
Quelque part en 2017.
Tout juste arrivé à St-Pancras.
Trop tôt pour un verre de bulles. Dommage, c’eût été beau clin d’œil au rendez-vous surprise avec Ana — il y a combien d’années déjà?
Je me suis installé au petit bar à expresso.
Je suis bien. J’adore les gares. À toutes les heures.
Devant moi, dans l’immense espace, la sculture d’un homme qui regarde au loin l’air inquiet. Je m’y reconnais. Et pas que moi — parce que quelque chose d’inquiétant est en train de se passer, l’impression d’un glissement, comme si l’avenir était en train de nous échapper. Mais pourquoi? Et que faire?
La rencontre avec F.S. il y a quelques jours m’a fait du bien. Il m’a dit une chose qui me reste à l’esprit: «Quand j’ai quitté cet emploi mes efforts étaient dispersés — j’avais trop de projets. La vie m’a forcé à choisir. Ça n’a pas été facile, mais je sais maintenant que j’ai fait le bon choix parce que tout s’est mis à être beaucoup plus facile. Je me suis mis à rencontrer des personnes inspirantes, les événement se sont enchaînés plus naturellement et chaque jour est devenu stimulant. Je m’épanouis.»
Notre échange m’a fait réaliser que j’ai eu la chance d’être très souvent dans un contexte où les choses se passent ainsi — et que c’était peut-être un peu moins le cas aujourd’hui. Je pense que c’est un rappel qu’il va falloir que je me reconnecte: que je retrouve mon fil conducteur — mon prochain fil conducteur.
Il y a de plus en plus de voyageurs sur le quai de la gare. J’ai beaucoup d’affection pour celles et ceux qui ont des allures de globetrotters, l’air heureux n’importe où, qui parlent et qui rient avec un peu tout le monde. Je m’interroge sur les autres, l’air renfrogné, manifestement pressés, la valise à la main comme un fardeau. Ont-ils vraiment la vie qu’ils souhaitent? Et moi?
Me revient à l’esprit un texte que j’ai lu dans Le Monde il y a quelques jours. Son auteur s’interrogeait sur la place que prend le travail dans la définition de notre identité. Heureusement, je l’ai découpé et glissé entre deux pages du dernier roman de Kim Thuy.
Il me rappelle maintenant où j’en suis dans ma lecture de Vi.
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Ce texte est le premier d’une série de textes pour lesquels je prévois m’inspirer des notes que je prends quotidiennement depuis maintenant plusieurs années.
C’est aussi le deuxième texte de mon défi #100daystooffload.