Ce qui change, jour après jour, ce sont les pratiques

Au tour de Constance Krebs de lancer l’année avec un texte remarquable, constitué d’une série de réflexions, très pertinentes il me semble, sur le monde du livre — celui des auteurs, des éditeurs et des libraires.  Extraits:

An neuf… Pour de nouvelles formes de publication, d’édition devrais-je dire. On l’espère… Ce qui change, jour après jour, ce sont les pratiques. Les modes de travail, la façon.

L’éditeur ne se contente plus de lire et relire pour éditer et rendre public; il écrit, il lie et relie. Le libraire ne se contente plus de lire et de recevoir pour vendre; il écrit, il relie. L’auteur ne se contente plus de travailler en silence, seul à sa table; il montre son atelier, ses recherches en cours. Cela n’empêche ni la rigueur, ni la vitalité, ni le commerce, ni l’échange de dons – bien au contraire. (…)

L’amateur renaît grâce à l’hypertechnologie. Le capitalisme fissuré qui, sous la forme qu’on lui connaît, s’écroule, peut désormais évoluer vers une dimension plus libre, plus humaine. Le monde change, et c’est tant mieux. (…)

L’éditeur pour entrer dans cette dimension-là doit se mettre à écrire régulièrement. (…)

L’auteur, qu’il soit artiste ou chercheur (métiers très proches), peut faire entrer le monde dans son atelier, son laboratoire, son bureau. Il est seul, mais plus comme avant. Il partage enfin ses connaissances, ses idées, ses textes avec d’autres, qu’ils soient pairs ou amis, admirateurs ou lecteurs. (…)

Le libraire doit aujourd’hui faire connaître sa librairie sur les sites de localisation, les géoportails de Google ou de l’IGN s’il veut que le client vienne à lui. Rien ne l’empêche non plus de passer 20 mn par jour à animer un blog. (…)

Bonne année!

Ne manque que le lecteur dans ce portrait… parce que si les modes de travail évoluent, les modes de lecture aussi, probablement… Peut-être Constance aura-t-elle le goût de compléter?

Une fable sur le cinéma, le bricolage et l’esprit Web

bekindrewind

Sur Twitter, ce matin, quelques caractères de Jose Afonso Furtado, au sujet de ce texte, m’ont rappelé que j’avais acheté le DVD de Be Kind Rewind il y a quelques mois et que je ne l’avais toujours pas regardé.

J’avais découvert l’existence de ce film en lisant une entrevue avec son réalisateur, Michel Gondry, dans Le Monde, le printemps dernier. Une entrevue qui m’avait renversé par la façon dont elle rendait compte de ce qui me semble être au cœur de l’esprit Web — de toute la créativité qu’il libère, et du nouveau rapport à la culture qui l’accompagne.

* * *

Je viens de terminer le visionnement du film et n’ai pas été déçu! L’histoire est originale, drôle, touchante — et source de réflexion. C’est une fable moderne très habilement tournée.

Au moment d’aller me coucher, il me reste en tête une question, celle du titre du texte vers lequel Jose Afonso Furtado m’a redirigé ce matin: What is The Bookstore Equivalent for “Be Kind, Rewind”?

La journée se termine presque comme elle a commencé. Be kind…

Mise à jour (après une nuit de sommeil…): Je réalise que la journée d’hier a vraiment été sous le thème de la production amateure, parce qu’en même temps que Twitter me pistait sur Be Kind Rewind, René Audet laissait ici un commentaire en rapport, lui aussi, avec le thème des user generated content (UGC): Les chats, les marmottes et les fins de la participation, par André Gunthert. Extraits:

« Qu’est-ce que l’UGC? Disons pour simplifier (…) que cette expression désigne les photos et les vidéos que vous et moi envoyons sur Flickr ou sur Youtube (…) les UGC n’ont pas la qualité des productions professionnelles. Etonnant, non? dirait Desproges. Et si la finalité d’une photo sur Flickr n’était pas de faire la une de CNN? Et si les contenus partagés servaient à autre chose que de supplétifs à la construction du spectacle? (…)

J’ai infiniment plus de respect pour l’inventivité et le talent que révèlent un bricolage réalisé en quelques heures avec les moyens du bord, comme « Amateur » de Lasse Gjertsen, que pour n’importe quel blockbuster standardisé. (…)

Alors, les User generated content ne sont-ils qu’un ersatz pour une industrie culturelle en crise? Tu comprends que je pense que ce n’est pas, de loin, l’aspect le plus important de ces contenus. Et que je ne crois pas du tout que le web 2.0 se dégonfle. La participation a ses propres fins, qui ne sont pas celles que lui assignent les entrepreneurs ou les traders. »