Très gros soupir en lisant la chronique de Mathieu Bock-Côté dans le Journal de Montréal ce matin.
Au coeur de son propos, cette affirmation:
«Aux prochaines élections, un électeur nationaliste devrait spontanément se dire que s’il veut réduire le nombre d’immigrants, casser les accommodements raisonnables, imposer la laïcité, combattre l’islam radical, restaurer l’enseignement de l’histoire et défendre la langue française, il doit voter PQ.»
Méchant salmigondis!
Et il poursuit:
«Si le PQ ne parvient pas à créer automatiquement cette association d’idées dans l’esprit des électeurs, il ne parviendra pas à s’imposer.»
Je ne suis pas du tout d’accord avec cette affirmation.
Pas parce que je suis fermé à l’idée de réduire l’immigration. Pas non plus parce que j’aurais peur d’aborder les questions délicates associées à la laïcité et aux accommodements (dé)raisonnables. Et encore moins parce que je suis contre la restauration de l’enseignement de l’histoire et une promotion/protection plus vigoureuse de la langue française — évidemment!
Je ne suis pas d’accord avec Mathieu Bock-Côté parce que formulée ainsi, je trouve que son affirmation n’est qu’un leurre et ne fait qu’exciter inutilement les passions.
Le véritable enjeu est ailleurs.
Le principal défi du Parti Québécois pour les deux prochaines années, ce n’est pas de se focaliser sur les dossiers dits identitaires, c’est de démontrer qu’il regroupe les personnes qui comprennent le mieux le monde dans lequel on vit et quelles sont les forces qui sont en train de (re)modeler les sociétés occidentales.
Pour être crédible dans cette démonstration, le Parti Québécois devra être capable de formuler des propositions simples, concrètes et innovatrices qui permettront à la société québécoise de s’adapter aux influences qui s’exercent sur la société québécoise — en s’y adaptant, quand il le faut, et en en tirant avantage, aussi souvent que possible.
- Comment aborder la transformation du monde du travail devant l’économie des plateformes (Uber, AirBnB, etc.) qui est en train de mettre à mal toutes nos lois et réglementations?
- Quels seront les impacts de la robotisation et de l’automatisation de pans entiers de l’économie? Comment cela est susceptible d’affecter le filet de sécurité sociale dont nous nous sommes dotés dans les cinquante dernières années?
- Comment le Québec peut-il s’adapter aux impacts des changements climatiques — qui sont désormais inévitables?
- Comment repenser l’éducation dans un contexte aussi incertain?
- Comment imaginer de nouvelles façons de gouverner, plus agiles, pour être en mesure de s’adapter plus aisément à des bouleversements de plus en plus violents?
- Pour ne donner que quelques exemples…
C’est seulement en redevenant une source de propositions concrètes, dans tous les domaines, et avec l’ambition d’inventer le Québec du XXIe siècle (parce que je pense que nous sommes nombreux à avoir l’impression d’être englués dans le XXe) que le Parti québécois pourra retrouver une légitimité suffisante pour espérer former un gouvernement.
C’est en retrouvant cette légitimité dans l’esprit des électeurs que le Parti Québécois parviendra à s’imposer.
Pas seulement en parlant d’identité.
J’espère de tout coeur que vous serez candidat du PQ aux prochaines élections…
Excellent propos, Clément. Je suis à la fois ravi et rassuré que des péquistes élèvent leur voix contre le nationalisme populiste. Les grands défis politiques se situent désormais à l’échelle mondiale.
@McGown: merci, c’est très gentil.
@François: merci pour tes bons mots. Tu sais, c’est justement parce que les grands défis politiques se situent désormais à l’échelle mondiale que l’idée de pays est d’autant plus importante pour une nation — pour pouvoir participer à relever ces défis, avec tous les pouvoirs et la possibilité de s’exprimer que cela suppose.
« Comment le Québec peut s’adapter aux changements climatiques »… et le comment réduire sa contribution aux dits changements ?