Idées pour la suite — 5

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À la suite de ce texte, je poursuis ma réflexion à voix haute pour brasser quelques idées, pour essayer d’esquisser des propositions concrètes qui pourraient contribuer à mettre le Québec sur la piste d’une transformation positive au sortir de la pandémie.

Aujourd’hui: valoriser le parce que et le pourquoi

J’ai eu le plaisir d’une visioconférence avec cinq amis ce matin: Bruno, Patrick, Sylvain, Sébastien et Carl. On s’est donné des nouvelles — Montréal, Québec, Provence — et on a longuement jasé du contexte: nos perceptions sur les constats, les leçons qui commencent à émerger, ce qu’il y a à retenir, les tendances à observer, les réflexions à poursuivre. Un très bel échange, à la fois agréable et stimulant.

On a notamment fait référence à ce texte de Pierre-Henri Tavoillot — en particulier à cet extrait que j’avais cité sur Twitter quelques heures plus tôt:

« Il faut plutôt promouvoir ce que cette crise va nous permettre d’améliorer plutôt que passer notre temps à détester ce que nous sommes. »

Et je retiens de cette partie de notre échange une intervention de Sylvain: « il n’y aura pas d’après… parlons plutôt de la suite ». J’adopte ça — d’où le changement dans le titre de ma série de textes.

***

Ma proposition d’aujourd’hui porte sur la nature de nos débats. On salue depuis plusieurs semaines le fait que la partisanerie a été mise de côté pour aider le gouvernement à passer au travers de la crise. Les élu.e.s ne font qu’un, a-t-il été dit: «on est tous dans la même équipe».

C’est vrai, et c’est louable — mais personne ne se fait d’illusion, ça ne pourra pas durer. Et c’est bien correct comme ça. Une fois sortis de la crise, il faudra que l’action du gouvernement recommence à être critiquée, soumise aux questions, mise en comparaison avec d’autres approches, d’autres façons de voir les choses. Et c’est sain qu’il en soit ainsi.

Mais je pense qu’il y a plus que ça. Il y a aussi la manière de faire du gouvernement, et celle de l’opposition. On peut faire mieux que ce qu’on faisait au cours des dernières années — avec souvent de vains tiraillages.

Je propose pour cela qu’on valorise le « parce que » et le « pourquoi ».

Ça m’a frappé à quelques reprises au cours des derniers jours: confronté à des questions difficiles, François Legault a quelques fois eu le réflexe d’expliquer le dilemme dans lequel son gouvernement se trouvait. Exemple:

Journaliste: Est-ce qu’il n’aurait pas été mieux de faire ceci plutôt que cela?

François Legault: C’est une question qu’on se pose tous les jours. Il faut comprendre qu’on ne peut pas faire les deux. On doit choisir. D’un côté, on peut faire ceci, mais ça veut dire qu’on ne pourra pas faire cela. Et si on fait l’inverse, on ne pourra pas faire cela. Il faut chercher un équilibre. Il faut prioriser quelque chose. Pour le moment on a choisi de faire ça parce que…

Parce que.

Expliquer. Expliquer simplement le choix auquel un dirigeant est confronté. En faisant confiance à l’intelligence des gens qui écoutent, parce qu’ils peuvent comprendre que parfois, on ne peut pas faire A et B à la fois. Parce que c’est comme ça dans la vie et que les citoyens le savent.

On peut être d’accord ou pas avec François Legault, mais on sait ainsi qu’il a pris le temps d’y réfléchir, qu’il a dû peser le pour et le contre, arbitrer en fonction des valeurs qui le guident, et prendre une décision.

Je propose qu’il en soit ainsi tout le temps. Pas juste en temps de crise.

Je propose que quand il annonce une décision, de toute nature — une annonce économique, par exemple — les ministres nous expliquent simplement, en utilisant un simple « parce que », la raison qui les a amenés à investir dans cela plutôt que de le faire dans autre chose.

Je propose que ce soit ainsi également pour les élu.e.s de l’opposition. C’est ok de critiquer le gouvernement, mais il faudrait aussi prendre le temps d’expliquer, simplement, avec un simple « parce que », ce qui les amènerait, eux, à prendre une décision différente — en fonction de quel raisonnement, en vertu de quels principes ou de quelles valeurs?

Et pour que cela soit possible, je propose aussi que les journalistes et l’opposition adoptent plus souvent des questions commençant par « Pourquoi… », plutôt que par « est-ce que…» — cela invitera plus facilement des réponses en forme de « parce que » et qui seront beaucoup plus riches pour le débat public.

Si tout le monde faisait un peu plus souvent usage des « pourquoi » et des « parce que », on laisserait probablement pas mal moins de place à la langue de bois, nos débats seraient plus vigoureux, plus riches — et on donnerait l’occasion à nos femmes et nos hommes politiques d’être beaucoup plus authentiques.

Cela rendrait bien mieux compte, aussi, de la difficulté de l’exercice du pouvoir, qui est fait d’une continuelle succession de dilemmes et de choix difficiles — où les principes prennent tout leur sens au moment où ils sont confrontés à la réalité.

Pourquoi?

Parce que…

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