Ça faisait longtemps qu’on n’était pas sorti le dimanche soir. Il a fallu se botter le derrière un peu pour sortir du divan, mais une fois rendu à l’Impérial, on n’a pas regretté de l’avoir fait. Wax Tailor était en grande forme pour le premier spectacle de sa tournée nord-américaine et on s’est couché porté par une très bonne énergie.
C’est encore porté par ses rythmes, et par la magnifique voix de Charlotte Savary, que j’ai lu Le Devoir de ce matin à bord du train vers Montréal.
Deux articles ont particulièrement retenu mon attention.
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Le premier, Guerre de tranchées politique, présente une analyse d’un nouveau sondage Léger. Deux extraits:
«Il y a beaucoup de partis qui se battent pour la même tarte, et tout le monde est un peu figé à travers le temps. On peut se demander si ça ne va pas prendre un phénomène spectaculaire en politique québécoise [pour créer un changement].»
Ça renforce ma conviction que ce n’est pas la stratégie et les calculs politiques qui permettront de gagner la prochaine élection. Ce seront des idées qui interpellent, des propositions ambitieuses, et des projets mobilisateurs.
C’est ça qu’il faudra garder en tête dans les prochains mois quand on débattra du contenu de la Proposition principale (version pdf, plateforme de consultation) pour en faire le prochain programme officiel du Parti Québécois.
Il faudra oser aller toujours un peu plus loin que notre prudence, notre réflexe le commanderait. Oser aller au bout de nos idées. Sortir de nos zones de conforts.
C’est seulement en osant sortir des sentiers battus que nous pourront mériter le privilège de former à nouveau un gouvernement.
«S’il y a une baisse de satisfaction envers le gouvernement, le PQ sera le dernier à en bénéficier. C’est-à-dire que, quand il y a un gouvernement libéral, si le PQ n’est pas la seule alternative, tous ceux qui vont quitter le navire libéral iront ailleurs. »
Il faut se le répéter, tous les jours. Il faut bien sûr assumer notre rôle d’opposition officielle et critiquer le travail du gouvernement, mais qu’il ne faut pas se laisser distraire par ça non plus. Ce n’est pas ce qui nous fera gagner. Pas plus que la dénonciation continuelle et de plus en plus dure des agissements de Donald Trump n’a aidé les Démocrates à convaincre un nombre suffisant d’États-uniens de voter pour eux.
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Le deuxième article, Au laboratoire de nos angoisses existentielles, aborde les effets psychologiques de la transformation accélérée de la société sous l’influence du numérique — en particulier de l’automatisation et de la robotisation.
Ça peut paraître comme un sujet sans rapport direct avec celui du premier article, mais je pense que c’est beaucoup plus lié qu’il ne paraît.
Les effets du développement des technologies numériques deviennent de plus en plus évidents. De plus en plus envahissant même. Les gens le sentent bien — même s’ils ne sont pas forcément en mesure de le verbaliser aussi clairement.
Je pense qu’ils sentent aussi que les femmes et les hommes politiques qui sollicitent leur confiance pour diriger l’État n’y comprennent pas grand-chose et que, sur ces sujets, ils sont pas mal tous interchangeables, alors tsé…
Quand tu crois que le monde politique ne comprend pas (pire: ne s’intéresse pas vraiment) à certaines des forces les plus puissantes qui transforment la société — pour le meilleur et pour le pire — c’est un peu normal de perdre de l’intérêt.
Je fais l’hypothèse que ce sont les candidats qui seront les plus crédibles pour parler de l’influence des technologies sur l’avenir du Québec qui seront élus en 2018.
Vaste chantier.
Pour une nuit courte, tu sembles bien éveillé. Bonne analyse et oui il y a un lien entre les deux sujets.
Clément, tu proposes: «Oser aller toujours plus loin que notre prudence ne le commanderait», «sortir des sentiers battus», «sortir de nos zones de confort». D’accord. Malheureusement, je constate que c’est précisément ce que le nouveau chef et ceux qui le suivent de trop près, n’osent pas. Pour que le Parti québécois retrouvent la ferveur du public, il faudrait qu’il mette de l’avant des proposition audacieuses propres à répondre aux énormes défis du temps présent. Il y a la révolution numérique bien sûr, mais il y a aussi ce qui préoccupe encore plus, en ce moment, la population, le monde ordinaire, le monde du travail:
1- Le système de santé qui fonctionne de travers depuis longtemps et encore plus depuis que les ministres de la santé Couillard puis Barrette ont imposer des mesures qui le font glisser doucement, mais infailliblement vers le privé. À quand une proposition audacieuse de PQ, comme celle que proposent les chercheurs de l’IRIS : mettre de l’ ordre dans les rémunérations des médecins; redonner aux CLSC leur rôle de première ligne, les soins à domiciles, etc.
2- La dégradation de l’environnement et les dérèglements climatiques: pour affronter ces défis, il faut quitter au plus vite le sentier bien battu des énergiea fossiles, ce que le PQ de Lisé n’ose pas faire. Il hésite, fait des concessions aberrantes. Concernant le même enjeu environnemental, à quand une proposition audacieuse pour des transports collectifs électrifiés, comme celle que propose l’IREC: le monorail sur moteur-roue pour relier toutes les régions, conditions sine qua non pour un développement régional et l’occupation social du terriroire.
3- La protection de la langue française: par crainte de créer des divisions le nouveau PQ est prudent, il recule et retourne aux bons vieux sentiers battus: peur d’imposer la loi 101 dans les cégeps, peur de réviser le statut bilingue de certaines municipalités…
4- Le système agroalimentaire québécois en crise, une crise profonde: le PQ reste dans les sentiers battus et n’ose faire des proposition qui bousculerait l’establisment de l’UPA qui domine le MAPAQ.
5- Le nationalisme économique préconisé par Lisé dans son discours de clôture du Conseil national est en butte à une contradiction fondamentale: Lisé est un fervent promoteur du néolibre-échange qui interdit tout nationalisme économique.
Conclusion: toute mesure politique audacieuse crée nécessairement des divisions entre ceux qui sont pour le statu quo des sentiers battus et ceux qui proposent de sortir des zones de confort pour répondre aux enjeux des temps présents et à venir.
J’aime vraiment les trois derniers paragraphes de ton texte. Je suis tout à fait d’accord avec toi sur ce point… eh oui, ce sera un vaste chantier!