Mon texte de ce matin a suscité plusieurs réactions, certaines publiques — sur Facebook notamment — et d’autres en privé. Certains m’ont reproché de compliquer les choses.Je reviens donc pour préciser / clarifier un tout petit peu mon raisonnement:
Le fait d’inscrire Paul Saint-Pierre-Plamondon n’est absolument pas motivé par l’idée de «lui donner un prix de consolation», ni même de le remercier pour sa contribution. Il n’a pas besoin de ça. C’est un message au parti que je souhaite passer en votant de cette façon:
Il est indispensable de renouveler le parti, sans tarder, en allant dans la direction que Paul nous a indiquée.
C’est le premier message que je veux passer en votant. C’est le plus important.
Mon deuxième choix est guidé par le réalisme. Je suis conscient que Paul n’a pratiquement aucune chance d’être élu. Il faut donc que j’identifie parmi les autres candidats celui que je souhaite voir diriger le parti d’ici l’élection celui qui influencera réellement l’issue du vote. Et c’est Jean-François Lisée.
***
Certains ont vu dans mon texte l’expression d’un vote stratégique. Mon raisonnement n’est pas de cette nature.
On me dira que dans telle ou telle configuration du vote (on peut effectivement imaginer mille et un scénarios) cela pourrait changer l’issue de l’élection — voire permettre à un-e autre candidate de se faufiler devant Jean-François. C’est possible.
J’assume ce risque parce que, comme je le disais dans mon texte du 12 septembre:
«…je veux passer un message fort en faveur de Paul Saint-Pierre Plamondon — pour envoyer un message très clair que le PQ doit se renouveler dans la direction qu’il indique — et que je veux accorder mon appui à Jean-François Lisée. Dans cet ordre.»
C’est aussi simple que ça.
Et notez bien que ce texte et celui de ce matin, comme tous ceux que je publie sur mon blogue, visent essentiellement à alimenter la réflexion de celles et ceux qui prennent le temps de les lire.
Je n’ai absolument pas la prétention de pouvoir dire à qui que ce soit de quelle façon exercer son droit de vote.
Pour ma part, je m’abstiendrai de mon deuxième et troisième choix.
Ce que j’exprime ici, n’a pas pour but de m’opposer à mon neveu Clément que je respecte dans ses prises de positions et que d’ailleurs je partage la plupart du temps. Je veux simplement profiter d’une tribune un peu plus élargie que là où je me suis exprimé antérieurement. Je sais que Clément est ouvert à la diversité des opinions.
La seule raison pour laquelle je suis membre du PQ, c’est que je suis un indépendantiste. Je ne veux pas répéter les erreurs du passé. Donner à un parti indépendantiste le soin de gouverner une province est très malsain. À ce moment là, le parti devient très vite un parti de pouvoir pour le pouvoir et l’indépendance perd son importance. Le goût du pouvoir devient vite supérieur au goût du Québec. On a vu ça dans le passé. Vous comprenez que j’aimerais voir Martine Ouellet chef du PQ même avec le risque de perdre les élection de 2018. Qui dit qu’un parti ne peut pas préparer l’indépendance en étant dans l’opposition? Il la préparera d’autant mieux qu’il n’aura que ça comme but: Faire un bon gouvernement de pays plutôt qu’un bon gouvernement de province.
Jacques Parizeau avait quitté le PQ vers la fin des années 80 parce que disait-il: « Ce parti ne va plus nulle part. » Il est revenu au début des années 90 pour se présenter comme chef avec la promesse de faire un référendum au début de son mandat. Il aurait gagné son pari s’il ne se l’était pas fait voler. De plus, imaginons qu’un parti se présente avec une promesse aussi claire et qu’il gagne les élections avec plus de 50% du vote populaire, il serait légitimé de déclarer l’indépendance sans référendum. S’il était majoritaire mais en bas de 50% du vote populaire, on fait une vaste campagne pour montrer les avantages d’être un pays et on prépare un référendum avec promesse de démissionner et de déclencher de nouvelles élections si le référendum est perdu. On n’est pas là pour gouverner une province. Au plus tard en 2024 ou 2025, Le Québec est un pays. Dans l’éventualité où Martine gagne les élections en 2018, ce qui n’est pas impossible, tout le processus est d’autant devancé.
—–Michel Laberge
Michel a raison de s’inviter ici et de partager sa propre réflexion à quelques jours du vote.
Tout le monde est d’ailleurs bienvenu pour partager sa réflexion (voir contredire la mienne!). C’est dans la diversité des opinions qu’on fait avancer le plus efficacement le débat.
Puisque la porte est ouverte, je me permets aussi d’ajouter ma réflexion. En précisant (aussi) que ce qui suit n’a pas pour but de m’opposer à ta position Clément, que je respecte, mais simplement de partager d’autres éléments de réflexion.
Comme Monsieur Michel Laberge, mon premier vote ira à Martine Ouellet, que j’espère chef. Et j’annulerai mon 2e et mon 3e choix. L’annulation de mes autres choix ne doit pas être interprétée comme un déni des qualités des autres candidats. C’est simplement que la seule raison pour laquelle je suis membre, c’est pour l’indépendance – et Martine Ouellet est la seule dans cette course qui en fait une proposition claire et ferme pour un premier mandat. Alors si Madame Ouellet n’est pas retenue chef, je considère simplement que ce n’est pas à moi de me prononcer sur les trois autres candidats à la chefferie (d’où l’annulation de mes autres choix, malgré leurs qualités respectives).
Je partage tout ce qui a été dit dans le commentaire de Monsieur Michel Laberge. Je ne vais donc pas le répéter. J’ajouterais simplement les quelques éléments de réflexion suivants :
1) Certaines personnes pensent que 2018 arrivera trop rapidement pour que le PQ se fasse élire en parlant d’indépendance dans un premier mandat (la proposition de Martine Ouellet). C’est possible, c’est un risque, mais l’inverse n’est pas exclu non plus. D’autres craignent un 3e référendum qui serait perdant, mais à cet égard il me semble que la meilleure façon d’éviter des lendemains qui déchantent, c’est justement de présenter une proposition claire et limpide en 2018 et de travailler au message tout aussi clair et limpide à l’avance. Si le temps s’est avéré insuffisant rendu en 2018 pour convaincre de l’indépendance (avec Martine Ouellet à la chefferie), ce ne sera pas le référendum qui sera perdu, mais le PQ qui sera dans l’opposition. Et avec Martine Ouellet comme chef, comme le mentionne Monsieur Michel Laberge, **si** le PQ est renvoyé à l’opposition en 2018, le temps dans l’opposition permettra alors de bien préparer un bon gouvernement de pays (plutôt que de province) pour les élections suivantes. Et je partage en complément tout ce qu’il a mentionné sur le caractère malsain de donner à un parti indépendantiste le mandat de gouverner une province.
2) Lorsqu’il est question de faire de la «politique autrement», si cela est pris au sérieux, il me semble que ça doit être entendu à deux niveaux. À un niveau personnel, bien sûr, dans certaines attitudes (ni être dans la langue de bois, ni être dans les attaques mesquines). Mais aussi, et peut-être même surtout, au niveau de la cohérence et de la transparence des idées elles-mêmes. Et c’est ce point qui me semble engendrer le plus de cynisme envers la classe politique lorsqu’il n’est pas respecté. Toutes les démocraties souffrent des dangers de la démagogie, des demies-vérité en campagne, et des joutes sur plusieurs tableaux à la fois pour «plaire» en campagne tout en ne pouvant pas «plaire» à tous ensuite. Tous les pays peuvent aussi être aux prises avec des partis politiques qui ne souffrent pas tant de ne pas avoir respecté toutes leurs promesses, mais de faire ce qu’ils avaient caché qu’ils feraient réellement. Les libéraux de Couillard comme ceux de Charest nous ont habitués à ça avant. Diminuer le cynisme, faire de la «politique autrement», favoriser l’engagement politique des jeunes, ça me semble devoir en tenir compte. Or, bien qu’il y a pire par comparaison (politique autrement?), il me semble sincèrement que le PQ a lui aussi d’urgence une confiance à regagner à ce niveau. Depuis 1995, le PQ entretient une confusion malsaine entre gouvernances de pays et de province, qui n’aide pas à lui faire confiance – et qui, au final, déplait souvent aux gens des deux côtés de la chaloupe ou de son «navire» qu’il concevait comme «amiral». Déjà en avril 2003, Serge Cantin, récipiendaire 2016 du prix Jacques-Parizeau, disait ne plus vouloir marcher dans le chantage de la «dernière chance» du PQ en prenant les indépendantistes en otage sans avoir la volonté réelle de présenter l’indépendance dans leur premier mandat. Il faut relire la réplique qu’il adressait à Pierre Bourgeault en 2003 : http://vigile.quebec/archives/ds-actu/docs3/03-4-12-1.html#cantin . C’était en 2003, n’est-ce pas encore plus vrai en 2016 ? Ça, il me semble que ça alimente le cynisme. Ça, il me semble que ce n’est pas faire de la «politique autrement». Or, il n’y a que Martine Ouellet qui échappe à cette critique, qui ne joue pas sur plusieurs tableaux pour des motifs électoralistes. Sur ce point précis, il me semble que même Paul Saint-Pierre-Plamondon, malgré toutes ses autres qualités indéniables, prête flanc à cette critique avec son registre dans un deuxième mandat. L’idée d’un registre pour un référendum d’initiative populaire, il me semble qu’il ne l’a pas inventé, ni même Alexandre Cloutier à la dernière course. De mémoire, si je ne me trompe pas, c’est une proposition qui a d’abord cheminé dans les instances du PQ dans les années 2000. De mémoire, si je ne me trompe pas, c’était surtout une volonté des indépendantistes de ne plus être les otages des apparatchiks du PQ avec leur ambiguïté et leur «prise d’otage» (voir lien ci-haut). Or, que fait Monsieur Saint-Pierre-Plamondon ? Il ne remet pas le pouvoir de décision entre les mains du peuple dès un premier mandat, mais demande que l’on vote pour lui à deux mandats consécutifs comme premier ministre avant qu’il le fasse (si rien n’a changé) entre 2022 et 2026. Pour moi, malgré ses autres qualités indéniables, cette idée n’est pas de la «politique autrement», mais qu’un raffinement dans l’art de jouer sur plusieurs tableaux à la fois.
3) Pour continuer au sujet de la «politique autrement» et des attitudes en politique. Je pense être plutôt un observateur extérieur. Mais j’ai parfois l’impression d’avoir des échos comme quoi Madame Martine Ouellet pourrait être entêtée. Et alors ? La «politique autrement», ça serait de faire la girouette ? La «politique autrement», ce serait de cacher ses véritables intentions ? La «politique autrement», ce serait de ne pas être ferme dans la mise en œuvre pragmatique de ses convictions ? La «politique autrement», ce serait de jouer le jeu du marchandage électoraliste ? Jusqu’à un certain point, je trouve plutôt rassurant qu’une personne en politique puisse afficher clairement ses positions avec constance (même si, bien sûr, nos pensées peuvent évoluer et se nuancer sur certains points). Et là-dessus, elle est constante depuis des décennies non seulement sur l’indépendance, mais aussi sur l’environnement (ce qui touche les jeunes).
4) Lorsqu’en 2015 j’avais fait venir Sol Zanetti à Trois-Rivières pour parler de manière non partisane de nationalisme et d’indépendance, j’avais été agréablement surpris de constater à quel point un propos transparent pouvait intéresser et rejoindre les jeunes. Plus de 430 étudiant(e)s étaient à sa conférence (voir : https://www.youtube.com/watch?v=Ydk73T8bs-A ). Une riche période de questions a suivi. Et après le tout, au moins une soixantaine d’étudiant(e)s sont restés pour continuer à lui parler durant au moins 30-40 minutes. Et après tout cela, comme si ce n’était pas assez, une dizaine d’étudiant(e)s sont allé dîner avec lui. Et quelques-uns ont fondé un exécutif régional. Il y avait aussi un prof de francisation, avec de ses étudiants en processus d’intégration en tant que néoquébécois. Ceux-ci ont fait la demande que Sol Zanetti retourne dans leur classe de francisation, pour parler de la souveraineté et des enjeux pour le Québec, parce que ça les intéressait de savoir en tant que nouveaux immigrants. Lorsque le dialogue est franc et nuancé, lorsqu’il n’est pas embourbé dans des stratégies électorales, ça intéresse les jeunes et les immigrants. À cet égard, je trouve tout à l’honneur de Sol Zenetti comme de Jean-Martin Aussant avant lui de dire : on va vous en parler franchement, on pense que l’indépendance serait une bonne idée et on va tenter de vous dire pourquoi, mais si vous n’êtes pas d’accords votez pas pour nous. C’est peut-être moins payant à court terme électoralement, mais c’est franc, c’est de la «politique autrement» et ça combat efficacement le cynisme à l’égard du politique. Pour les personnes qui ont visionné le débat à l’UdeM de la présente course, on aura peut-être remarqué que Martine Ouellet avait commencé avec une phrase analogue. Elle dit parfois que la présente course de PQ est historique : il s’agit d’un choix sur l’article 1 du parti. Je partage cet avis, mais je crois que le choix de la présente course est doublement historique. Non seulement il faut savoir si le PQ est encore celui qui place l’indépendance comme son centre de coalition, mais aussi il faut savoir s’il veut le faire franchement avec transparence, ou bien s’il renie l’espoir d’une «politique autrement» en préférant les stratégies pour s’assurer du pouvoir pour le pouvoir à court terme.
5) Face à une affirmation sincère, franche et transparente d’une possibilité d’indépendance dans un premier mandat, qui ne trompe ni ses membres ni la population, les circonscriptions de la région de Québec et de la région de la Beauce auront un défi supplémentaire pour les élections. Mais si une telle décision était prise, il me semble que ce ne serait alors plus seulement qu’un enjeu électoral, mais aussi un enjeu pour le passage à l’indépendance. Il faudrait alors sans doute investir beaucoup politiquement (réflexions, efforts, temps, etc.) pour rejoindre la population dans ces régions.
C’était un peu en vrac, mais voilà pour l’essentiel.
Amicalement,
Patrice
Puisque la porte est ouverte, je me permets aussi d’ajouter ma réflexion. En précisant (aussi) que ce qui suit n’a pas pour but de m’opposer à ta position Clément, que je respecte, mais simplement de partager d’autres éléments de réflexion.
Comme Monsieur Michel Laberge, mon premier vote ira à Martine Ouellet, que j’espère chef. Et j’annulerai mon 2e et mon 3e choix. L’annulation de mes autres choix ne doit pas être interprétée comme un déni des qualités des autres candidats. C’est simplement que la seule raison pour laquelle je suis membre, c’est pour l’indépendance – et Martine Ouellet est la seule dans cette course qui en fait une proposition claire et ferme pour un premier mandat. Alors si Madame Ouellet n’est pas retenue chef, je considère simplement que ce n’est pas à moi de me prononcer sur les trois autres candidats à la chefferie (d’où l’annulation de mes autres choix, malgré leurs qualités respectives).
Je partage tout ce qui a été dit dans le commentaire de Monsieur Michel Laberge. Je ne vais donc pas le répéter. J’ajouterais simplement les quelques éléments de réflexion suivants :
1) Certaines personnes pensent que 2018 arrivera trop rapidement pour que le PQ se fasse élire en parlant d’indépendance dans un premier mandat (la proposition de Martine Ouellet). C’est possible, c’est un risque, mais l’inverse n’est pas exclu non plus. D’autres craignent un 3e référendum qui serait perdant, mais à cet égard il me semble que la meilleure façon d’éviter des lendemains qui déchantent, c’est justement de présenter une proposition claire et limpide en 2018 et de travailler au message tout aussi clair et limpide à l’avance. Si le temps s’est avéré insuffisant rendu en 2018 pour convaincre de l’indépendance (avec Martine Ouellet à la chefferie), ce ne sera pas le référendum qui sera perdu, mais le PQ qui sera dans l’opposition. Et avec Martine Ouellet comme chef, comme le mentionne Monsieur Michel Laberge, **si** le PQ est renvoyé à l’opposition en 2018, le temps dans l’opposition permettra alors de bien préparer un bon gouvernement de pays (plutôt que de province) pour les élections suivantes. Et je partage en complément tout ce qu’il a mentionné sur le caractère malsain de donner à un parti indépendantiste le mandat de gouverner une province.
2) Lorsqu’il est question de faire de la «politique autrement», si cela est pris au sérieux, il me semble que ça doit être entendu à deux niveaux. À un niveau personnel, bien sûr, dans certaines attitudes (ni être dans la langue de bois, ni être dans les attaques mesquines). Mais aussi, et peut-être même surtout, au niveau de la cohérence et de la transparence des idées elles-mêmes. Et c’est ce point qui me semble engendrer le plus de cynisme envers la classe politique lorsqu’il n’est pas respecté. Toutes les démocraties souffrent des dangers de la démagogie, des demies-vérité en campagne, et des joutes sur plusieurs tableaux à la fois pour «plaire» en campagne tout en ne pouvant pas «plaire» à tous ensuite. Tous les pays peuvent aussi être aux prises avec des partis politiques qui ne souffrent pas tant de ne pas avoir respecté toutes leurs promesses, mais de faire ce qu’ils avaient caché qu’ils feraient réellement. Les libéraux de Couillard comme ceux de Charest nous ont habitués à ça avant. Diminuer le cynisme, faire de la «politique autrement», favoriser l’engagement politique des jeunes, ça me semble devoir en tenir compte. Or, bien qu’il y a pire par comparaison (politique autrement?), il me semble sincèrement que le PQ a lui aussi d’urgence une confiance à regagner à ce niveau. Depuis 1995, le PQ entretient une confusion malsaine entre gouvernances de pays et de province, qui n’aide pas à lui faire confiance – et qui, au final, déplait souvent aux gens des deux côtés de la chaloupe ou de son «navire» qu’il concevait comme «amiral». Déjà en avril 2003, Serge Cantin, récipiendaire 2016 du prix Jacques-Parizeau, disait ne plus vouloir marcher dans le chantage de la «dernière chance» du PQ en prenant les indépendantistes en otage sans avoir la volonté réelle de présenter l’indépendance dans leur premier mandat. Il faut relire la réplique qu’il adressait à Pierre Bourgeault en 2003 : http://vigile.quebec/archives/ds-actu/docs3/03-4-12-1.html#cantin . C’était en 2003, n’est-ce pas encore plus vrai en 2016 ? Ça, il me semble que ça alimente le cynisme. Ça, il me semble que ce n’est pas faire de la «politique autrement». Or, il n’y a que Martine Ouellet qui échappe à cette critique, qui ne joue pas sur plusieurs tableaux pour des motifs électoralistes. Sur ce point précis, il me semble que même Paul Saint-Pierre-Plamondon, malgré toutes ses autres qualités indéniables, prête flanc à cette critique avec son registre dans un deuxième mandat. L’idée d’un registre pour un référendum d’initiative populaire, il me semble qu’il ne l’a pas inventé, ni même Alexandre Cloutier à la dernière course. De mémoire, si je ne me trompe pas, c’est une proposition qui a d’abord cheminé dans les instances du PQ dans les années 2000. De mémoire, si je ne me trompe pas, c’était surtout une volonté des indépendantistes de ne plus être les otages des apparatchiks du PQ avec leur ambiguïté et leur «prise d’otage» (voir lien ci-haut). Or, que fait Monsieur Saint-Pierre-Plamondon ? Il ne remet pas le pouvoir de décision entre les mains du peuple dès un premier mandat, mais demande que l’on vote pour lui à deux mandats consécutifs comme premier ministre avant qu’il le fasse (si rien n’a changé) entre 2022 et 2026. Pour moi, malgré ses autres qualités indéniables, cette idée n’est pas de la «politique autrement», mais qu’un raffinement dans l’art de jouer sur plusieurs tableaux à la fois.
3) Pour continuer au sujet de la «politique autrement» et des attitudes en politique. Je pense être plutôt un observateur extérieur. Mais j’ai parfois l’impression d’avoir des échos comme quoi Madame Martine Ouellet pourrait être entêtée. Et alors ? La «politique autrement», ça serait de faire la girouette ? La «politique autrement», ce serait de cacher ses véritables intentions ? La «politique autrement», ce serait de ne pas être ferme dans la mise en œuvre pragmatique de ses convictions ? La «politique autrement», ce serait de jouer le jeu du marchandage électoraliste ? Jusqu’à un certain point, je trouve plutôt rassurant qu’une personne en politique puisse afficher clairement ses positions avec constance (même si, bien sûr, nos pensées peuvent évoluer et se nuancer sur certains points). Et là-dessus, elle est constante depuis des décennies non seulement sur l’indépendance, mais aussi sur l’environnement (ce qui touche les jeunes).
4) Lorsqu’en 2015 j’avais fait venir Sol Zanetti à Trois-Rivières pour parler de manière non partisane de nationalisme et d’indépendance, j’avais été agréablement surpris de constater à quel point un propos transparent pouvait intéresser et rejoindre les jeunes. Plus de 430 étudiant(e)s étaient à sa conférence (voir : https://www.youtube.com/watch?v=Ydk73T8bs-A ). Une riche période de questions a suivi. Et après le tout, au moins une soixantaine d’étudiant(e)s sont restés pour continuer à lui parler durant au moins 30-40 minutes. Et après tout cela, comme si ce n’était pas assez, une dizaine d’étudiant(e)s sont allé dîner avec lui. Et quelques-uns ont fondé un exécutif régional. Il y avait aussi un prof de francisation, avec de ses étudiants en processus d’intégration en tant que néoquébécois. Ceux-ci ont fait la demande que Sol Zanetti retourne dans leur classe de francisation, pour parler de la souveraineté et des enjeux pour le Québec, parce que ça les intéressait de savoir en tant que nouveaux immigrants. Lorsque le dialogue est franc et nuancé, lorsqu’il n’est pas embourbé dans des stratégies électorales, ça intéresse les jeunes et les immigrants. À cet égard, je trouve tout à l’honneur de Sol Zenetti comme de Jean-Martin Aussant avant lui de dire : on va vous en parler franchement, on pense que l’indépendance serait une bonne idée et on va tenter de vous dire pourquoi, mais si vous n’êtes pas d’accords votez pas pour nous. C’est peut-être moins payant à court terme électoralement, mais c’est franc, c’est de la «politique autrement» et ça combat efficacement le cynisme à l’égard du politique. Pour les personnes qui ont visionné le débat à l’UdeM de la présente course, on aura peut-être remarqué que Martine Ouellet avait commencé avec une phrase analogue. Elle dit parfois que la présente course de PQ est historique : il s’agit d’un choix sur l’article 1 du parti. Je partage cet avis, mais je crois que le choix de la présente course est doublement historique. Non seulement il faut savoir si le PQ est encore celui qui place l’indépendance comme son centre de coalition, mais aussi il faut savoir s’il veut le faire franchement avec transparence, ou bien s’il renie l’espoir d’une «politique autrement» en préférant les stratégies pour s’assurer du pouvoir pour le pouvoir à court terme.
5) Face à une affirmation sincère, franche et transparente d’une possibilité d’indépendance dans un premier mandat, qui ne trompe ni ses membres ni la population, les circonscriptions de la région de Québec et de la région de la Beauce auront un défi supplémentaire pour les élections. Mais si une telle décision était prise, il me semble que ce ne serait alors plus seulement qu’un enjeu électoral, mais aussi un enjeu pour le passage à l’indépendance. Il faudrait alors sans doute investir beaucoup politiquement (réflexions, efforts, temps, etc.) pour rejoindre la population dans ces régions.
C’était un peu en vrac, mais voilà pour l’essentiel.
Amicalement,
Patrice
Merci Patrice pour cette réflexion approfondie et détaillée. Tu seras peut-être surpris d’apprendre que je suis d’accord avec plusieurs des éléments que tu soulèves.
Je reconnais en particulier, comme toi, la constance et la vigueur des positions défendues par Martine Ouellet au fil des ans. Son discours nous fait globalement avancer, c’est indéniable. Son indépendance d’esprit devant le discours médiatique est aussi rafraîchissante. Mon expérience (très subjective, forcément) comme candidat, et dans plusieurs instances du parti m’empêche toutefois de la voir dans le rôle de chef, en particulier dans le contexte actuel — dans la mesure où je crois absolument essentiel de réunir les conditions les plus favorables pour que le Parti Québécois puisse reprendre le pouvoir en 2018 (c’est d’ailleurs sur cela que mon point de vue diverge le plus de ta position et de celle de mon oncle Michel).
Je suis également d’accord avec le fait qu’il faut cesser de prétendre faire de la politique autrement et se mettre à le faire, réellement. La politique autrement est un discours particulièrement creux quand ça ne s’accompagne pas d’un changement de comportements, immédiat et constant, aie-je même envie d’ajouter. Je te trouve extrêmement sévère à l’égard de Paul Saint-Pierre-Plamondon par rapport à cela. Sans être d’accord avec chacune de ses positions, j’apprécie au plus haut point l’approche pédagogique dont il témoigne sur de nombreux sujets. Cela me semble essentiel pour la suite des choses.
Le mouvement indépendantiste s’est doté d’outils et de forums de plus en plus diversifiés au cours des dernières annnées. Je m’en réjouis et je pense que notre plus grand défi est d’apprendre à en conjuguer leurs actions avec encore plus d’efficacité. S’il n’y avait que le Parti Québécois pour canaliser nos actions, je serais pas mal d’accord avec vous deux quand vous posez la question:
«Qui dit qu’un parti ne peut pas préparer l’indépendance en étant dans l’opposition?»
Mais dans le contexte actuel, je pense que la contribution la plus importante (indispensable, même) que le PQ peut apporter, c’est de trouver le moyen reprendre le pouvoir — un pouvoir dont pourront ensuite bénéficier toutes les composantes du mouvement indépendantiste. Il est le seul à pouvoir le faire. Les autres composants peuvent (et doivent) poursuivre leur travail sans égard à cette responsabilité; sur ça, vous avez raison.
J’ai choisi de militer au Parti Québécois pour travailler à réunir les conditions nécessaires pour former un gouvernement indépendantiste et reprendre, à l’Assemblée nationale, le leadership des questions économiques, sociales et culturelles de la nation. Autrement, c’est d’une autre façon que je m’impliquerais au sein du mouvement.
Je me permettrai d’y aller moi aussi d’un commentaire.
Je suis d’accord sur l’essentiel avec les positions exprimées ici et je désire certainement autant l’indépendance du Québec que quiconque au Québec ou au PQ. Je la désirais en 95, je la désire encore,
Je crois par contre que ce qui est le plus important est que la démarche soit claire. Les positions ambivalentes sur le processus d’accession à la souveraineté nous ont fait mal à la dernière élection. Dans la présente course, les positions de Martine Ouellet et de Jean-François Lisée sont les plus claires. On peut trouver que la première est trop pressée et que le second ne l’est pas assez, mais leurs positions ont le mérite de ne pas être ambiguës. Je pense sincèrement que ce qui compte le plus est de soumettre à la population une démarche qui répond à leurs questions, la plus importante pour elle, j’ai presque envie de dire « malheureusement », étant liée à l’échéancier.
J’en profiterai pour dire en terminant que peu importe qui sera élu chef vendredi soir, nous sommes tous dans la même équipe. C’est important de s’en rappeler.
-Benoît