Nous étions regroupés en trois ateliers cet après-midi. J’ai participé à celui qui avait pour thème « Quels mécanismes pourraient assurer la qualité de l’enseignement offert par les universités québécoises ». Il y avait dans la salle autant d’observateurs que d’intervenants.
Les échanges ont été très respectueux et disciplinés — mieux: j’ai trouvé qu’ils ont été véritablement constructifs. Des bases de consensus et quelques dissensions, bien sûr, mais une très bonne ambiance dans l’ensemble. Je pense que la forme de l’événement — très ouverte — est pour beaucoup dans ce climat propice au dialogue. Éliane Laberge, de la FECQ, a très bien résumé cela, je trouve: « ça fait tellement longtemps qu’on ne s’était pas vraiment parlé: on avait du rattrapage à faire ».
Je n’ai pas l’intention de reproduire ici l’ensemble de mes notes, ni de prétendre faire une synthèse des propos qui ont été tenus pendant nos deux heures et demie de travail. Je souhaite plutôt rapporter, de façon subjective, quelques-uns des éléments qu’il me semble important de conserver à l’esprit dans la suite des travaux qui nous mèneront jusqu’au Sommet, en février. Des synthèses plus officielles seront de toute façon sans doute déposées sur le site de l’événement comme cela a été le cas avec les présentations de ce matin.
Ces quelques éléments donc:
- Il est important de bien définir les termes.
- L’ASSÉ a demandé que les participants précisent ce qu’ils entendent par « la société » quand ils expriment le besoin d’établir des liens entre les universités et la société. « Est-ce que cela intègre aussi les entreprises privées? ».
- À mon tour, j’ai demandé qu’on précise aussi de quoi on parle quand on fait référence « aux entreprises » (et même « aux entreprises privées ») — en rappelant qu’il y a derrière ce mot des réalités très variées, selon leur secteur d’activité, leur taille, la philosophie de leurs dirigeants (voir aussi mes réflexions de ce matin).
- S’il faut bien définir les mots (et même l’idée de « qualité »), il ne faudrait pas aller jusqu’à remettre en question l’idée qu’il est possible d’évaluer la qualité (et en particulier la qualité de l’enseignement). Martine Desjardins, de la FEUQ, a d’ailleurs rappelé qu’il se fait beaucoup de recherche de qualité à ce sujet au Québec. Un rappel très pertinent.
- Il faut finalement être conscient que le mode financement des universités — qui serait essentiellement basé sur les EETP (équivalent étudiants à temps plein) — n’est pas neutre sur certains des choix que font les universités au regard de la qualité.
Martine Desjardins a aussi souligné que s’il n’y a pas d’urgence pour changer les moyens que nous prenons pour évaluer la qualité de l’enseignement et de la recherche (ce que certains participants avaient évoqué), il y a néanmoins urgence pour discuter des changements souhaités — dans une perspective de long terme.
Avons-nous besoin d’un nouvel organisme pour évaluer la qualité des universités? Je n’ai pas pu me faire une idée sur la question, mais j’ai trouvé importante la préoccupation exprimée par Caroline Senneville, de la CSN: « il ne faudrait pas complexifier sans améliorer ».
John R. Porter a bien résumé le constat, partagé par pas mal tout les participants, je pense:
« Au sujet de l’université, on a, à l’évidence, un problème de perception — et, devant cela, nous avons minimalement un devoir de communication ».
Il faut donc parler plus des universités, de leurs réalités, de leurs besoins — et de l’importance de l’éducation supérieure (et j’ajouterais de l’éducation, de façon générale).
J’y vois une raison de plus pour croire qu’il ne peut pas y avoir d’une part «l’éducation, les écoles, les cégeps et les universités» et la société d’autre part. Il me semble qu’on a plus que jamais le devoir de réfléchir, ensemble, dans une perspective de cité éducative. Et j’accepterai volontiers qu’on me dise que j’en fais une obsession…Je me réjouis d’ailleurs que la ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Madame Agnès Maltais, ait choisi d’adopter le mot cité dans sa conclusion.
Quant à mon intervention en atelier, elle tournait essentiellement autour des quelques idées suivantes:
- Courte description de De Marque.
- Décrit très sommairement la réalité de cette entreprise d’une trentaine de personnes, basées à Québec, qui oeuvre dans une une industrie culturelle importante, qui change rapidement, et dont la dimension internationale est de plus en plus importante.
- Rappelé que l’implication d’un entrepreneur et d’une entreprise, de façon générale, dans les universités, peut prendre de multiples formes.
- Qu’une entreprise comme la nôtre, quand elle embauche, ne cherche pas forcément des profils très spécialisés; plus souvent qu’on pense des profils plus généralistes — capables de bien saisir la complexité de l’environnement dans lequel nous évoluons.
- Que je n’avais pas le prétention de pouvoir suggérer, de l’extérieur, des manières d’évaluer la qualité des universités — mais que j’ai la conviction que les processus recherchés devront être continus, ouverts, souples et surtout pas toujours formels.
- Qu’il est par exemple possible de rendre visite à des entreprises — et particulièrement dans une perspective de développement local et régional.
- Il qu’il faut surtout mettre en place les conditions d’un dialogue permanent entre l’université et « la société », parce que l’évaluation de la qualité se fait souvent naturellement quand il existe un dialogue… et les mécanismes et structures visent parfois seulement à pallier, voire à masquer une absence de dialogue.
J’aurais aimé évoquer aussi l’idée de faire un pas vers une perspective open data — en rendant disponible plus de données brutes sur la réalité quantitative dans les universités pour permettre à chacun de tirer des interprétations — mais j’ai jugé, à tort ou à raison — que ça ferait inutilement diverger une discussion qui a bien davantage besoin de trouver des points de convergence. Je suis convaincu qu’il y aura bientôt d’autres occasions pour en parler — et pour débattre de quelles données auraient avantage à être partagées. Je souhaite en tout cas le favoriser en l’écrivant ici.
Dans la synthèse de la journée des grands rapporteurs, on a fait référence au besoin de respecter la diversité en assurant la cohésion — de viser continuellement en gardant en tête l’idée que la notion de qualité est liée au contexte, donc dynamique, évolutive. J’apprécie cette perspective.
« Il faut sur ces sujets, bouger rapidement, mais sans précipitation; sans attendre que, devant l’urgence, nous n’ayons plus le temps d’en débattre — parce que nous souhaitons faire les changements nécessaires dans une perspective de développement durable. »
Merci au Ministre de l’Enseignement supérieur, Monsieur Pierre Duchesne, ainsi qu’à son équipe, pour l’organisation de cette journée qui était très importante pour qu’on redonne enfin à l’enseignement supérieur sa juste place dans nos préoccupations collectives.
J’essaie de lire ce que je peux sur la journée, mais on dirait que ce qui a été discuté c’est comment évaluer la qualité de l’enseignement, pas comment l’améliorier. Evaluer quelque chose, ça ne le rend pas meilleur. Avez-vous discuté des mesures concretes pour améliorer la qualité de l’enseignement ?
Tu n’as pas la prétention de pouvoir suggérer des moyens d’évaluer ce qui se passe à l’université or tu peux fournir un regard pertinent sur une partie des connaissances et compétences des gens que tu embauches et qui ont une formation universitaire. Il me semble qu’il y a là une source d’information pertinente pour alimenter le jugement des acteurs au sein de l’université. En tout cas, en ce qui me concerne, lorsque je vais dans les écoles et que les enseignants et directions me partagent des commentaires, cela éclaire ma pratique et peut me donner des idées. Est-ce que je donne suite à tout? Est-ce que je considère tout? Non, bien sûr. J’en prends et j’en laisse. Je fais preuve de jugement. Il n’en demeure pas moins que cela alimente mon développement professionnel. Tout comme bien d’autres commentaires de gens qui sont plus ou moins liés au monde de l’éducation universitaire. Comme toute pratique, l’université dispose de ses propres grilles de lecture. C’est correct. C’est souhaitable. C’est ce qui fait son identité et il ne faut pas perdre cela de vue. Comme tu le mentionnes, l’université fait aussi partie d’un ensemble plus grand. De mon point de vue, il ne peut être que profitable qu’elle soit amenée à se positionner et repositionner par rapport à d’autres grilles de temps à autre, ne serait-ce que pour réaffirmer sa spécificité.