de s’assurer que les géants du Web paient des impôts sur les revenus qu’ils font au Canada et au Québec — comme le font toutes les entreprises canadiennes et québécoises.

C’est une question d’équité fiscale.

Mais ça ne réglera pas les problèmes que les secteurs des médias et de la culture rencontrent aujourd’hui — qui sont essentiellement liés à l’obsolescence des modèles d’affaires.

2- Il est tout aussi nécessaire d’explorer des façons d’imposer aux géants du Web un cadre législatif et réglementaire qui permettra aux médias locaux et aux productions culturelles locales de coexister avec les offres internationales — voire d’être favorisées dans le but de soutenir la diversité des expressions culturelles.

C’est un principe qui est reconnu par la Convention sur la diversité des expressions culturelles, qui a été ratifiée par 145 pays, dont le Canada, et le Québec, en 2005.

Mais cela ne suffira pas si les les principaux intéressés s’entêtent par ailleurs dans des comportements auto-destructeurs dans l’univers numérique.

3- Il est par dessus tout indispensable que les médias (et les acteurs culturels, mais qui ont une longueur d’avance, dans ce cas) modifient leurs rapports schizophréniques avec les géants du Web.

Parce qu’il est faux de dire que les géants du Web vampirisent les contenus des médias — ce sont les médias qui font actuellement tout pour que Google et Facebook mettent plus et mieux en valeur leurs contenus. Ce sont eux qui les codent pour qu’ils soient bien indexés par Google, qui déposent eux-mêmes tous leurs contenus sur Facebook, qui s’assurent qu’ils soient le plus largement partagés, qui envoient leurs lecteurs commenter et débattre sur Facebook et Twitter, etc. Certains produisent des émissions en direct sur Facebook seulement… On en voit même accepter maintenant de l’argent de Facebook pour produire des contenus exclusifs!

Par conséquent,

Tant que les comportements par rapport aux géants ne changeront pas;
Tant que les modèles d’affaires ne changeront pas;
On aura beau adopter toutes les lois, les règlements et les quotas qu’on voudra…
Et même si on prélève (enfin) toutes les taxes et impôts de façon équitable…

…les problèmes qu’on déplore aujourd’hui ne trouveront pas de solutions durables.

La seule façon de réussir, c’est de faire tout ça à la fois.

Culture et numérique (2)

Je souhaite revenir quelques instants sur le texte que j’ai publié dimanche — et qui a suscité de nombreuses réactions au cours des dernières heures.

Ça va bientôt faire 25 ans que je travaille dans le domaine de la culture et du numérique. Ça me passionne toujours autant. Et je suis plus convaincu que jamais que la culture québécoise a tout à gagner dans le développement du numérique.

Mais on ne va quand même pas se mentir: j’ai eu plus souvent à affronter des réflexes conservateurs que des réflexes avant-gardistes au cours de toutes ces années.

Comme bien d’autres, j’ai dû apprendre à composer avec le fait que le milieu de la culture est un milieu prudent, qui préfère généralement un tiens à deux tu l’auras. Je sais que c’est un milieu qui défend plus spontanément ses acquis qu’il ne réclame des moyens pour explorer de nouvelles façons de diffuser ou de distribuer ses créations.

Dans ce contexte, je salue évidemment la campagne que la Coalition pour la diversité des expressions culturelles a mise en place à l’occasion de l’élection fédérale qui s’amorce. C’était important de le faire. Essentiel même.

Si j’ai écrit Culture et numérique, c’est parce qu’il m’apparaissait tout aussi important d’éviter que la campagne ne nourrisse indirectement les réflexes conservateur du milieu culturel. Parce que ce serait contreproductif.

La CDEC a raison de souligner que les pouvoirs publics ont le devoir d’intervenir pour assurer une meilleure distribution des revenus qui découlent de l’exploitation commerciale des productions culturelles.

Mais pour que cela soit entendu, je pense qu’il faut aussi dire, haut et fort, que c’est pour innover que le milieu culturel a besoin de plus de moyens, et que c’est aussi pour cette raison qu’il est nécessaire de mettre en place un nouvel environnement fiscal et réglementaire plus équitable pour tous les acteurs.

Il faut que ce soit très clair que les revendications qui sont mises de l’avant à l’occasion de la campagne électorale n’ont pas pour but de défendre le statu quo, les modèles économiques d’avant le Web et la belle époque où la culture évoluait dans un écosystème protégé par Ottawa.

Il ne faut pas hésiter à dire que dans une période de transformation comme celle que nous traversons, ce sont les acteurs qui font le choix d’innover qui méritent un soutien accru de l’État — pas ceux qui résistent au changement. Ça ne veut pas dire d’abandonner tout ce qui a été fait par le passé, au contraire, mais ça suppose d’accepter de le remettre en question.

Je suis convaincu que cet optimisme, cette volonté d’embrasser le numérique, est une condition essentielle pour que la population (et donc les hommes et les femmes politiques) portent attention à nos demandes… et qu’ils vont y répondre éventuellement de façon positive.

Dépendance aux écrans…

Amusante coïncidence dans l’actualité du jour…

  • François Legault qui accède à la demande des jeunes caquistes en confiant au ministre délégué à la santé, Lionel Carmant, le mandat d’organiser un forum sur la dépendance aux écrans et de déposer un plan d’action avec des campagnes de sensibilisation (voir la fin de ce texte).

J’ai très hâte de voir de quelle façon la question de la dépendance aux écrans sera abordée lors de ce forum.

Parce qu’on peut aussi bien lire sur un écran que sur du papier — et que l’un n’est pas forcément mieux que l’autre.

Parce que c’est un enjeu qui concerne pas mal tous les groupes d’âges.

Parce que c’est un peu un raccourci de parler de dépendance aux écrans alors que c’est sur les mécanismes intégrés aux logiciels pour provoquer délibérément la dépendance qu’il y a surtout lieu de s’interroger (notification, likes, infinite scroll, etc.) — bien plus que sur la nature de la surface vers laquelle on pose notre regard.

La dépendance aux écrans est très certainement devenue une question de santé publique, mais je pense que c’est illusoire de penser y faire face uniquement par une meilleure sensibilisation des utilisateurs.

Il faudra vraisemblablement aussi exiger des développeurs d’applications un certain nombre de changements, et, pour ça, il faudra que le Québec se joigne à d’autres pays.

J’espère que cela fera partie du plan d’action à venir.

Heureusement, il y a ces femmes

Christian Rioux ne comprend pas ce que les gens trouvent à Greta Thunberg et il le dit dans une chronique inutilement pamphlétaire. Je pense que c’est surtout parce qu’il n’essaie pas vraiment de comprendre. Ça me semble pourtant très simple: Greta semble réussir à faire enfin bouger le monde politique devant la crise climatique, ce que personne n’avait réussi mieux avant elle. Nous sommes plusieurs à trouver ça inspirant… Rien à voir avec le mysticisme ou la religion!

Angela Merkel l’a d’ailleurs exprimé très simplement plus tôt cette semaine — voir ici et .

Trump tend un piège aux démocrates en faisant d’Alexandria Ocasio-Cortez et ses trois collègues — Rashida Tlaib of Michigan, Ayanna Pressley et Ilhan Omar — les vilaines de la campagne électorale (voire des ennemies des États-Unis) parce que le parti démocrate manque cruellement de cohésion et de courage depuis des mois (un scénario que le Québec connaît bien).

À ma connaissance, les seuls dirigeants politiques d’influence à avoir eu le courage de dénoncer les propos et la stratégie de Donald Trump sont des femmes: Angela Merkel (Allemagne), Theresa May (Grande-Bretagne) et Jacinda Ardern (Nouvelle-Zélande).

Merci Greta,
Merci Angela,
Merci Alexandria, Rashida, Ayanna et Ilhan,
Merci Theresa,
Merci Jacinda.

Merci d’être là pour mettre un peu d’espoir dans l’actualité politique estivale.

P.S. sur la multiplication des pamphlets anti-Greta, il faut lire aussi ce texte d’Edwin Zaccaï dans Le nouveau magazine littéraire.

Mise à jour du 22 juillet — ce courrier du lecteur de Paul Dionne au sujet de Greta Thunberg est aussi très bien.

Le clivage entre les villes et les régions

Dans son éditorial d’aujourd’hui, François Cardinal évoque le dernier sondage Angus Reid pour mettre en évidence le clivage grandissant entre les villes et les régions.

À mon avis, le clivage auquel il fait référence ne repose pas tant sur «le ressentiment des perdants de la mondialisation» (qui seraient en région) et «ceux qui en chantent les louanges» (qui seraient en ville), comme il le suggère, que sur une réaction de ceux qui ont la perception de subir la mondialisation à l’égard de ceux qu’ils croient capables d’en déterminer l’avenir.

Les ruraux ne veulent pas être compensés pour les inconvénients associés au monde que les citadins sont en train d’inventer. Ils ne sont pas non plus contre la mondialisation. Ils revendiquent seulement la capacité de participer, eux aussi, à sa définition.

Pour faire face à cette situation il va falloir, après des décennies de centralisation, amorcer une ambitieuse redistribution des pouvoirs.

Il faut redonner aux régions un rôle accru dans la définition de nos projets collectifs. Non par charité citadine, mais bien parce que nous avons la conviction que ce sera ultimement favorable pour tout le monde.

Montréal et Québec font bien sûr face à des défis particuliers — mais ce n’est pas en y concentrant toutes les décisions qu’elles arriveront à les relever efficacement. C’est plutôt en leur permettant d’exercer un leadership politique positif dans le but de mobiliser l’ensemble des forces vives de toutes les régions du Québec.

***

J’ajouterai en terminant que n’est certainement pas en affirmant que les urbains sont plus ouverts et plus cosmopolites que les ruraux (suggérant un clivage entre des avant-gardistes et des rétrogrades) qu’on va améliorer la situation. C’est un type de discours paternaliste qui est, au contraire, terriblement contre-productif.

Crise climatique et discours politique

Le Quotidien a publié hier un texte de Sylvain Gaudreault qui me semble très important parce qu’il pourrait contribuer à transformer l’espace politique québécois — au sujet de l’environnement et même plus largement.

Si je me réjouis personnellement de la position prise par le député de Jonquière au sujet du projet de complexe industriel de liquéfaction de gaz naturel à Port Saguenay, c’est surtout la nature de son texte qui m’amène à en parler.

Sylvain Gaudreault explique sa position simplement, en s’appuyant sur des arguments rationnels et en explicitant les convictions qui l’animent. Il fait confiance à l’intelligence des lecteurs plutôt que de faire essentiellement appel à leurs émotions.

«Mon devoir est de prendre position. (…)

J’ai rencontré les promoteurs de GNL Québec plusieurs fois. (…) Au terme d’une analyse approfondie, j’en suis venu à la conclusion de m’opposer à ce projet. (…)

J’ai participé à trois conférences de l’ONU sur le sujet (…) [et j’en suis ressorti] convaincu que la meilleure place pour les énergies fossiles, c’est de rester enfouies! (…)

J’ai déposé un projet de loi sur le respect des obligations climatiques. Je dois donc être cohérent quand un projet se présente, même dans ma région.

Il y a assez de cynisme en politique. Je n’y contribuerai pas davantage.»

La vision à long terme, qui est plus que jamais essentielle, est aussi présente dans le texte:

«On parle d’un projet de 25 ans. À quels fins seront utilisées les infrastructures une fois cette période terminée? La région se retrouvera-t-elle avec un passif environnemental?»

Cela me ramène au texte de Roman Krznaric auquel je faisais récemment référence: Notre rapport colonial avec le futur.

Et le député termine son texte en esquissant un projet alternatif pour sa région:

«J’ai tellement d’ambitions pour la région que je souhaite qu’elle devienne [plutôt] le Klondike de l’économie verte.»

Personnellement, c’est un projet que je nous verrais bien étendu à l’ensemble du Québec (et pourquoi pas, en effet, commencer par le Saguenay-Lac-Saint-Jean?).

***

Reconnaître la crise climatique;

Reconnaître que le cynisme à l’égard la politique est un des principaux obstacle pour y faire face;

Expliciter autant que possible les valeurs et convictions qui nous animent;

Et appuyer nos positions sur des bases rationnelles plutôt qu’idéologiques ou purement émotives.

Voilà des éléments essentiels au renouveau politique dont nous avons urgemment besoin.

Bravo Sylvain Gaudreault pour ce texte exemplaire.

La démocratie et le climat

Je trouve très intéressant de voir que le thème de l’urgence climatique est en train de reconfigurer profondément la dynamique politique occidentale.

Pas mal tout le monde est forcé de se positionner par rapport à cette urgence. En la contestant, en la nuançant, en y adhérant mollement ou en en faisant une priorité (et toutes les variantes possibles de ces positions).

Ça amène un nouveau vocabulaire; ça provoque des changements de stratégie et (surtout!) ça favorise l’apparition de nouvelles voix et de nouvelles formes de leadership. Globalement, je trouve ça très stimulant.

Il y a toutefois quelque chose qui me déplaît et qui m’inquiète.

Je vois apparaître dans le discours d’une certaine gauche les germes d’un discours autoritaire. Je le perçois dans les discours menaçant et les ultimatums, dans la remise en question de la démocratie et dans une forme de catastrophisme qui pourrait justifier bien des excès.

À titre d’exemples:

Ça m’inquiète parce que je crois que pour faire face à l’urgence climatique on n’a pas besoin de moins de démocratie… au contraire, on a besoin de plus de démocratie, mais d’une démocratie renouvelée, plus directe, plus transparente, plus efficace — une démocratie mieux représentative.

Depuis quinze ans, la droite nous dit: il faut sacrifier quelques libertés pour avoir une société sécuritaire. Je ne veux pas que la gauche me dise maintenant qu’il faut sacrifier un peu de démocratie pour avoir une société plus écologique.

L’urgence climatique exige qu’on transforme radicalement notre démocratie; pas qu’on la sacrifie.

Urgence climatique?!

J’apprends dans Le Soleil de ce matin que les villes de la Communauté métropolitaine de Québec viennent de voter à l’unanimité une déclaration qui reconnaît l’urgence climatique.

Bien. C’est un minimum…

François Bourque se demande si c’est le début d’un temps nouveau. Je veux le croire — mais je partage son scepticisme.

Si le mot urgence veut encore dire quelque chose, alors il faudrait qu’une telle déclaration soit accompagnée de gestes immédiats et déterminants.

Annoncer une journée de réflexion et un comité de travail, ça ne correspond pas à ma définition de gestes immédiats et déterminants.

Il est plus que temps de passer de la parole aux actes.

Les élus de la région de Québec (et de tout le Québec) devraient porter une très grande attention à ce qui s’est passé à Londres la fin de semaine dernière, où le mouvement Extinction Rebellion a pris son envol.

«In London, thousands of climate-change protesters blocked Waterloo Bridge, over the River Thames, and Oxford Circus, in the West End (…) Slightly more than a thousand Extinction Rebellion activists, between the ages of nineteen and seventy-four, were arrested in eight days. On Easter Monday, a crowd performed a mass die-in at the Natural History Museum, under the skeleton of a blue whale. In a country whose politics have been entirely consumed by the maddening minutiae of leaving the European Union, it was cathartic to see citizens demanding action for a greater cause.»

«In a video message, Christiana Figueres, the former executive secretary of the United Nations Framework Convention on Climate Change, compared the civil disobedience in London to the civil-rights movement of the sixties and the suffragettes of a century ago. “It is not the first time in history we have seen angry people take to the streets when the injustice has been great enough,” she said.»

Source: The Uncanny Power of Greta Thunbergs Climate Change Rhetoric

***

Ça ne fait que commencer. Il suffit d’ajouter Extinction Rebellion à son fil twitter pour le constater.

Mise à jour: Blocage de la bourse de Londres ce matin… (CBC couvre aussi)

Il se pourrait bien que le mouvement s’étende au monde entier beaucoup plus vite qu’on le pense.

Parce qu’il y a urgence. Pour vrai.

Photo: Robe conçue par Thierry Mugler, vue au Musée des Beaux-Arts de Montréal en mars 2019.

Offrir une vue d’ensemble

Je suis fasciné par Alexandria Octavio-Cortez — au point où je pense que j’en suis fatiguant pour mes proches.

La plupart des observateurs soulignent son positionnement très à gauche (elle revendique le terme socialiste). Certains craignent même que cela ne contribue à la réélection de Trump.

Pour ma part, c’est pour toute autre chose que je la trouve exceptionnelle.

Je suis surtout impressionné par sa capacité à expliquer simplement les liens complexes qui unissent les défis auxquels la société étatsunienne est confrontée: l’environnement, l’économie, l’immigration, l’éducation, notamment.

L’entrevue qu’elle a accordée à The Intercept il y a quelques semaine est très intéressante à cet égard.

Le Green New Deal, dont elle est la marraine, est aussi un remarquable exemple de ses habiletés pédagogiques.

Le Green New Deal n’est pas une proposition purement environnementale. C’est une vision globale pour la société étatsunienne.

Et il semble y avoir y avoir un grand appétit dans la population pour ce type d’approche plus globale. En particulier chez les jeunes.

Malheureusement, au Québec, peu d’élu.e.s semblent intéressé par ce type de politique. On est encore trop souvent dans une bataille au jour le jour pour gagner l’attention des médias, un sujet à la fois.

On parle d’environnement un jour. D’immigration le lendemain. Puis d’économie, d’éducation, de transport — comme si c’était autant de sujets sans liens les uns avec les autres.

On ne pourra pourtant pas répondre aux enjeux liés aux changements climatiques sans une préoccupation pour l’équité fiscale, par exemple.

Emmanuel Macron l’a appris à ses dépends en provoquant la crise des gilets jaunes par une application injuste d’une taxe sur le diesel.

Les citoyens des régions, qui dépendent de leur voiture pour aller travailler, ont eu raison de protester, voyant que la taxe qui leur était imposée n’avait pas d’équivalent pour le kérosène des avions, dont les riches sont les principaux utilisateurs.

Ils ont eu raison de dire que ce n’est pas normal que les propriétaires de voiture électrique — plus riches que la moyenne — ne payant plus la taxe sur l’essence, contribuaient de moins en moins aux coûts d’entretiens des routes, alors qu’ils les utilisent tout autant.

La fiscalité carbone ne peut pas être dissociée de l’équité fiscale dans son ensemble.

***

Je rêve d’un parti politique qui, au lieu de chercher à gagner chaque journée, mettra sur la table un plan d’action pour aider la société québécoise à relever les défis du XXIe siècle. En sachant qu’il faudra défendre ce plan tous les jours, pendant des mois, pour l’expliquer, et que l’adhésion à ces idées ne viendra qu’avec le temps, et qu’elle dépendra de la mobilisation des forces vives de la société.

Je crois que le Parti Québécois serait le mieux placé pour faire ça, notamment grâce à la capacité (qu’il a déjà eu — l’a-t-il encore?) pour rallier des gens de tous les horizons politiques. Mais encore faudrait-il que ses principaux leaders aient envie d’une telle aventure.

En attendant, j’observe Alexandria Octavio Cortez et son équipe rebrasser les cartes de la politique étatsunienne avec le sourire, en proposant beaucoup plus souvent qu’elle ne critique.

J’ose croire que je ne suis pas le seul à trouver ça inspirant.

Et toi, tu ferais quoi avec le PQ?

— Ok, ok… ça va pas bien, on est d’accord, mais tu ferais quoi toi avec le PQ?

C’est la question que je me suis fait poser à la fin d’un échange avec des amis cette semaine.

Je reconnais que la question est légitime, parce que quand on se permet de critiquer il faut aussi avoir le courage de se mettre en mode proposition.

Alors je veux bien y répondre… mais comme j’ai choisi de prendre quelques distances du Parti Québécois et que je ne veux surtout pas donner l’impression de prendre une position de donneur de leçons, je précise d’entrée de jeu que je formule ma réflexion avec beaucoup d’humilité. Je le fais dans l’espoir de contribuer à une réflexion qui, je le sais, se fait par ailleurs dans les différentes instances du parti… dans un contexte beaucoup plus complexe que le mien.

Cela dit, je ferais quoi du PQ dans la situation actuelle?

Je pense que je commencerais d’abord par reconnaître que les résultats de la dernière élection ne sont pas seulement dus aux circonstances (appel du changement, émergence de Québec solidaire, etc.). Ils ne sont que l’énième (l’ultime?) étape d’un long décrochage du parti, auquel une très large partie de la population ne souhaite maintenant plus être associée.

J’exprimerais ensuite l’absolue nécessité de refonder le parti. Et je mettrais tout sur la table: le programme, la structure et, bien sûr, le nom du parti (dont le changement ne devrait avoir lieu qu’au terme de la refondation, comme un geste symbolique qui marque la fin de la métamorphose, et non le début).

Je mettrais finalement sur la table une proposition de départ pour guider les échanges qui devront guider la refondation. Un texte court, qui devrait énoncer clairement les principes qui devraient être au coeur de la transformation du parti.

Quelque chose comme:

  1. Nous croyons que l’expression culturelle et la fréquentation de la culture doivent être la base de l’identité nationale et de notre vie démocratique.
  2. Nous croyons que l’éducation doit avoir comme premier objectif le développement de la confiance en soi et l’autonomie de toutes les citoyennes et de tous les citoyens.
  3. Nous croyons que le rôle de l’État est de s’assurer que le développement économique de la nation québécoise se fait de façon équitable pour tous les citoyens et pour toutes les citoyennes.
  4. Nous savons que le développement équitable de la société québécoise est dorénavant conditionné par les enjeux associés aux changements climatiques et que cela nous oblige à réfléchir continuellement avec une perspective environnementale planétaire.
  5. Nous croyons que l’indépendance politique du Québec est nécessaire pour pouvoir concrétiser les quatre principes précédents.
  6. Nous reconnaissons toutefois que la souveraineté dont le Québec a besoin pour assurer son développement n’est pas seulement liée à son statut constitutionnel. Sa dépendance croissante à l’égard de certaines entreprises médiatiques, technologiques, pharmaceutiques et agroalimentaires, par exemple, est également préoccupante.
  7. Toutes les personnes qui adhèrent aux six principes ci-dessus sont invitées à joindre le parti pour débattre des meilleures façons de les concrétiser.
  8. Le premier rôle du/de la chef.fe de notre parti est d’arbitrer les débats au sein du parti et d’agir comme porte-parole des décisions qui auront été prises au terme de ces débats.

Je préciserais en conclusion que l’objectif de cette démarche ne doit pas être de plaire à tous les membres actuels du Parti. L’exercice doit avoir pour objectif prioritaire de susciter l’intérêt de celles et ceux qui seront au coeur de la vie démocratique en 2026 et en 2030. Il faut se donner de la perspective!

Inutile de se raconter des histoires: le Parti Québécois ne reprendra vraisemblablement pas le pouvoir en 2022. Il faut maintenant travailler avec une perspective de 8 ans… voire plus.

Pour cette raison, on devrait aussi assumer que ce qui est important pour le Parti Québécois ce n’est pas d’être pertinent à la prochaine session parlementaire, ou même à la suivante. Il ne s’agit plus de gagner la journée, ou d’être au coeur des travaux parlementaires — du moins pas à court terme. Le parti est en convalescence. Il faut travailler sur lui avant de pouvoir prétendre retrouver notre place dans le feu de l’action.

Et, de grâce, ne me demandez pas ce que René Lévesque penserait de ma proposition.

Ça n’a absolument aucune importance.

Par-delà la gauche et la droite

De retour d’une journée de travail à Montréal, je me suis fait prendre à écouter deux épisodes de balados sur la politique…. alors que je tente depuis quelques semaines de prendre un peu de recul sur tout ça pour éviter de soupirer inutilement tous les jours. Je suis incorrigible…

Tant dans l’épisode des Engagés publics que dans celui d’Esprit politique, ce qui m’a frappé, c’est l’accent qu’on met encore trop souvent (il me semble) sur le positionnement des partis politiques sur l’axe gauche-droite. C’est une perspective qui me semble pourtant de plus en plus insuffisante pour décrire les résultats électoraux, tant aux États-Unis qu’au Québec.

Je pense qu’on sous-estime largement l’influence de la manière de faire de la politique dans les résultats obtenus par les partis, qu’ils soient plutôt à gauche, plutôt à droite, au centre, fédéralistes ou indépendantistes.

Est-ce que c’est parce qu’il avait un programme trop à gauche ou trop à droite que le Parti Québécois a obtenu les résultats qu’on connaît lors de la dernière élection? Je ne pense pas. Est-ce que ce ne serait pas plutôt parce qu’il s’est constamment laissé distraire? Qu’il a adopté des stratégies de communication qui ont aussi contribué à distraire les électeurs des enjeux pour lesquels le parti avait des propositions structurantes et inspirantes à formuler?

Est-ce qu’on ne devrait pas explorer la possibilité que c’est en cherchant à satisfaire l’insatiable appétit des médias pour l’instantanéité et en succombant à la facilité des réseaux sociaux, que plusieurs partis politiques occidentaux sont en train de courir à leur perte?

Est-ce ces partis n’en viennent pas à banaliser leur prise de parole à force d’avoir une opinion sur tout, à tweeter sur tout et sur rien, à s’indigner à tout vent et en entretenant une impression de calculs tactiques et politiques? Une parole alors condamnée à devenir de plus en plus insignifiante? Comment s’étonner alors de la place croissante occupée par les polémistes?

Je pense que pour continuer à être pertinent et retrouver la confiance des électeurs, le Parti Québécois doit s’interroger aussi sur sa façon de participer au débat public. Peut-être parler moins, mais mieux. Se concentrer sur les sujets où il peut faire la différence.

Être pour quatre ans la deuxième opposition lui offre un contexte idéal pour faire ça.

Concourir avec le Parti Libéral (ou Québec Solidaire) en multipliant tous les jours les déclarations inutiles dans le simple but de donner l’impression d’être la première opposition entretiendrait au contraire les causes de la lente désaffection des électeurs depuis 1995.

Il faut cesser de donner l’impression qu’on accorde plus d’importance à gagner la journée qu’à incarner un projet inspirant.

C’est avec cet état d’esprit que je suggère la lecture du texte suivant à celles et ceux qui participeront au Conseil national de la fin de semaine prochaine:

In Victory, Alexandria Ocasio-Cortez Showed That Authentic Progressive Values Can Redefine Political Reality