De la persévérance scolaire à Québec Horizon Culture

Au moment de planifier la semaine, encore très chargée, qui s’amorce — et un peu plus loin, le mois de février qui se pointe déjà le bout du nez — je prends quelques instants pour réfléchir au sujet de deux événements auxquels j’ai choisi de faire une place dans mon agenda — l’un porte sur la persévérance et la réussite scolaire, l’autre sur le développement de la ville de Québec grâce à la culture.

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Il y aura d’abord, ce mercredi, une journée de concertation sur la persévérance scolaire dans la région de Québec — un événement très important auquel devraient participer près de 300 personnes, et dans lequel je reconnais une philosophie très proche de l’idée de cité éducative :

La nécessité de tenir un tel événement trouve sa source dans les deux constats suivants :

  • les défis associés à la persévérance et la réussite scolaires sont complexes et ne pourront pas être résolus sans un effort concerté de tous les acteurs régionaux;
  • le développement social et économique de la région de la Capitale-Nationale dépendra de la présence d’une relève compétente, éduquée et dotée d’une forte capacité d’innovation. (…)

Près de 300 personnes provenant de commissions scolaires, d’entreprises privées (particulièrement en science et technologie), de cégeps, d’universités, de centres de recherche, d’organismes communautaires, d’organismes de développement régional, etc. Une trentaine d’élèves du secondaire et du collégial participeront également à la journée.

(source: perseverancecapitale.ning.com)

La formule retenue pour l’événement est très ouverte, le site Web contient beaucoup d’information et pourrait servir d’embryon à un réseau qui pourra durer bien au-delà de la journée de mercredi. J’apprécie que l’accent a moins été mis sur la communication — en terme de relations publiques — que sur « la conversation, le partage, l’apprentissage et la mise à profit de l’intelligence collective des gens qui y seront réunit ».  L’animation de la journée, dont au moins une partie a été confiée à mes amis Philippe Dancause et Jean-Sébastien Bouchard, chez Grisvert, devrait aussi être particulièrement stimulante. J’ai vraiment très hâte de vivre cela.

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Cela contraste un peu avec Québec Horizon Culture — auquel je participerai aussi, le 16 février, et qui réunira probablement autant de monde. Dans ce cas, on sent une volonté d’encadrement beaucoup plus forte, tant en ce qui concerne l’organisation que la communication. Ce n’est certes pas un problème en tant que tel — mais c’est néanmoins ce qui m’a amené à lancer un appel à ceux et celles qui s’intéressent à l’avenir de la Capitale nationale du Québec, et à la place que la culture peut/doit prendre dans son développement, afin qu’ils commencent à s’exprimer dès maintenant, sur le Web — en préparation de l’événement.

Je crois qu’il est indispensable que des messages moins institutionnalisés se fassent entendre en prévision de l’événement — parce que Québec demeure une ville où la culture est encore, trop souvent, une affaire d’institutions (je le perçois comme cela, en tout cas).

Je souhaiterais personnellement que des appels très clairs se fassent entendre dans les trois prochaines semaines — et lors de l’événement — en faveur de l’entrepreneuriat culturel, sous toutes ses formes et pour des projets de toutes tailles.

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Ce n’est toutefois pas les différences entre ces deux événements qui motivent la rédaction de mon texte de ce soir. Ce sont plutôt les similitudes que je perçois entre les deux événements, mais pour lesquels je déplore de ne trouver aucune référence.

En consultant la documentation relative à chacun des événements, et leurs sites Web respectifs, on pourrait croire qu’aucun lien n’existe entre eux. C’est probablement vrai en terme d’organisation, mais il me semble évident que plusieurs des thèmes abordés sont très proches — ou très interdépendants.

Dans un cas, on cherche des moyens de garder les jeunes accrochés à l’école — et plus largement à la société en générale.

Dans l’autre, on tente de mettre en place des conditions qui stimuleront la participation des jeunes à la vie culturelle de la région de Québec.

Dans un cas on tente de trouver des moyens pour intéresser les jeunes à l’école en donnant du sens aux activités d’apprentissage, notamment en les inscrivant plus étroitement dans la vie de la Cité.

Dans l’autre, on cherche à développer les publics pour le monde culturel — en particulier chez les jeunes, et notamment en faisant appel à l’école.

Dans un cas, on compte sur un milieu culturellement riche — intellectuellement stimulant — pour donner envie aux jeunes de rester à l’école, à Québec et, plus largement, de s’intégrer harmonieusement dans la société.

Dans l’autre on cherche à développer à Québec un environnement culturel qui sera de nature à donner envie aux jeunes de faire leur vie à Québec et d’y vivre leur créativité, quelle qu’en soit la forme.

Dans un cas on cherche à valoriser les sciences et les technologies à l’école, notamment en les présentant sous de nouveaux visages.

Dans l’autre on cherche à rapprocher le monde de la culture et celui des sciences et technologies pour stimuler l’innovation et le développement économique.

J’arrête là l’énumération, conscient de résumer de façon sans doute un peu simpliste les enjeux identifiés pour chaque événement. Je ne crois toutefois pas trahir l’esprit qui anime les organisateurs, dans un cas comme dans l’autre.

De ce point de vue, il me semble qu’il serait souhaitable que certaines des personnes qui seront présentent mercredi soient invitées à témoigner de ce qui se sera dit lors de cette journée de concertation lors de Québec Horizon Culture — pour qu’on ne perde pas de vue que le milieu de la culture et celui de l’éducation sont interdépendants; et qu’ils se partagent de nombreux acteurs.

Il me semble que ce serait bien que les pouvoirs publics, qui rendent possible les deux événements, s’assurent de les inscrire dans une forme de continuité; qu’ils invitent explicitement les acteurs naturels de chacun à mettre l’épaule à la roue pour relever les défis abordés dans l’autre événement. Les commissions scolaires, par exemple, devraient être interpellées dans le cadre de Québec Horizon Culture. Et, de la même façon, il faudrait suggérer aux organismes et aux institutions qui seront présentes le 16 février de joindre leurs efforts à ceux des signataires de l’entente spécifique pour la persévérance et la réussite scolaires et les cheminements en science et en technologie dans la région de la Capitale-Nationale.

Il faut, pour assurer le développement de notre ville, briser les silos qui nous font aborder les différents axes de notre développement de façon distincte. Il faut miser sur la rencontre des idées. Nous avons avec ces deux événements une occasion en or de le faire — en évitant le piège de trop segmenter éducation et culture.

Je rêve que les politiciens qui s’exprimeront la semaine prochaine, et à la mi-février, fassent preuve d’ouverture et d’audace en rapprochant explicitement les deux événements.

J’aimerais applaudir après les avoir entendus dire qu’on ne peut pas souhaiter améliorer la persévérance et la réussite scolaire sans parler de la place de la culture dans la ville; et qu’on ne peut pas réfléchir à l’avenir de la ville, et à son développement économique, sans se demander comment les institutions et les entreprises culturelles peuvent encore davantage appuyer l’école dans sa mission d’éducation et de socialisation.

Professionnels sans frontières, l’éducation, les rêves…

J’avais fait référence il y a déjà presque deux ans à Stéphan et Julie — et aux invraisemblables conditions médicales de l’hôpital de Dungu.

Je découvre ce soir que le premier épisode de Professionnels sans frontières leur sera consacré — et je suis ravi de vous les présenter à travers les deux extraits que nous offre le site:

« Professionnels sans frontières est une série documentaire qui va à la rencontre de coopérants canadiens, engagés dans les grandes histoires de développement humain et environnemental de notre siècle. Des hommes et des femmes, dispersés aux quatre coins du globe, qui ont décidé de mettre leurs compétences professionnelles au service des plus démunis. »

Pour faire la connaissance de Stéphan, il faut visionner l’extrait 1 du premier épisode.
Pour faire la de connaissance Julie, il faut visionner l’extrait 2 du premier épisode.

Les éducateurs et pédagogues devraient particulièrement s’obliger à écouter les propos de Stéphan jusqu’à la fin.

Stéphan, Julie, vous avez toute mon admiration. Merci! Et bon courage.

L’image comme porte d’accès à la connaissance

En cette période où la tradition veut qu’on porte un regard rétrospectif sur l’année qui se termine, je me suis demandé lequel des milliers de textes que m’a rapporté mon agrégateur cette année avait le plus marqué mon imagination en ce qui concerne l’avenir du Web — et par voix de conséquence, celui de la société dans laquelle nous vivons.

Il y en a évidemment plusieurs… mais celui qui me reste le plus durablement ancré dans les neurones, celui qui me tarabuste depuis près de deux mois, c’est Is YouTube the Next Google? Et, complémentairement, celui que Internet Actu a publié sur le même sujet quelques jours plus tard: Quand YouTube remplacera Google.

« During one of the conference breaks (…) he mentioned that his son accesses the web through YouTube (…) Whenever [he] needed any information, he would open up YouTube, type in the search term and then just watch the videos that showed up as matches. He never Googled anything; he never went to any other site; his entire web experience was confined to YouTube videos. »

Je n’avais n’avais d’abord que survolé ce texte, le jugeant un peu farfelu. Mais depuis, je constate que mes enfants aussi accèdent spontanément au Web par YouTube — avec une efficacité étonnante. Pas sur tout les sujets, bien sûr, mais avec une efficacité sûrement équivalente à celle que nous offrait les meilleurs moteurs de recherche il y a une d’années.

Qu’est-ce à dire? Qu’est-ce que cela signifie d’un point de vue éducatif et culturel? Est-il possible d’accèder à la connaissance pratiquement sans savoir écrire, uniquement par l’image? Quelles conséquences sur la construction de l’esprit humain, et sur son fonctionnement? Cela me semble extraordinaire. Cela me semble périlleux. Je ne sais trop qu’en penser.

Cela me rappelle un autre texte qui m’avait beaucoup marqué, lu en 1993 alors que j’étudiais au baccalauréat en enseignement au secondaire. C’était dans le deuxième numéro de Wired, sous la plume de Seymour Papert: Obsolete Skill Set: The 3 Rs.

« In my forthcoming book, The Children’s Machine: Rethinking School in the Age of the Computer, I use as a thematic image an encounter with a four- year-old girl who heard that I grew up in Africa and asked if I knew how giraffes sleep. I did not. But the ensuing conversation led me to pursue the question when I got home. Reference books were scattered all over my floor as I jumped from one to another in an exciting exploration of the giraffe’s world. As I enjoyed the chase I pondered the unfairness of being able to get all this fun out of the girl’s question – why couldn’t she do what I was doing?

Not long ago the answer would have been obvious: She can’t read. But today, there is no technical obstacle to creating a « Knowledge Machine » that would allow a girl of four to navigate through a virtual knowledge space where she could see for herself how giraffes live. It will take time for the vast quantities of information available in print to be recast for such a machine. But it will happen; and when it does, the Knowledge Machine (a metaphor for much more varied forms of media) will provide easier access to richer and fuller bodies of knowledge than can be offered by any printed encyclopedia.

Admitting the prospect of Knowledge Machines does not imply that people will no longer need to read. But reading will no longer be the unique primary access road to knowledge and learning, and it should therefore no longer be the dominant consideration in the design of School. »

Ce texte m’avait évidemment amené à lire The Children’s Machine: Rethinking School in the Age of the Computer. Il est vraisemblablement temps de le poser à nouveau sur ma table de chevet.