En cette période où la tradition veut qu’on porte un regard rétrospectif sur l’année qui se termine, je me suis demandé lequel des milliers de textes que m’a rapporté mon agrégateur cette année avait le plus marqué mon imagination en ce qui concerne l’avenir du Web — et par voix de conséquence, celui de la société dans laquelle nous vivons.
Il y en a évidemment plusieurs… mais celui qui me reste le plus durablement ancré dans les neurones, celui qui me tarabuste depuis près de deux mois, c’est Is YouTube the Next Google? Et, complémentairement, celui que Internet Actu a publié sur le même sujet quelques jours plus tard: Quand YouTube remplacera Google.
« During one of the conference breaks (…) he mentioned that his son accesses the web through YouTube (…) Whenever [he] needed any information, he would open up YouTube, type in the search term and then just watch the videos that showed up as matches. He never Googled anything; he never went to any other site; his entire web experience was confined to YouTube videos. »
Je n’avais n’avais d’abord que survolé ce texte, le jugeant un peu farfelu. Mais depuis, je constate que mes enfants aussi accèdent spontanément au Web par YouTube — avec une efficacité étonnante. Pas sur tout les sujets, bien sûr, mais avec une efficacité sûrement équivalente à celle que nous offrait les meilleurs moteurs de recherche il y a une d’années.
Qu’est-ce à dire? Qu’est-ce que cela signifie d’un point de vue éducatif et culturel? Est-il possible d’accèder à la connaissance pratiquement sans savoir écrire, uniquement par l’image? Quelles conséquences sur la construction de l’esprit humain, et sur son fonctionnement? Cela me semble extraordinaire. Cela me semble périlleux. Je ne sais trop qu’en penser.
Cela me rappelle un autre texte qui m’avait beaucoup marqué, lu en 1993 alors que j’étudiais au baccalauréat en enseignement au secondaire. C’était dans le deuxième numéro de Wired, sous la plume de Seymour Papert: Obsolete Skill Set: The 3 Rs.
« In my forthcoming book, The Children’s Machine: Rethinking School in the Age of the Computer, I use as a thematic image an encounter with a four- year-old girl who heard that I grew up in Africa and asked if I knew how giraffes sleep. I did not. But the ensuing conversation led me to pursue the question when I got home. Reference books were scattered all over my floor as I jumped from one to another in an exciting exploration of the giraffe’s world. As I enjoyed the chase I pondered the unfairness of being able to get all this fun out of the girl’s question – why couldn’t she do what I was doing?
Not long ago the answer would have been obvious: She can’t read. But today, there is no technical obstacle to creating a « Knowledge Machine » that would allow a girl of four to navigate through a virtual knowledge space where she could see for herself how giraffes live. It will take time for the vast quantities of information available in print to be recast for such a machine. But it will happen; and when it does, the Knowledge Machine (a metaphor for much more varied forms of media) will provide easier access to richer and fuller bodies of knowledge than can be offered by any printed encyclopedia.
Admitting the prospect of Knowledge Machines does not imply that people will no longer need to read. But reading will no longer be the unique primary access road to knowledge and learning, and it should therefore no longer be the dominant consideration in the design of School. »
Ce texte m’avait évidemment amené à lire The Children’s Machine: Rethinking School in the Age of the Computer. Il est vraisemblablement temps de le poser à nouveau sur ma table de chevet.
Bel exercice… on a souvent la mémoire trop courte dans nos lectures sur le web. Spontanément m’est revenu cet article (rien à voir avec la prestigieuse date de publication…), pas nécessairement révolutionnaire, mais où la dynamique des 23 commentaires m’a paru être un bon représentant de ce que génère le web : http://www.arhv.lhivic.org/index.php/2008/07/29/774-les-chats-les-marmottes-et-les-fins-de-la-participation
Intéressant aussi parce que la question des champs (à la Bourdieu) est posée franchement par rapport aux contenus « populaires » sur le web, où revient la question de la valeur en art et culture, évidemment expulsée (mais pas complètement, pour sûr, dans nos sociétés contemporaines).
Idem pour l’article de Marin, évidemment, qui est littéralement une conversation : http://blog.homo-numericus.net/spip.php?article168
En relisant le texte suivant de Virginie:
http://www.archicampus.net/wordpress/?p=322
Je réalise qu’il y a aussi un très bon texte au sujet de YouTube, Google et de l’image comme accès à la culture sur The Digitalist. Ici:
http://thedigitalist.net/?p=381
Pour référence ultérieure.
Pour référence ultérieure, un article du NY Times sur le sujet:
At First, Funny Videos. Now, a Reference Tool