Oser repenser l’identité


Je reviens de vacances avec la conviction qu’il faut réapprendre à parler d’identité au futur, plutôt qu’au présent, ou au passé. 

Et le texte de Fabrice Vil, dans Le Devoir d’aujourd’hui, me donne l’occasion de formuler quelques réflexions, encore incomplètes, qui me trottent dans la tête depuis quelques semaines. 

Il faut d’abord dire que je ne suis de retour de vacances que depuis hier soir — après trois semaines à l’étranger. C’est donc à distance, et de façon intermittente, selon les accès au réseau, que j’ai suivi le dossier des demandeurs d’asile à la frontière canadienne. Et les déclarations des politiciens québécois à leur sujet. Et que je m’en suis désolé.

C’est dans les mêmes conditions que j’ai suivi les événements raciaux aux États-Unis (avec leurs débordements au Québec).

Également dans ces conditions que j’ai soupiré en constatant que la rentrée politique québécoise semble encore vouloir se faire dans la polémique autour des questions de langue, de religion et d’immigration — rassemblées de façon commode sous le thème de l’identité.

Mais parlant d’identité, justement, de quoi parle-t-on? Il me semble que ça fait dix ans qu’on en parle avec un inconfort croissant.

Le problème réside peut-être dans notre façon d’aborder la question. Trop statique, comme si l’identité était quelque chose qui existait en dehors du temps et des mutations de la société et du monde. 

On perd peut-être trop souvent de vue que l’identité est quelque chose de dynamique. Quelque chose qui évolue. L’identité collective, comme l’identité personnelle. Ce n’est pas un repère immuable, c’est un projet — c’est une trajectoire, entre ce que je suis et ce que j’aspire à devenir.

J’ai l’impression que depuis dix ans (voire plus) on a laissé s’installer (consciemment, inconsciemment ou par maladresse) le débat autour de l’identité québécoise autour du «nous et du eux». Alors qu’il serait préférable de l’articuler autour d’un projet: ce que nous souhaitons que soit l’identité québécoise dans dix, vingt, cinquante ans. Et la place et le rôle de chacun dans cette identité.

L’identité, ce n’est pas quelque chose à laquelle on se fond. C’est quelque chose qu’on devient en adhérant à un projet de société, à un idéal. C’est quelque chose dans laquelle on se reconnaît parce qu’on sait qu’on peut aider à le réaliser; voire qu’il ne pourra pas se réaliser sans nous.

On ne devient pas Québécois comme on embarque dans un autobus. On le devient en contribuant à concrétiser un projet national fort et inspirant — en prenant part à un chantier, dont la réalisation sera aussi le fruit de nos efforts.

Aujourd’hui, je me dis que si on parle autant, et si maladroitement, d’identité (d’immigration, de religion, et de langue) depuis dix ans, c’est peut-être surtout parce que ce projet, et ses déclinaisons, ne sont pas clairement définies. Et c’est peut-être surtout à ça qu’on devrait consacrer nos efforts plutôt que de laisser le débat dégénérer, malgré des bonnes intentions de chacun.

En d’autres mots, je m’intéresse de moins en moins à savoir de quoi est faite l’identité québécoise aujourd’hui (ce qu’il faudrait défendre) qu’à savoir de quelle façon on souhaite qu’elle prenne forme dans le futur — et quels sont les projets qui nous permettront d’arriver à concrétiser cette vision.

C’est à ça que j’ai envie de travailler dans les prochains mois.

Fabrice Vil conclut son texte en disant que «la lutte contre la haine est une question transpartisane qui doit dépasser l’électoralisme.»

De la même façon, si on n’arrive pas à dépasser l’électoralisme sur les questions identitaires, il faudra peut-être en arriver au constat que la dynamique partisane actuelle est dans une impasse et cesser d’entretenir l’espoir que les solutions viendront de ce côté.

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