Il devient de plus en plus évident que la rentrée scolaire ne se fera pas normalement en septembre prochain.
Les écoles de Montréal vont rester fermées d’ici-là et partout ailleurs les classes ne sont qu’à moitié pleines. Les sources d’inquiétudes se multiplient — particulièrement pour les enfants qui éprouvent des difficultés d’apprentissage, mais aussi pour la motivation de tous les enfants (et plus encore celle des ados).
Le ministre de l’Éducation dit que plusieurs scénarios sont à l’étude pour la rentrée, dont celui d’une école « en alternance »: présence des élèves par demi-journées ou en journées alternées et le reste du temps en mode « à distance ». Il s’agit d’un défi logistique colossal et un défi éducatif encore plus grand.
Or, j’ai la vive impression qu’on n’accorde pas à ce défi toute l’importance qu’il requiert. Pendant que la catastrophe qui se vit dans les CHSLD draine l’essentiel de l’attention médiatique, on gaspille de précieuses journées pour faire face à ce qui est probablement le plus grand défi éducatif auquel on fait face depuis la Révolution tranquille.
Si les élèves sont en alternance en classe, ça veut dire que les profs y seront en permanence. On ne pourra donc pas compter sur eux pour assurer l’accompagnement pour les périodes que les enfants passeront chez-eux. Comment faire alors? Quel matériel et quel accompagnement pourra alors leur être offert? Et ce matériel aura été préparé par qui? À quel moment? Avec quels budgets?
Je propose que le ministère identifie immédiatement vingt profs, parmi les meilleurs, pour chaque matières et chaque niveau scolaire (ça fait disons, combien? 1000 profs à peu près?) et disons 200 profs pionniers dans l’utilisation des ressources éducatives numériques et qu’il en fasse sa SWAT team pour la rentrée.
Cette escouade devrait se mettre au travail dès maintenant et disposer de toutes les ressources dont elle a besoin. Toutes! Il faut que tous les obstacles administratifs et techniques aux solutions qu’elle va proposer soient levés rapidement. Il faut que ça marche en septembre. Coûte que coûte.
Il faut qu’on produise sans tarder des MasterClass pour chaque matière et chaque niveau, avec tout le matériel d’accompagnement et les espaces de collaboration associés. Il faut que les profs qui seront en classe sachent qu’ils peuvent tirer profit de l’existence de ces formations et se concentrer sur l’accompagnement qui peut difficilement se faire à travers l’écran.
Il le faut, parce que les élèves ont droit à un accompagnement pédagogique à temps plein, même si la présence en classe est à mi-temps. Et qu’on sait que les moyens existent pour que ça soit possible.
Il faut immédiatement hisser la prochaine rentrée scolaire au rang de priorité nationale. Nous avons trois mois pour transformer notre système scolaire en profondeur. Il faut faire en sorte que cette corvée estivale occupe dans notre histoire une place comparable à la conquête de la lune pour les États-Unis.
Pour éviter d’avoir, en septembre, un suivi quotidien des déboires de l’école, on doit avoir dès maintenant un suivi quotidien des préparatifs de la prochaine rentrée. Le ministre doit expliquer le plan de match, la stratégie, les objectifs, identifier les obstacles et rendre compte des progrès. Il faut rendre ça motivant pour tout le monde! Ça peut même devenir une source de fierté et de confiance.
Si on n’est pas prêt à faire ça, c’est probablement parce qu’on n’a collectivement pas encore pris la mesure de la situation et qu’on n’est pas encore dans un état d’esprit qui nous permettra d’être à la hauteur.
On n’est pas forcés de passer par une catastrophe pour repenser nos institutions… il s’agit de s’y mettre à temps!
Pour l’école, je pense que ce moment est venu. Même que ça presse…
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