J’ai utilisé hier l’expression branler dans le manche pour décrire d’inutiles hésitations. J’en profite pour présenter cet autre objet qui me suit depuis une vingtaine d’années. Un panneau routier indiquant l’entrée de la petite ville de Saint-Jules de Beauce.
J’ai récupéré cette enseigne avec mon ami Bernard, une nuit où nous allions prendre des photos astronomiques.
Nous avions suivi ensemble un cours d’astrophysique au cégep de Sainte-Foy. Le cours était probablement terminé et nos travaux remis depuis plusieurs semaines, mais nous avions pris goût à ces expéditions — et nous avions identifié le secteur de Saint-Jules comme le plus susceptible de nous offrir des conditions idéales pour l’absence de pollution lumineuse.
Nous y sommes allés plusieurs fois. Un peu plus d’une heure pour y aller, quelques heures couchés dans le champ le regard dirigé vers ciel, une heure pour le retour, et parfois un détour par la Terrasse Dufferin pour assister au lever du soleil en buvant le fond de nos thermos de café.
Ce devait être vers 1995. C’était encore l’époque des films argentiques. Il fallait d’ailleurs avertir les studios de développements que nos films contenaient des photos d’étoiles parce qu’autrement, ils nous revenaient inévitablement non-imprimés avec pour seule note: flou ou sous-exposé.
Un soir, en arrivant à Saint-Jules, nous avons remarqué qu’un nouveau panneau d’accueil avait été installé, et que l’ancienne enseigne, beaucoup plus modeste, était maintenant négligée. Bernard a spontanément rangé sa Toyota Tercel en bordure de la route et mis les quatre-flashers. Nous nous sommes greyés de clés anglaises et sommes descendus dans le fossé pour détacher le panneau du poteau où elle allait autrement être oubliée. C’est ainsi qu’elle a fait son entrée dans notre patrimoine.
Il y avait à cette époque à Saint-Jules une usine de manches à balais (d’où le lien avec le texte précédent!). Elle était située juste avant l’embranchement qui nous amenait au champ où nous nous installions clandestinement. L’usine était devenu le signal que nous étions enfin sur le point d’arriver aux étoiles.
De mémoire, cette usine a été détruite par le feu il y a quelques années, mais une recherche rapide sur Google me fait croire qu’elle a depuis été reconstruite.
Heureusement pour la suite de l’exploration spatiale.
De la série Sur mon (nouveau) bureau
Pas que je tienne absolument à faire partie de l’histoire, mais la 1re fois que tu es allé prendre des photos du ciel avec Bernard à St-Jules, j’y étais aussi et la raison principale pour laquelle nous avons dû y retourner est que nos photos étaient ratées: des aurores boréales vertes « éclairaient » tellement le ciel que nos photos étaient en quelque sorte surexposées. Et je te laisse raconter pourquoi TES photos à toi n’avaient jamais des aussi bons fonds noirs que les nôtres…
Certainement que tu peux/dois faire partie de l’histoire! Je ne me souvenais pas des aurores… mais ça me revient clairement (toute la beauté de partager des souvenirs, c’est qu’ils se précisent avec l’aide de ceux qui ont aussi vécu la même chose!).
Quand à la raison… je ne me souviens pas. Rappelle-moi (qu’on en rit, je suppose!).
j’imagine une usine de manches à balai !
@Sophie: Bernard me dit que « la première fois, avec les aurores, de mémoire ce n’était pas à St-Jules mais à Ste-Agathe ou quelque chose comme ça. On y avait même vu un bolide en fin de nuit! »
Il me rappelle aussi que nous étions allé aussi à la sortie de la ville récupérer la deuxième enseigne abandonnée — et qu’elle est dans son garage aujourd’hui. Patrimoine, patrimoine!
Il joint à son envoi deux photos, datées d’avril 1992:
Dans le champs, à Saint-Jules:

Sur la Terrasse Dufferin:
