Pourquoi j’appuie Bruno Marchand

Avec l’élection municipale qui s’approche, plusieurs personnes me demandent pour qui je vais voter. Parce que je suis resté discret jusqu’à présent… et que je n’ai jamais fait de secret de mes choix par le passé.

Je pense que c’est une forme d’engagement démocratique de partager sa réflexion à l’aube d’une élection.

Surtout dans une élection comme celle-ci où, à Québec, le résultat sera forcément un renouveau. Ça ouvre la porte à de nouvelles perspectives. 

***

J’ai rencontré Bruno Marchand une première fois il y a quelques mois. C’est son énergie qui m’a d’abord séduit, puis la qualité de son écoute.

Nos échanges m’ont amené à m’interroger sur ce qui était particulièrement important pour moi à la prochaine élection. Il y a bien des choses (évidemment!) mais une surtout: sortir du pour ou contre, du tout ou rien, du noir et blanc. Je pense que Québec souffre beaucoup, depuis plusieurs années, d’un climat où chacun doit continuellement choisir son camp, sans nuances.

Ça ne tient évidemment pas seulement au tempérament de Monsieur Labeaume et à l’approche politique de son équipe, mais ça n’y est pas étranger non plus. 

Je veux vraiment qu’on sorte de ça, parce que je pense que c’est en faisant collaborer les gens qui sont favorables à un projet et ceux qui y sont défavorables qu’on arrive à améliorer les choses. C’est vrai dans une organisation, dans une entreprise, c’est vrai aussi à l’échelle d’une ville.

Pour ça, il faut plus de transparence, plus de dialogue, la volonté de faire émerger des consensus. Il faut aussi avoir la capacité de faire accepter à tout le monde qu’il y a un moment où on a assez discuté, et qu’il faut faire arriver les choses. 

J’ai reconnu ce type de leadership chez Bruno Marchand — dans sa façon d’écouter, et de mener les débats au sein de son équipe. Dans sa façon de s’entourer aussi, de gens forts, d’horizons variés. 

Ça m’a progressivement donné le goût d’apporter ma contribution à sa campagne.

Ce que j’ai pu voir de Bruno et de son équipe depuis quelques semaines me donne maintenant le goût de vous inviter à appuyer vous aussi Bruno Marchand.

Ville, technologie, démocratie

J’ai été fasciné par l’entrevue que Jean-Nicolas Blanchet a réalisée avec Michel Dallaire et que le Journal de Québec a publiée il y a quelques jours. Le président du groupe Cominar y partage certaines des convictions qui guident ses choix comme entrepreneur dans le domaine de l’immobilier: sa vision de l’avenir de la ville.

Le titre de l’article donne déjà le ton: La vie de tout le monde va changer.

Michel Dallaire est notamment convaincu que la circulation va bientôt changer complètement:

«La journée où les autos se conduisent toutes seules, ça roulera plus vite et plus proche. (…) Avez-vous une idée à quel point on augmentera la capacité des autoroutes? (…) Nos voitures vont aller nous porter au travail et retourneront ensuite à la maison.

on en est rendu là. Nous n’aurons plus besoin de stationnements. (…) On s’en va là, c’est la réalité, ça existe et ça s’en vient vite.»

Je partage son enthousiasme pour les automobiles autonomes (même si l’hiver reste un obstacle majeur pour les technologies existantes) et je suis, moi aussi, convaincu que l’organisation des villes va en être bouleversée à très court terme (une génération). Je suis plus perplexe devant l’idée que des véhicules personnels nous déposeront au boulot pour retourner à la maison, mais qu’importe.

Ce qui m’a le plus fasciné en lisant cette entrevue, c’est de constater l’écart qui semble s’être créé entre la vision du plus important promoteur immobilier de Québec (et d’une partie de ses collègues, réunis dans l’Institut de développement urbain du Québec) et celle que nous avons, collectivement, de l’avenir de notre ville (de nos villes).

Est-ce que les élus ont aussi une vision claire de comment évoluera la ville en réaction aux changements technologiques qui se présentent à nous? Quelle est-elle? Comment comptent-ils susciter l’adhésion de la population à cette vision?

Pendant que les promoteurs immobiliers réfléchissent à l’impact des bouleversements technologiques et planifient leurs projets en conséquence, les pouvoirs publics n’assument pas la responsabilité du leadership d’une réflexion collective sur ces questions — pourtant de plus en plus fondamentales. Les médias ne semblent pas pressés non plus de s’engager dans cette voie.

Comment peut-on évoquer la construction d’un troisième lien interrives à Québec, par exemple, sans évoquer l’impact de l’avènement des automobiles autonomes? Surtout quand on sait que plus de temps nous sépare de l’inauguration d’un tel lien (quel qu’il soit), qu’il s’en est passé depuis le début des projets de Tesla (autour de 2010).

Est-ce que les ingénieurs du ministère des Transports qui repensent la circulation à la tête des ponts (entre autres dans la perspective de la construction du projet Le Phare, un projet de Cominar), ont intégré ces technologies à leurs divers scénarios? J’en doute. Bravo si tel est le cas, mais cela ne pourra pas toujours se faire derrière des portes closes, ou dans le cadre de négociation avec des promoteurs immobiliers.

Un débat public s’impose au sujet de la vision de la ville qui nous anime (et qui guidera les investissements publics). Les changements technologiques qui s’en viennent seront sans précédent, tant par leur ampleur que par la vitesse avec laquelle ils s’imposeront à nous. Dans un tel contexte, l’engagement et l’adhésion des citoyens est un impératif démocratique.

Il me semble que Michel Dallaire devrait pouvoir convaincre le maire Labeaume de ça — et exercer ensuite un rôle de leadership dans cette réflexion.

Dîner conférence avec Alexandre Taillefer

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J’ai pris part ce midi à un dîner de la CDEC de Québec, à l’occasion duquel Alexandre Taillefer — que je trouve toujours très inspirant — était le conférencier invité.

Encore cette fois, j’ai beaucoup apprécié son allocution, sauf un tout petit passage… et un autre qui m’a laissé sur ma faim. J’en retiens aussi une idée forte, dont je me ferai dorénavant aussi le promoteur. À découvrir ci-dessous.

Je trouve dommage que Le Soleil rapporte seulement les propos d’Alexandre qui concernaient le dossier du SRB et du troisième lien (les plus polémiques, surtout quand on prend bien soin d’écrire le mot taxes dans le titre de l’article), parce qu’il avait pourtant bien pris la peine de les situer dans contexte beaucoup plus large, abordant notamment le thème de l’économie sociale et de la lutte aux inégalités.

C’est entre autres pour contribuer à lutter contre cette forme de sensationnalisme que je partages ici les notes que j’ai prises pendant la conférence.

***

D’entrée de jeu, Alexandre a présenté l’élection de Donald Trump comme une nouvelle manifestation de l’envie d’une partie de la population de faire tabula rasa de la politique et de l’économie telle qu’on la connaît depuis une trentaine d’années. Une envie qu’il est important de comprendre, mais qu’il ne partage pas. C’est même une chose qu’il lui apparaît absolument essentiel de contrer afin si on veut s’éviter le même genre de coup de gueule de l’électorat. Je suis bien d’accord avec lui.

Il a aussi rappelé que le Québec est une des sociétés où les inégalités entre les plus riches et les pauvres sont les plus faibles. «Il fallait être visionnaire, il y a trente ans, pour placer l’équité comme une des valeurs les plus importantes dans le développement de la société québécoise. Il ne faut pas perdre ça.» Et, pour lui, l’économie sociale est un des meilleurs atouts que nous avons pour ça. «Dans dix ans, l’économie sera sociale ou ne sera pas», dit-il. Il importe toutefois d’éviter le chant des sirènes du protectionnisme, a-t-il précisé. Reste à voir comment.

À son avis, le plus grand défi auquel est confronté la société québécoise consiste à sortir de la misère les gens qui vivent dans des conditions impossibles — à commencer par le monde du travail. D’où sa lutte en faveur d’une augmentation du salaire minimum à 15$. «Une société a des choix à faire: est-ce que c’est moralement acceptable d’offrir un salaire sous le seuil de la pauvreté à quelqu’un qui travaille à temps plein? Pour moi, c’est non.»

Pour cette raison, il faudra arriver à mieux documenter l’éthique des entreprises. Il propose pour cela de mettre en place «quelque chose comme la fiche nutritionnelle qu’on applique maintenant sur les aliments et qui nous permet de savoir ce qu’on mange… et de faire des choix». On pourrait y retrouver sur cette fiche-entreprise certaines infos sur la fiscalité des entreprises, leur empreinte écologique, les écarts dans la rémunération, etc. L’idée reste bien sûr très préliminaire, mais elle mérite certainement d’être promue.

Alexandre a témoigné du fait que c’est son incursion dans le monde du taxi qui l’a sensibilité à la réalité des travailleurs autonomes qui se retrouvent souvent dans des emplois qui deviennent rapidement des casiers à homards — des pièges dont ils deviennent prisonniers, parce qu’ils représentent leur seule source de revenus, mais qu’ils ne leur permettent pas de subvenir adéquatement à leurs besoins. Ses exemples étaient très concrets, éclairants.

C’est d’ailleurs ainsi que son propos s’est progressivement dirigé vers les questions de mobilité: notamment pour rappeler que la voiture est aujourd’hui le principal facteur d’appauvrissement individuel et collectif au Québec. Et que même s’il ne sera pas facile de renverser cette situation, ça apparaît plus indispensable que jamais.

De son point de vue, le projet de Service Rapide par Bus (SRB) de Québec est prioritaire à la construction d’un troisième lien entre Québec et Lévis. Une fois le projet déployé, et un service de très haute qualité bien en place, il faudra même envisager des mesures de tarification horaire pour l’usage des ponts (de manière à éviter une trop grande concentration aux heures de pointe) avant de projeter la construction d’une nouvelle infrastructure. Je crois qu’il y a possiblement des alternatives à la tarification, mais je crois qu’il a raison de soulever aussi cette question. Une chose est toutefois très claire: pour lui la dernière chose à faire aujourd’hui, c’est d’investir dans de nouvelles infrastructures routières. «Nous investissements c’est dans les écoles primaires et secondaires qu’on doit les faire.»

J’ai toujours apprécié tout particulièrement le fait qu’Alexandre a le courage plaider, sans trop de nuances ou de réserves, des idées qui déplaisent — et même des idées qu’il sait très bien qu’elles ne pourront jamais être populaires. Sa franchise me semble rafraichissante et je pense que c’est ce qui fait que les gens lui accordent aussi facilement leur attention.

Et c’est justement parce que je lui reconnais cette franchise, et que je l’estime au plus haut point, que je me permet de préciser le petit moment qui m’a un déplu dans sa présentation. Un moment où je l’ai senti inhabituellement vaseux.

Alexandre plaidait alors que le rôle le plus fondamental de la politique était de rendre la population heureuse. Ce avec quoi je suis d’accord. Puis, se référant aux critères du World Happiness Index (richesse collective, espérance de vie, manifestations de générosité, existence d’un filet social, liberté et absence de corruption), il a pointé la responsabilité des médias — qui ne doivent pas noircir inutilement la situation — et la nécessité de valoriser l’engagement des hommes et des femmes politique. Jusque-là, ça va.

Mais lorsqu’Alexandre a profité de l’occasion pour prendre la défense de Philippe Couillard, j’ai décroché. Il s’est appuyé pour ce faire sur le défi que le chef du Parti libéral a lancé cette fin de semaine: «Depuis que je suis chef, il ne s’est rien passé de condamnable, ou prouvez-moi le contraire!», disait-il. «Eh bien vous savez quoi, je le crois moi, a dit Alexandre. Il faut lui faire confiance, arrêter de se moquer des politiciens et cesser de faire preuve d’autant d’arrogance à leur endroit.»

Ça m’a déplu parce que je trouve ce plaidoyer était non seulement superflu, mais qu’il ne servait même pas son propos. Entretenir un climat de confiance, pour un politicien, c’est beaucoup plus que de ne pas être coupable soi-même. Et je suis convaincu qu’Alexandre le comprend très bien. Il ne faut pas confondre la confiance et la candeur.

Finalement, le moment qui m’a laissé sur ma faim est survenu à la période de questions — et cette fois Alexandre n’y est pour rien!

À son tour, un homme a soulevé le fait que Donald Trump avait été porté vers la victoire notamment par les travailleurs victimes de la délocalisation des emplois. «C’est un danger économique du passé, le prochain danger qui guette les travailleurs, c’est la robotisation et l’automatisation, et je pense que ce sera bien pire; qu’en pensez-vous M. Taillefer?».

Le manque de temps a forcé une réponse très brève — beaucoup trop brève! — essentiellement pour dire qu’en effet, aucun travailleur ne sera épargné… pas même les avocats et les chirurgiens.

J’aurais beaucoup aimé entendre Alexandre développer sa pensée sur ce sujet parce que c’est un enjeu qui m’apparaît absolument déterminant pour l’avenir du Québec… et devant lequel les politiciens actuels me semblent complètement démunis.

Ce sera pour une autre fois, j’espère.

La tête des ponts

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Je prends très souvent le train vers Montréal, le plus souvent à la gare de Sainte-Foy — une gare située au beau milieu de nulle part, et tout à fait inadaptée à l’importance de sa fréquentation.

Alors pas besoin de dire que je me réjouis quand je lis un article comme celui d’Annie Morin, dans Le Soleil de ce matin:

Des projets pour les gares de VIA Rail à Québec

Sauf que je reste un peu perplexe. En particulier quand je lis ce passage:

«Le maire Régis Labeaume a confirmé qu’il y avait des propositions pour la gare dans les plans de réaménagement de l’entrée de la ville par les ponts Pierre-Laporte et de Québec. Lancé sous Sam Hamad, ce grand projet est ficelé depuis plus d’un an, mais n’a jamais été rendu public comme promis.»

Je reste perplexe parce que le dossier du réaménagement de la tête des ponts est en train de devenir une véritable caricature de la politique du secret.

Il faut dire que ce dossier est absolument fondamental pour le développement du plateau de Sainte-Foy. Un dossier qui mériterait au moins autant d’attention que le celui d’un éventuel troisième lien pour améliorer la circulation entre les deux rives. Un dossier qui est particulièrement délicat dans la perspective de la construction du gratte-ciel Le Phare et de tous les enjeux et débats associés.

C’est surtout un dossier qui va affecter la qualité de vie de dizaines de milliers de personnes, pendant les énormes travaux, bien sûr, mais aussi bien après — pendant des décennies. Tout ça, sans parler des coûts qui pourraient dépasser le milliard de dollars.

Et pourtant, c’est un dossier qui se développe dans le secret, depuis des années. Disons le clairement: c’est inacceptable.

Pour rappel:

Le 2 avril 2015, la même journaliste annonçait déjà que le projet prenait forme:

Réaménagement de la tête des ponts: de la théorie à la pratique

Karine Gagnon y avait aussi fait référence dans le Journal de Québec:

Deux fois moins cher pour la tête des ponts

Le gouvernement convoquait par la suite une conférence de presse, prévue pour le 28 avril 2015, afin de présenter officiellement le projet de réaménagement.

Cette conférence de presse a finalement été annulée pour que le premier ministre puisse présenter les candidats du Parti Libéral dans les deux élections partielles qui étaient attendues dans la Capitale-nationale.

Report de la conférence de presse – Dévoilement du schéma directeur de l’entrée sud de la capitale nationale

Véronyque Tremblay et Sébastien Proulx, candidats du Parti libéral du Québec aux élections partielles de Chauveau et de Jean-Talon

Je m’en souviens très bien, parce que j’étais moi-même candidat pour le Parti Québécois dans la circonscription de Jean-Talon. J’avais même spécifiquement interpellé mon adversaire pendant un débat radiophonique pour qu’il s’engage à présenter le projet de réaménagement de la tête des ponts étant donné son importance pour les citoyens que nous souhaitions tous les deux représenter.

Résultat: quinze mois plus tard, Sam Hamad n’est plus ministre responsabie de la Capitale-nationale, Robert Poëti n’est plus ministre des Transports, Jacques Daoust, qui lui avait succédé, est reparti lui aussi, et le tout nouveau ministre des transports semble préférer parler du troisième lien. Tout va bien.

Si le projet pour le réaménagement de la tête des ponts est prêt, comme on le dit, alors il faut qu’il soit rendu public, sans délais, de manière à pouvoir faire l’objet d’un débat public.

Ce n’est pas d’un chantier ordinaire qu’il s’agit, c’est de la transformation en profondeur de tout un secteur de la ville, dont les impacts seront durables, dans toute la région.

Mise à jour: En fin de journée, Agnès Maltais et Martine Ouellet diffusaient le communiqué suivant: Le gouvernement libéral doit rendre public son plan de réaménagement

Les groseilles

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C’est la même chose chaque été. Quand je croque une groseille, je me retrouve immédiatement transporté dans le temps et dans l’espace: directement sur la rue Laberge, chez l’oncle Émile, vers 1980.

L’oncle Émile, c’était l’oncle de mon père. Et la photo ci-dessus (tirée de Google StreetView), c’est sa maison — dans l’état où elle se trouvait l’an dernier. Elle est malheureusement encore plus abimée cette année, parce que la Ville de Québec ne l’entretient pas. Sa fille Annette l’avait pourtant conservée dans un parfait état jusqu’à ce que la Ville en fasse l’acquisition, en 1990.

La maison de l’oncle Émile c’est mon contact avec l’agriculture. J’y suis allé plusieurs fois, enfant, pour cueillir des légumes, faire les foins, flatter un cheval et quelques vaches. J’entends encore le ronron du tracteur sur le petit chemin qui menait au fond du champ.

À l’entrée, sur la gauche, là où il y avait déjà eu la boutique (un atelier, avec une forge — m’a rappelé mon père), il y avait une grande allée de groseilliers. On y pigeait des fruits, dont ma grand-mère faisait des confitures. C’est très profondément inscrit dans ma mémoire.

Sur la droite, il y a déjà eu un petit poulailler et un garage. Et sous la maison, le caveau à patates. Je me souviens aussi de l’odeur du foin et de la poussière qui dansait dans les rayons de lumière qui se faufilait à travers les murs de la grange.

Au bout de la rue Laberge, il y a les Lacs Laberge et ce qui et devenu la Base de plein air de Sainte-Foy. On dit que le premier des lacs a été creusé à la petite pelle pour en extraire le sable qui a servi à faire les fondations du premier bâtiment de l’hôpital Laval. Les chevaux montaient péniblement le sable par l’abrupte rue de la Suète (d’où son nom, m’avait-on dit… mais ce n’est pas la version retenue par le répertoire toponymique de la ville) jusqu’à la construction.

La rue de la Suète reliait alors le bas et le plateau de Sainte-Foy en traversant les terres où se trouvent aujourd’hui le Costco, le petit Ikéa et un garage municipal. Elle a été coupée pour prendre sa configuration actuelle quand le boulevard Charest a fait son apparition.

Ado, j’ai fait du vélo sur les vestiges de la rue de la Suète, dans les terrains vagues entre le boulevard du Versant-Nord et le boulevard Charest, bien avant la construction des grands commerces et de leurs stationnements. Certains jours le vieil asphalte nous servait de piste de décollage (en vélo, les bras ouverts, sans tenir le guidon) alors que d’autres jours c’était un espace de combat pour des chevaliers en BMX armés de quenouilles que nous ramassions dans les fossés de l’ancienne route. Bien mûres, bien sûr, pour qu’elles éclatent de façon spectaculaire une fois jetées à travers la roue de notre adversaire. Touché!

***

La rue Laberge est pleine d’histoire:

de précieuses histoires d’enfance pour moi, bien sûr;
mais aussi d’une partie importante de l’histoire de Sainte-Foy — et de Québec.

Et la maison de l’oncle Émile est toujours là pour en témoigner.

Je n’en reviens tout simplement pas qu’elle soit ainsi laissée quasiment à l’abandon.

C’est un bâtiment qui devrait être protégé et qui pourrait être mis en valeur à l’entrée de la Base de plein air pour permettre aux visiteurs de découvrir le mode de vie et l’ingéniosité des premières familles qui ont défriché Sainte-Foy.

Et pourquoi pas lui faire une place dans le Réseau des maisons du patrimoine de la ville de Québec?

***

J’ai repensé à tout ça, hier, en lisant ce texte de Valérie Gaudreau, dans Le Soleil:

La Base de plein air de Sainte-Foy a le coeur à la plage

On y apprend que le maire a finalement annoncé l’appel d’offres qui devrait initier les travaux de réaménagement de la Base de plein air. Un projet qui devrait s’échelonner sur plusieurs années.

Je croise les doigts pour que le projet soit aussi l’occasion de rénover la maison de l’oncle Émile… mais je reste prudent, parce qu’on en est pas à la première promesse d’investissement à la Base de plein air.

C’était une promesse du maire en 2009, qu’il avait renouvelée à quelques jours des élections en 2013 — ce qu’il fait à nouveau… à un an de la prochaine élection.

Quelques références:

Base de plein air de Sainte-Foy, une promesse électorale qui refait surface

Base de plein de Sainte-Foy: terrain de prédilection pour le sport extrême

Une base de plein air «extrême»

Projets revus pour la Base de plein air de Sainte-Foy

On s’en reparlera peut-être à la prochaine saison des groseilles…

De la radio plate?

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Le Soleil publie aujourd’hui quelques textes sur la rentrée radiophonique à Québec. Une rentrée qui pourrait être marquée par une surenchère de la controverse, nous dit Élisabeth Fleury, rapportant les propos de Claude Thibodeau, analyste en médias:

«La plupart des ténors de la radio de Québec sont pas mal à droite du spectre [politique]. Le discours va être homogène partout, et ceux qui vont vouloir se distinguer là-dedans vont devoir patiner plus vite et scorer plus fort. Ça pourrait donner lieu à une petite surenchère de la controverse et entraîner des dérapages, peut-être même des nouveaux litiges»

L’analyste poursuit en suggérant qu’il est un peu normal que les ondes soient généralement accaparées par la droite, parce que:

«…les gens à gauche ne veulent pas prendre de raccourcis intellectuels pour faire valoir leurs opinions, c’est antinomique avec leur façon de faire, donc ça [ferait] de la radio plate»

« [et] la nuance en radio, ce n’est pas payant»

Je comprends son raisonnement mais je trouve qu’il a pour effet de détourner notre attention d’une autre dimension du problème de la radio à Québec.

Je ne pense pas que les gens choisissent une station de radio en fonction de l’axe politique gauche-droite — et encore moins en fonction des nuances qui sont formulées (ou non) par les intervenants. Je crois que la majorité des gens cherchent d’abord et avant tout à être accompagné par des gens stimulants dont les propos font réagir.

Je pense que la radio de Québec a moins un problème «gauche-droite» qu’un problème de diversité dans les approches utilisées pour faire réagir les auditeurs. Aujourd’hui, presque toute les stations s’appuient sur la frustration et la colère pour susciter des réactions.

J’ose un lien avec avec un passage d’un texte récent du journaliste économique Gérald Fillion, qui me semble tout aussi pertinent pour les animateurs de radio que pour les politiciens:

«[les] travailleurs, en colère et déçus, ont l’impression de s’être fait avoir. Le problème, c’est que leur mécontentement est aujourd’hui récupéré par des politiciens prêts à tout pour gagner des votes. […] Ils attisent les passions, nourrissent la division, leur projet n’est plus celui de faire rêver, mais de faire enrager.»

Il existe pourtant bien d’autres leviers psychologiques que la colère pour susciter des réactions chez quelqu’un. On peut le surprendre, lui faire découvrir des choses étonnantes, le faire rêver, le pousser à l’action, etc.

Rien de tout cela n’implique de se précipiter dans les nuances, et encore moins d’être plus ou moins «à gauche». Il faut essentiellement choisir d’interpeler les auditeurs. Le piège n’est pas la droite, c’est l’indifférence.

C’est pour ça qu’il me semble évident que ce n’est pas en privilégiant la gauche, ou en misant sur les nuances, que Radio-Canada pourra profiter de la situation pour augmenter ses cotes d’écoute, comme le suggère Claude Thibodeau.

C’est en (re)devenant une radio qui fait, elle aussi, réagir ses auditeurs — de façon aussi vigoureuse, mais en faisant appel à d’autres types de sentiments, sans doute plus positifs.

Des discours plus constructifs

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J’ai publié près de 1600 textes sur ce blogue au cours des quatorze dernières années. Des textes qui sont devenus autant de traces de mes réflexions au cours de cette période.

De tous ces textes, il y en a un qui est particulièrement important à mes yeux. Il a été écrit il y a plus de dix ans et je m’y réfère encore périodiquement:

Ébauche d’un manifeste | 23 mai 2005

J’explorais dans ce texte les fondements d’une autre approche de la politique, déplorant notamment la polarisation des débats, le formatage abusif des discours en fonction des médias et l’utilisation des sondages pour manipuler l’opinion publique. Je proposais comme remède un voeu de proximité en dix points.

J’ai revisité ce texte en 2011, notamment pour y apporter quelques nuances, en fonction du contexte du moment (voir en particulier le troisième commentaire au bas du texte suivant):

Une nouvelle façon de faire de la politique?

Relisant tout cela à nouveau, au cours des derniers jours, ce sont les deux premiers points du voeu de proximité qui m’ont frappé le plus:

1. Toujours commenter le travail des autres élus de façon constructive;

2. Toujours expliquer ses décisions à l’aide de « parce que »;

Cela rejoint particulièrement la réflexion qui m’habite depuis quelques semaines, à laquelle j’avais notamment fait écho au début de l’été:

Une grande perplexité | 18 juillet 2016

Ces deux énoncés (commenter de façon constructive et expliquer avec un simple «parce que») décrivent en effet assez bien ce à quoi j’ai envie d’orienter progressivement le temps que je consacre à mon engagement social.

Je souhaite contribuer à faire émerger de nouvelles formes de discours, plus constructifs, qui s’appuieront sur des idées à la fois concrètes et inspirantes. Des discours qui seront motivés par la recherche de solutions plutôt que par une dynamique d’opposition. Des discours qui favoriseront la collaboration entre les gens au lieu d’alimenter la division. Des discours qui donnent le goût de s’engager plutôt que de nourrir le cynisme.

Pour cela, je réfléchis depuis quelques jours à mettre en place un site Web / média qui aura pour objectifs de rendre cette démarche concrète et de favoriser son ancrage dans la réalité économique, sociale et politique de la région de Québec.

VéloVoûte, une fausse bonne idée?

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La ville de Québec mène actuellement un projet pilote avec le VéloVoûte, un nouveau type de support à vélos. Si l’intention est bonne, je pense que le produit retenu passe à côté de l’essentiel: une intégration réussie dans la réalité urbaine.

Le Soleil parle du projet ce matin:

Des supports à vélos nouveau genre à Québec | Normand Provencher | Le Soleil

Le Journal de Québec en parlait hier:

Stationnement de luxe pour les vélos à Québec

Adapter la ville pour faciliter l’utilisation du vélo c’est évidemment important. Ça permet d’encourage la pratique de l’activité physique et de réduire le trafic automobile. Et parmi les enjeux associés, il y a évidemment les espaces de stationnement ou de rangement des vélos. Ils doivent être pratiques et sécuritaires.

Sauf qu’il faut aussi que les solutions retenues s’intègrent adéquatement dans la ville, de manière à favoriser la cohabitation entre tous les usagers de la route et des trottoirs.

Or, en voyant le caractère particulièrement massif et inesthétique de la VéloVoûte, je me suis dit que c’était un projet qui est inévitablement voué à l’échec. L’ingénierie du produit est sans doute ingénieuse, mais l’intégration dans la réalité urbaine d’une ville comme Québec me semble impossible. Surtout quand on pense à toutes les contraintes et les consultations qu’on s’impose dans le coeur historique pour tout ce qui concerne le mobilier urbain.

Tout cela, sans compter que le support a vélo qui est présenté sur les photos du Soleil et du Journal de Québec a été installé à même le trottoir devant la Gare du Palais (un endroit que je connais particulièrement bien) en obstruant carrément le passage des piétons. Une très mauvaise idée.

Je pense qu’au lieu d’investir dans des équipements lourds et coûteux comme celui-là (3000$ à 4000$, selon le Journal de Québec — pour 4 vélos!), on devrait plutôt miser sur la multiplication de supports à vélos peut-être un plus conventionnels, en misant sur leur originalité, et leur localisation dans des endroits judicieusement choisis de manière à dissuader les voleurs: lieux visibles, bien éclairés, surveillés ou filmés.

Pour cela, les photographies que Guillaume Lavoie, conseiller de ville à Montréal, a regroupées la semaine dernière me semble particulièrement inspirantes:

Album support à vélo + embellir la ville | page Facebook de Guillaume Lavoie

Des mesures incitatives pourraient aussi être mises en place pour amener les propriétaires d’immeubles, et les promoteurs, à intégrer de tels espaces dans leurs projets, à l’extérieur, comme à l’intérieur.

Qu’en pensent les grands utilisateurs de vélo qui me lisent?

Places publiques

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Beaux articles dans Le Soleil de ce matin (intégrés dans un seul texte dans la version Web):

Places publiques repensées pour l’hiver | Valérie Gaudreau | Le Soleil

L’apparition des places publiques éphémères est une des belles innovations des dernières années dans la région de Québec. Ces placettes se multiplient, prennent du caractère — et remportent chaque fois un très grand succès.

C’est aussi un remarquable exemple de planification du développement urbain qui s’appuie sur la mobilisation de la population. En effet, «souvent, ces aménagements transitoires servent aussi de test vers la construction d’une place publique permanente portée par les autorités municipales.»

Il ne s’agit évidemment pas de privilégier l’éphémère sur le permanent quand on parle de places publiques. Il reste essentiel de mettre en place des infrastructures durables. C’est la complémentarité qui fait le succès de cette approche.

C’est d’ailleurs en cela que repose tout l’intérêt d’explorer le potentiel d’éventuelles places publiques hivernales (une évidence dans une capitale nordique comme Québec!). En commençant par mettre en place un réseau de petites places éphémères on pourra tester beaucoup plus rapidement, et à bien meilleur coût, de nombreuses idées, variées, dans le but d’identifier les plus prometteuses.

Et pourquoi pas imaginer faire ça sous la forme d’un concours entre les différents arrondissements… qui pourrait culminer à l’occasion du Carnaval de Québec?

Journaux et café

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La lecture des journaux à l’ombre sur la terrasse ce matin avec un bon café, de petites prunes jaunes et un vent doux pour brasser l’air: un grand plaisir pour l’esprit comme pour les sens.

Plusieurs textes ont retenu mon attention pour poursuivre les réflexions des derniers jours, en particulier au sujet de l’agriculture et l’alimentation, de l’état de notre démocratie et du développement de la ville de Québec.

 

L’agriculture et l’alimentation

Plusieurs personnes m’ont écrit pour me suggérer des lectures complémentaires au texte que j’ai publié ici hier. Pour m’offrir de participer à la recherche et à la réflexion aussi. Merci!

Le Devoir contribue aussi avec plusieurs textes, dont celui-ci, dont je reprends quelques extraits, mais que j’aurais pu citer au long.

Produits maraîchers et grandes chaînes alimentaires | Philippe Mollé | Le Devoir

«Je n’ai rien contre le fait qu’on consomme des pêches, par ailleurs excellentes, de l’Ontario, ou certains produits hors saison provenant de la Colombie-Britannique. Par contre, en pleine saison de récolte de fruits et légumes d’ici, comme les bleuets, les framboises, les fraises, je proteste contre le fait que ceux-ci peinent à se rendre jusque dans nos épiceries. (…)

On parle de libre-échange à la grandeur de la planète, mais nous sommes incapables de vendre certains produits carnés ou alcools à nos voisins de l’Ontario. Il en est ainsi également de certains fromages, pour lesquels la porte est fermée.

La plupart des décisions d’achat proviennent de l’extérieur du Québec et comportent des tas de contraintes pour les petits artisans, comme des ristournes, des reprises, des livraisons garanties, etc. On ne favorise en rien le développement de l’agriculture locale de cette façon (…)

Mieux comprendre et participer au dialogue de la terre fait désormais partie de nos motivations. On veut savoir qui a cultivé nos fruits et légumes, d’où viennent la viande et la volaille que l’on mange, et surtout dans quelles conditions les bêtes ont été élevées.»

Aussi ces quatre textes de Caroline Montpetit, qui sont regroupés dans un remarquable double-page dans la version imprimée du journal:

La banque de terres: un terreau fertile pour pallier le vieillissement des agriculteurs

Objectif terre

De la broue et du brou

Des insectes et des hommes

Je signale, en complément, le remarquable site Web de la Banque de terres.

Banque de terres — des paysages aux paysans

 

L’état de notre démocratie

Contre tous les Trump, sus à la procrastination! | Fabrice Vil | Le Devoir

J’apporterais personnellement quelques nuances à certains des propos de l’auteur de ce texte d’opinion mais il reste, dans l’ensemble, assez juste — et important.

«Une éducation de qualité pour tous favorise le développement de la pensée critique nécessaire pour juger de la qualité d’un projet de société et mettre en question le bien-fondé des idées proposées par nos leaders. C’est cette éducation qui développe chez l’individu les habiletés non cognitives, dont l’empathie, qui évitent de céder à la tentation de la haine et de la peur de l’autre. C’est cette éducation qui incite à participer à la chose publique. En bref, c’est elle qui permet la véritable démocratie. (…)

Une Éducation avec un grand « E », dirais-je. Celle-ci requiert des choix difficiles et complexes qui impliquent notamment les établissements scolaires, bien sûr, mais qui appellent aussi à la contribution de l’ensemble de la société.»

 

Le complotiste | Jean-Marc Salvet | Le Soleil

«Les forts en gueule font souvent davantage leur place dans les médias que les forts en sens. Beaucoup des forts en sens restent malheureusement dans l’anonymat. Beaucoup des forts en gueule finissent heureusement par se pendre eux-mêmes avec des mots de trop. Mais ce n’est pas toujours le cas.»

Quel rôle pour les médias — et ceux qui les lisent/consultent/consomment dans cette dynamique où les coups de gueule font vendre bien plus que les nuances? Une réflexion essentielle pour la démocratie. Un enjeux important pour les prochaines années.

J’en profite pour souligner que j’apprécie particulièrement la plume de Jean-Marc Salvet dans son rôle d’éditorialiste.

 

Le développement de la ville de Québec

L’ancien Omer DeSerres dérange dans Saint-Roch | David Rémillard | Le Soleil

«…un bâtiment à moitié démoli (…) à l’angle des rues Caron et Sainte-Hélène. Outre le squattage qui s’y déroule et les odeurs d’humidité qui s’y rattachent, les voisins le trouvent surtout très laid et demandent à la Ville d’intervenir. (…)

À la Ville de Québec, un porte-parole a indiqué qu’il était impossible d’imposer la démolition du bâtiment. La réglementation se limiterait au clôturage.»

Je ne comprends pas qu’il ne soit pas possible d’exiger une démolition dans le cas comme celui-là. Et, à l’inverse, il semble que les sanctions associées à la démolition d’un immeuble sans autorisation préalables sont dérisoires. Cela contribuerait d’ailleurs à amplifier certains inconvénients liés à la densification de certains quartiers parce que des promoteurs achèteraient parfois des maisons pour les jeter par terre avant même d’avoir obtenu les permis pour reconstruire. À vérifier/documenter.

***

Je retiens en terminant une très belle citation de Bernice Jonhson Reagon, lue dans la conclusion d’un texte qui porte sur l’importance du logiciel libre.

Un autre monde numérique est possible | Boris Proulx | Le Devoir

«Si vous êtes trop à l’aise dans une coalition, c’est que ce n’est pas une coalition assez large !»

Je trouve que ça résume remarquablement bien ce qu’on semble avoir de plus en plus de difficulté à faire au Québec — et qui est pourtant tellement déterminant pour accomplir de grands desseins!

Culture et alimentation

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Dans une discussion avec des amis hier après-midi, nous évoquions les plaisirs de l’alimentation, leur grande importance culturelle — et les nombreux enjeux économiques et écologiques qui accompagnent la transformation de cette industrie absolument essentielle. Tout ça autour d’un très bon repas, simple et savoureux.

Nous avons évidemment besoin d’infrastructures logistiques complexes pour approvisionner les villes et villages du Québec en fruits, légumes, viandes et autres aliments toute l’année. Mais il y a aussi un grand intérêt à faire coexister des circuits plus courts et plus directs entre les producteurs et les consommateurs. Il ne s’agit pas d’opposer les deux systèmes: nous avons de plus en plus besoin de l’un et de l’autre.

Nous avons fait référence à l’exposition Manger ensemble, au Musée de la civilisation (à laquelle Ana-Laura a largement contribué) et à la partie du film Demain qui est consacrée à l’alimentation. Nous avons évoqué plusieurs initiatives québécoises qui vont dans le même sens. Je suis reparti en me disant qu’il faudrait regrouper l’information existante sur tout ça — ou trouver où elle pourrait déjà avoir été regroupée.

Nous avons aussi évoqué le projet de développement immobilier sur les terres agricoles des Soeurs de la Charité de Québec. Un projet qui, au regard de cette discussion, apparaît tout à fait anachronique. Avoir la chance de disposer, encore aujourd’hui, des terres agricoles de cette qualité à proximité du centre-ville et penser les transformer en quartier résidentiel, c’est complètement fou.

C’est fou, mais ça s’explique pourtant très bien. Et ce ne sont pas les acteurs qui sont surtout en cause. C’est la logique qui guide tout le développement urbain au Québec qui amène presque inévitablement l’émergence de tels projets. Parce que les villes sont forcées de construire, parce que la fiscalité est quasiment leur seule source de revenus (une logique qu’il est urgent de revoir) et parce qu’on ne valorise pas à sa juste valeur l’existence de ces circuits agroalimentaires courts, qui ont pourtant une grande valeur économique.

Alors, forcément, en survalorisant la construction et l’augmentation de la valeur de la taxe foncière et en sous-valorisant les activités alternatives, on en arrive à des situations comme celle-là, où tout le monde se renvoie la balle au lieu de chercher des solutions innovatrices pour répondre aux besoins d’une ville moderne.

Il me semble que ces terres méritent mieux qu’une bataille de tranchées. Je trouve qu’il ne s’agit pas tant de protéger ces terres, mais de trouver rapidement une manière de les mettre en valeur, pour en faire une richesse (à tout point de vue, y compris économique) pour la région de Québec.

On devrait profiter de l’occasion pour faire une grande réflexion collective et imaginer un vaste projet innovateur — auquel des entrepreneurs et tous les paliers de gouvernement pourraient apporter leur concours (et pas que par de l’argent, mais peut-être surtout en facilitant des projets-pilotes et en assouplissant l’application de certains règlements, par exemple). Ce projet pourrait servir d’exemple à d’autres régions, ici et ailleurs. Un projet dont Québec pourrait s’enorgueillir. Un projet qui démontrerait aussi qu’en 2016, être une ville intelligente, ce n’est pas seulement être plus technologique, c’est aussi accorder de l’importance à la l’agriculture et à l’alimentation.

Ce n’est probablement ni en s’opposant systématiquement à tout développement résidentiel, ni en plaidant son absolue nécessité qu’on arrivera à ouvrir la voie à un projet aussi ambitieux.

C’est peut-être surtout en prenant le temps d’un grand remue-méninges. En rêvant un peu. Le plus concrètement possible. Peut-être y a-t-il déjà des gens engagés dans cette voie?

Imaginer, par exemple, un aménagement qui fournirait non seulement les marchés public de la ville ainsi qu’un réseau de livraison d’aliments frais à domicile, et qui permettrait aussi de recevoir adéquatement les enfants des écoles de la région pour qu’ils aient tous l’occasion, au cours de leur scolarité, de vivre quelques jours à la ferme, au contact de la terre et des animaux qui nous nourissent? Avec, pourquoi pas, une certaine place pour du développement résidentiel bien intégré dans le projet?

Je vais poursuivre mes recherches et ma réflexion.

Mise à jour: Yannick Roy suggère le visionnement de cette vidéo pour alimenter la réflexion (et je ne peux qu’être d’accord! Il est FANTASTIQUE!): Home Grown, moving next to the farm

La bibliothèque de mon enfance

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On savait depuis longtemps que l’ancienne bibliothèque Monique-Corriveau serait détruite parce qu’elle a été remplacée par une vraie merveille il y a un peu plus de deux ans.

Reste que de voir la bibliothèque de mon enfance réduite à un amoncellement de gravier et de tiges de fer tordues, c’est impressionnant.

Je suis allé prendre quelques photos un peu plus tôt ce matin, pour rendre hommage au lieu et à tous les souvenirs qui y sont rattachés.

J’ai regroupé une vingtaine de photos sur Flickr. C’est ici.

La banlieue qu’on aime (ou pas)

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« Je suis descendu du train à la gare de Sainte-Foy, me sentant décalé, en marge du monde qui se présentait devant moi. Imaginez le narrateur d’un roman de Modiano, mais en banlieue de Québec plutôt qu’au coeur de Paris. »

Le texte de David Desjardins dans Le Devoir de ce matin me parle tout particulièrement.

Parce que je monte et descends du train à cette abominable gare de Sainte-Foy presque toutes les semaines. Parce que j’ai eu la chance, moi aussi, de redécouvrir mon quartier perdu et ma banlieue après près de trois ans passés dans une grande ville. Parce que je l’ai marchée de long en large cette banlieue comme candidat à l’élection du 7 avril et que j’ai parlé à des milliers de personnes qui y vivent — et pas qu’à mes voisins. Parce que j’aime beaucoup Modiano, aussi!

Je ne peux pas faire autrement qu’être d’accord avec David Desjardins quand il dit:

« Mais aussi parce que d’avoir grandi, presque nous tous, dans ces communautés évasées, excentrées, ne peut faire autrement que d’avoir modifié notre rapport aux autres, à la société. Seuls, côte à côte.»

« On joue au solitaire tout le monde en même temps », résume Louis-Jean Cormier dans une chanson que j’adore. J’entends aussi les échos de The Suburbs, d’Arcade Fire.

« La banlieue, c’est le coeur battant, le sujet et le décor du bien nommé The Suburbs, troisième disque de la formation montréalaise acclamée à travers le monde depuis la parution de leur premier album, Funeral, en 2004.

« Au premier regard, la thématique peut surprendre pour un groupe indie-rock dans le vent, urbain, jeune et cool. […] The Suburbs est pavé de l’affrontement entre les souvenirs d’une époque passée et les soucis d’adultes d’aujourd’hui.

« C’est sûr que dans la vie de tous les jours, les banlieues, c’est pas toujours excitant, explique au Devoir Régine Chassagne, qui a grandi à Saint-Lambert et à Longueuil. Mais il y a quand même des drames, des histoires d’amour, des questionnements, plein de trucs vraiment profonds qui peuvent se dérouler dans un stationnement, dans un endroit vraiment banal. Je trouve ça intéressant de trouver de grandes choses dans de petites choses. »»

SourceEnfants de la banlieue, adultes de la ville, Le Devoir, 31 juillet 2010.

Mais je ne suis pas certain de partager la suite du raisonnement David Desjardins — ou d’avoir envie de le suivre sur cette voie.

« …le Cap-Rouge de mon enfance n’a plus grand-chose à voir avec celui d’aujourd’hui : bâti mur à mur, entouré de tours à condos, les contours du lac ont troqué le verger contre les châteaux de pierre.

Pour retrouver la même chose, la même idée de banlieue comme projet aux frontières un peu floues, il faut aller plus loin. Neuville, Sainte-Brigitte, Château-Richer, Lotbinière. La banlieue recule, encore et encore.»

Desjardins va même beaucoup plus loin:

« La banlieue […] incarne un idéal, une pensée. Quelque chose comme un art de vivre, dont le sens s’est par ailleurs perdu. […] La banlieue est notre course terrible pour oublier que le temps passe et nous aussi.»

Je sais bien que le rêve de la banlieue persiste, évidemment, et qu’il amènent ceux qui le portent à vivre toujours plus loin des centres-villes. Mais je n’ai pas envie de juger le(s) rêve(s) de ceux qui font ce choix.

Ce qui m’intéresse bien plus, c’est de comprendre comment se transforme le(s) rêve(s) de ceux qui voient la banlieue les quitter et qui sont forcés de s’adapter — confrontés à un exil immobile.

Je suis fasciné par la banlieue-qui-ne-l’est-plus (ou qui l’est de moins en moins). J’y vis et j’y assume mes contradictions et mes paradoxes à l’égard de la ville, mais je ne suis pas sûr de bien comprendre la portée collective de ces changements. C’est pourtant un défi politique essentiel — sur lequel le parti dans lequel je milite se casse les dents depuis de nombreuses années…

Je lirai avec grand intérêt les prochains textes de la série annoncée par David Desjardins — et je me plongerai en parallèle dans la lecture de la Revue Liberté, dont numéro 301 était entièrement consacré à la banlieue: Tous banlieusards — l’hégémonie d’un idéal urbain.

 

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Cailloux récupérés sur une plage de l’Île-du-Prince-Édouard, été 2004

Parce que le bon espace pour archiver mes réflexions c’est mon blogue, je reproduis ici ce que j’ai publié un peu plus tôt ce matin sur Facebook:

—/ début /—

J’ai lancé l’idée de faire de Québec une « cité éducative » quelque part au printemps 2002 — j’en ai les traces sur mon blogue depuis septembre 2002.

En janvier 2004 (il y a déjà dix ans!), la Chambre de commerce et d’industrie de Québec adoptait pour thème de son Forum économique annuel: « Québec, Cité éducative ».

L’idée a fait son chemin dans l’esprit de beaucoup de monde au cours des dernières années… pas toujours comme prévu, sous des formes très diverses, et de façon parfois moins explicite… mais j’en ai des manifestations presque toutes les semaines. Et c’est une idée qui continue de me guider tous les jours.

Ça va bientôt être le temps d’une nouvelle synthèse/reformulation de tout ça, je pense bien.

—/ fin /—

Le courage du développement économique

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Note: ce texte a initialement été publié dans Le Soleil du 2 décembre 2013. Je le reprends ici parce qu’il semble avoir passé son tour pour une publication dans la section Points de vue, sur le site du quotidien.

* * *

L’Institut de la statistique du Québec a publié il y a quelques jours la mise à jour de son étude sur le produit intérieur brut régional par industrie au Québec. Les résultats nous rappellent que malgré la fierté retrouvée, à laquelle on fait régulièrement référence depuis les Fêtes du 400e, la région de la Capitale nationale tire toujours de la patte en ce qui concerne la croissance du PIB.

L’analyse de l’Institut de la statistique nous apprend en effet que la croissance économique de la Capitale nationale se chiffrait à 3,2% en 2011 « ce qui constitue un taux nettement moins élevé que celui de l’ensemble du Québec (+ 4,4 %) ». On peut donc clairement faire mieux.

En regardant d’un peu plus près les données de l’Institut de la statistique, on constate que l’économie régionale est évidemment dominée par les services (82,4%), mais que seulement un cinquième de cela dépend des administrations publiques, soit à peine plus que le secteur des assurances et des services immobiliers. On ne le répétera donc jamais assez, il faut définitivement sortir du cliché Québec-ville-de-fonctionnaires. C’est une image de plus en plus trompeuse.

Le rapport de l’Institut de la statistique du Québec n’explique pas ce qui cause le retard économique de la Capitale, mais je me permets une hypothèse, avec un regard d’entrepreneur. Je pense que nous avons trop souvent l’impression, ici, que le développement économique ne dépend pas de nos propres actions, qu’il se fait malgré nous parce qu’il repose sur des décisions gouvernementales; voire, qu’il se fait carrément à notre insu. L’apparition du silo de l’Anse au Foulon en quelques heures, sans consultation, vient malheureusement renforcer cette perception — et c’est peut-être en cela qu’il est le plus dommageable, d’ailleurs, parce que le véritable développement économique ne peut pas se faire en catimini.

Le développement économique ça se fait avec courage, par des citoyens qui se retroussent les manches, une décision à la fois, un geste après l’autre, en cultivant tous les jours une attitude entrepreneuriale. Ça se fait par des gens qui croient qu’on peut avoir une influence sur notre environnement, qu’on peut changer les choses, inventer, innover. C’est une attitude qui caractérise fortement l’industrie de l’information et l’industrie culturelle depuis quelques années et ce n’est pas un hasard si c’est le regroupement sectoriel qui performe le mieux dans la région avec une croissance de 8,7%.

C’est cette confiance qu’il faut trouver moyen d’insuffler à d’autres secteurs économiques si nous voulons réussir encore mieux. Il faut donner à plus de monde le goût d’entreprendre. Et pour ça, il ne faut pas que de beaux discours et des claques dans le dos une fois de temps en temps. Le développement économique ne peut pas consister à dire aux entrepreneurs quoi faire, ou comment le faire. Pour les aider à réussir, il faut les appuyer lorsqu’ils prennent des initiatives — et de la façon la plus personnalisée possible. Il me semble qu’il faudrait pour cela que les organismes de développement économique aient eux-mêmes une attitude plus entrepreneuriale. On a vraiment beaucoup de chemin à faire dans cette direction là… la Fédération canadienne des entreprises indépendantes nous l’a d’ailleurs rappelé il y a quelques semaines en classant notre ville au 100e rang, sur 107, dans son classement des villes entrepreneuriales au Canada.

J’espère que les membres des trois comités de travail qu’a mis en place la ministre Agnès Maltais pour élaborer une vision du développement de la région pour les années à venir pourront se pencher attentivement sur cette question. Cela me semble indispensable si on souhaite que la richesse de la Capitale nationale croisse aussi rapidement que celle des villes les plus dynamiques en Amérique.