Parmi les rituels de vacances: lire un récit de Sylvain Tesson. Cette fois, le plus récent: Avec les fées.
Tesson nous amène avec lui en voilier, de l’Espagne à l’Écosse, en passant par la Bretagne, l’Angleterre, le Pays de Galles et l’Irlande. Au fil des jours, pendant que ses compagnons gardent le cap, lui enchaîne les randonnées sur les promontoires à la recherche du merveilleux.
« Par les grèves et par les pointes (…) j’embarquais, naviguais quelques milles, débarquais, courais la lande [et] retrouvais le bateau à l’endroit convenu. »
« [le merveilleux] est une qualité du réel révélée par une disposition du regard. Il y a une façon d’attraper le monde et d’y déceler le miracle. »
« La fée ne se rencontre pas, elle se convoque. »
« Définition possible de la fée: la conscience d’un moment. »
Ce n’est pas le meilleur Sylvain Tesson que j’ai lu, mais j’ai quand même apprécié la lecture parce qu’elle a été marquée de belles coïncidences. Et y a-t-il plus belle manifestation des fées qu’une coïncidence?
Il est question de menhir — comme ici, il y a quatre jours.
Il est question de Jules Verne — comme ici, il y a deux jours.
Il est aussi question de Tentative d’épuisement d’un lieu parisien, de Perec, que m’avait suggéré Luc Jodoin il y a quelques années, et qui continue de m’inspirer pour prendre une photo à partir de la fenêtre de mon bureau, chaque matin, depuis maintenant près de quatre ans.
« La tentative d’épuisement est un exercice de gratitude. Le contemplateur dispose de peu: ses yeux et quelques mots à offrir à la beauté. On regarde, on enregistre. Le merveilleux s’invite. »
Petite déception: j’aurais aimé trouver aussi une référence à la Chaussée des géants, en Irlande, parce que ça m’aurait permis de faire un lien avec les petits cubes de ma série de textes fantaisistes… pour laquelle je cherche toujours une conclusion.
Malheureusement, Tesson et ses compagnons ont mis le cap vers le Nord, en direction de l’Écosse, quelques miles trop tôt. Rendez-vous manqué.
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Au fil de la lecture, j’ai aussi apprécié quelques phrases qui m’ont semblé faire échos aux affres et aux joies de l’expérience politique:
« Nous avons essayé de faire au mieux, mais ce fut comme d’habitude. »
« Je me tenais sur un point de contact entre le réel et l’idéal. »
« Un sentiment de plénitude (…) une convergence des sensations, des émotions, des observations, cette croisée des transepts. »
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Je termine la rédaction de ce texte en savourant un thé Earl Grey, comme le faisait Tesson au moment où il a appris la mort de la reine Elisabeth, en Bretagne, sur la route du retour de son aventure à la voile.
« La mort d’une reine était leur tristesse (…) Ils s’en relèveraient en sacrant Charles. »
Mais alors! Attendez! Je l’ai cette conclusion… puisque le premier texte de la série inachevée s’appelait Salut Charles! — et trouvait son inspiration de la découverte d’une pièce de dix cents… sur laquelle figure le nouveau roi… au verso d’un voilier!
C’est presque invraisemblable…
« Les Fées existent quand on travaille à les faire apparaître. »
