Le monde d’après la pandémie. Je tente de l’envisager, d’en dessiner mentalement les contours et, à mon grand étonnement, par un soudain défaut d’imagination — moi qui, d’habitude, n’en manque pourtant pas —, j’en suis incapable.
Mélikah Abdelmoumen
Un autre très beau texte de Mélikah Abdelmoumen dans Le Devoir de ce matin.
On se disait justement la même chose dans les derniers jours, Ana et moi, dans une de nos longues promenades dans le quartier: « il va falloir travailler fort en mauzuss pour que demain ne soit pas juste la reprise de nos bonnes vieilles habitudes d’avant la pandémie… le nouveau demain ne va pas se concrétiser tout seul. »
Sur une base individuelle, je pense qu’il est normal qu’on retourne rapidement vers « l’immense édifice du souvenir » décrit par Mélikah. Tellement de choses nous ont cruellement manqué.
C’est dans une dynamique collective que j’aspire encore à ce qu’on puisse tirer profit de la crise pour changer des choses, pour tirer des leçons, pour avoir le courage de s’attaquer à des réformes en profondeur.
Je ne me fais pas d’illusion, ça ne viendra pas tout seul. Les changements devront être portés, avec vigueur, par des gens capables de susciter l’adhésion, de convaincre de la nécessité de ces changements, et d’amener les gens à se retrousser individuellement les manches pour les concrétiser. C’est du domaine de la politique.
Les hommes et les femmes qui ont exercé le pouvoir pendant la crise sont évidemment épuisés. Cela me fait penser que ce ne sera probablement pas eux, pas elles, qui seront les mieux placés pour proposer des changements importants. Le retour au calme, à quelque chose qui ressemble au statu quo, leur apparaîtra probablement salutaire. Il faut les comprendre.
Pour que ça change, il faudra vraisemblablement que de nouvelles personnes, plus reposées, proposent ces changements — et qu’elles décident de les incarner politiquement.
J’y crois. Je pense que c’est encore possible d’imaginer un avenir différent, qui pourra donner un sens à tous les efforts que nous avons faits depuis 18 mois.
J’ose même espérer que cela pourra donner lieu à des élections particulièrement stimulantes dans les prochaines années. Il n’en tient qu’à nous.
Cela ne nous empêche pas de s’accorder quelques semaines pour se contenter de sourire un peu!
Ce jour-là, je me promenais, et les gens, retrouvant l’espoir, se souriaient en se croisant sur le trottoir — même avec les yeux pour ceux qui portaient un masque. Des sourires comme on n’en voit presque jamais, et une lueur dans l’œil qui ne mentait pas.
Mélikah Abdelmoumen
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En complément:
- Une campagne de sociofinancement à laquelle j’ai récemment participé avec enthousiasme: le guide des conversations utopiques.
- Un courte bande dessinée Instagram que je viens de voir et qui me semble faire remarquablement écho à ce texte.
