Être patriote en 2018

On célèbre aujourd’hui la Journée nationale des Patriotes — un jour férié qui a été institué en 2002 par le premier ministre Bernard Landry:

«Nous avons choisi d’honorer de cette manière la mémoire des hommes et des femmes qui, depuis l’implantation des institutions parlementaires, en 1791, ont milité pour les droits de la majorité, dont celui du peuple à se gouverner lui-même ».

J’ai vu passer beaucoup de messages sur les réseaux sociaux depuis ce matin pour honorer le combat des patriotes pour libérer le Québec de l’occupation britannique — et ça mérite très certainement d’être souligné puisque sans leur combat, la présence francophone au Canada aurait vraisemblablement été compromise.

Toutefois, ma réflexion personnelle aujourd’hui consiste plutôt à m’interroger sur ce que ça signifie d’être patriote en 2018. Qu’est-ce que cela signifie de militer pour le droit du peuple à se gouverner lui-même?

La réponse facile est évidemment de dire que cela signifie de militer pour l’indépendance du Québec. J’en suis — mais ça me semble une réponse un peu simpliste si on ne s’interroge pas en parallèle sur les véritables obstacles à cette autonomie politique.

Qu’est-ce qui empêche aujourd’hui le peuple québécois de se gouverner lui-même réellement? C’est à dire de faire des choix propices à son épanouissement?

Est-ce que c’est la monarchie britannique? Le gouvernement fédéral? Le contrôle trop centralisé de notre économie? La corruption? L’influence croissante des médias sociaux sur notre façon de comprendre le monde? Les inégalités sociales croissantes? Le désintérêt des citoyens pour la politique? La perte de confiance dans le pouvoir du gouvernement?

Je crois personnellement que le dernier facteur est le plus lourd. J’aurais même tendance à croire que la liste présente les facteurs en ordre croissant — et que l’histoire ancienne est peut-être un mauvais guide par les temps qui courent.

Cela me fait penser que s’ils nous rendaient visitent aujourd’hui, les Patriotes nous inviteraient probablement à travailler prioritairement sur notre confiance en nous — parce que l’indépendance politique ne peut pas se faire avec des citoyens fatalistes.

Pour cette raison, il me semble qu’être patriote en 2018, c’est proposer des solutions concrètes pour:

  • aider les gens à gagner plus de confiance en eux (l’éducation, la culture, l’entrepreneuriat, un filet social rassurant, etc.);
  • concrétiser les pouvoirs du gouvernement du Québec — c’est à dire à démontrer réellement son utilité pour permettre l’épanouissement du peuple québécois;
  • démontrer le contrôle effectif de la population sur ce gouvernement.

***

Il y a deux ans j’ai écrit ceci — dans le contexte d’une course à la chefferie du Parti Québécois:

«[J’ai la conviction] que pour convaincre les Québécois de s’offrir un pays, il faut d’abord leur redonner confiance en eux-mêmes. Il faut qu’ils sentent que tout ne se décide pas sans eux, sous le contrôle de l’État ou de multinationales dont l’influence échapperait à toute forme de contrôle. Il faut que les citoyens sachent qu’ils peuvent prendre des initiatives, et que c’est la somme de ces initiatives qui contribueront à définir ce pays — pas des décisions prises à leur insu.

C’est pour ça qu’il faut repartir de la base, localement, des groupes, des communautés, des petites et des moyennes entreprises. Il faut parler au monde. Il faut faire de l’éducation une priorité absolue. Il faut simplifier l’administration de l’État pour la rapprocher des gens, éliminer les réglementations inutiles ou désuètes, stimuler l’entrepreneuriat, offrir de meilleures protections aux gens vulnérables, assurer la solidarité des uns et des autres, redonner sa place à la culture. Il faut repartir des aspirations des gens et refaire la démonstration qu’il sera plus facile de les réaliser dans un Québec Pays que dans un Québec Province. (…)

Je pense que tout ce qui est de nature à redonner du pouvoir aux citoyens, qui leur permet de se prendre en main, d’avoir confiance en eux (et au fait que l’État ne les laissera pas tomber s’ils sont dans le besoin) et, surtout, de sentir qu’ils ont prise sur leur destin, nous rapproche du jour où nous aurons un pays. Tout ce qui va dans le sens contraire nous en éloigne.

Je trouve que ça correspond finalement assez bien à ce qui est, pour moi, la forme la plus indispensable de patriotisme au Québec en 2018.

 

Photo: Nos joyeux étés, oeuvre de Myriam Coulombe-Pontbrilland.

2 réflexions sur “Être patriote en 2018

  1. Merci Clément,
    J’adhère à 100% à tes propos.
    Je vis quelques mois par année dans un pays (Italie) où presque plus personne n’a confiance en ses pairs, en ses institutions, en ses politiciens, en ses entreprises.
    C’est triste, mais surtout inquiétant, quand nous envisageons que le Québec pourrait devenir ce que l’Italie est devenue.
    D’un autre côté, c’est encourageant de constater qu’il y a encore beaucoup de Québécois qui souhaitent et qui croient possible d’apporter des changements à notre société afin qu’elle poursuivre son développement.
    Dans quel sens évoluera le Québec ?
    C’est la question qui m’habite à chaque jour.
    Vivre ailleurs quelques mois, me permet d’être plus conscient des conséquences de nos comportements.

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