L’ordinateur à l’école: indispensable!

Un article dans Le Soleil de ce matin qui fait référence à l’expériences des neufs jeunes québécois qui témoignaient de leur utilisation des blogs et des wikis à Autrans la semaine dernière.

J’en retiens particulièrement deux phrases — la première de Virginie, la seconde de Louis-Étienne:

« [l’ordinateur] est un outil génial ! Ça facilite l’apprentissage, parce qu’avec Internet, on a accès à une foule d’informations. Je serais prête à m’en passer à la maison… mais pas à l’école ! »

« Quand on sait qu’on est lu, ça nous motive à faire plus attention à ce qu’on écrit »

Jouer à l’oracle pour Le Lien Multimédia

Une amie journaliste, Sophie Bernard, m’a demandé il y a quelques jours de « jouer à l’oracle » avec elle pour Le Lien Multimédia. C’est avec plaisir que j’ai saisi cette occasion pour faire un retour sur l’année 2006 — que je n’avais pas encore pris le temps de faire — et pour essayer de me projeter quelques mois en avant dans l’année 2007. Voilà donc mes réponses à ses questions.

Quels sont les changements qui ont le plus marqué le monde numérique en 2006?

Je pense que ce qui a le plus marqué le monde numérique c’est la réalisation de systèmes de rétroaction de plus en plus rapides et de plus en plus efficaces (avec les commentaires, les wikis, les rss et autres outils de suivis… et leurs effets combinés).

Un peu partout sur le Web, dans les médias, dans tous les secteurs, on voit apparaître des idées, des produits, des services, des approches qui ont pour effet de décupler l’effet de feedback : les médias ouvrent des espaces de commentaires et de discussions partout (le cas de Libération est très fort à cet égard), les YouTube, Flickr, Wikipedia et autres deviennent de puissantes caisses de résonnance de ce qui se passe ici et là. Tous ces mécanismes existent depuis bien plus d’un an, mais une masse critique d’utilisateurs les maîtrisent maintenant et les véritables effets ne commencent qu’à se manifester vraiment hors des cercles de geeks.

Le délai entre la « production » de la publication et la « réaction » devient de plus en plus court, avec les exigences et les stress que cela comporte pour tous les acteurs de ce grand jeu de l’évolution des systèmes économiques autour du Web. Certains peuvent avoir l’impression que cela nous retire le droit à l’erreur (ce qui est une erreur d’attitude devant le changement… mais ça c’est une autre question!).

Les secteurs économiques qui étaient habitués à travailler sur « des cycles longs » (l’édition, par exemple) sont particulièrement bouleversés par ce phénomène.

2006 a-t-elle été une année de nouveautés ou de continuité?

C’est une année de continuité, clairement, au sens où nous n’avons pas vu émerger de nouvelles forces qui pourraient influencer le développement du cyberespace. Ce sont les mêmes forces qui sont à l’oeuvre, qu’on comprend un peu mieux, qu’on reconnaît plus facilement, qu’on met en oeuvre plus efficacement.

Quel est le buzz word qui t’a le plus agacé l’année dernière?

Communauté.

C’est un mot très noble, qu’il est toujours bon d’avoir à l’esprit comme une utopie pratique… qui est parfois un raccourci oratoire très utile, mais on en a fait un usage clairement abusif cette année. Il a été utilisé vraiment à tort et à travers. Ce n’est pas parce qu’on permet aux gens de laisser des commentaires à la fin d’un texte ou qu’on leur permet de dire que « lui et lui et elle et encore lui sont mes amis » que nous formons une communauté. Je caricature (à peine!), mais il faudrait retrouver à cet égard le sens de la mesure. On peut être guidé par une idée d’ouverture; on peut souhaiter l’émergence de réseaux entre les gens qui s’intéresse à un sujet, sans pour autant voir naître des communautés.

Je rêve de contribuer à l’avènement d’une communauté autour de l’éducation sur le Web… mais je ne vois toujours pas comment je pourrai y arriver…

Quelle tendance t’a le plus enthousiasmé?

La reconnaissance, et l’adoption croissante, de Creative Commons. Parce qu’il me semble que cela offre un contexte de « réflexion pratique » qui est de nature à recadrer de façon beaucoup plus saine les débats (absolument nécessaires) sur le droit d’auteur.

D’après toi, de quoi sera fait 2007?

Je n’ai pas la prétention de pouvoir répondre à cette question « de façon générale », néanmoins, par rapport à ce qui m’intéresse particulièrement :

Accentuation des effets de « feedback loop » décrit précédemment… et plusieurs de ceux qui ont pensé s’en garder à l’écart y seront confrontés: encore plus que jamais de rss et autres gadgets du genre (on en verra partout!), plus de formulaires de commentaires, de commentaires d’acheteurs, de wikis, etc. Plus de sites qui se construisent autour de ça… ou qui en intègrent des briques sous une forme ou sous une autre.

L’usage des blogs dans les écoles connaîtra un accroissement considérable parce qu’on comprendra de mieux en mieux que c’est un des moyens les plus efficaces pour permettre des changements durables dans les écoles (parce que cela permet de recréer un contexte où l’ensemble de la « communauté éducative » peut s’impliquer dans les changements désirés et où il est possible de valoriser adéquatement les acteurs de ce changement: jeunes et moins jeunes.

Les premières livraisons de « l’ordinateur à 100 $ » feront l’objet d’une couverture médiatique sans précédent au cours de l’année 2007 et mettront sous pression les gouvernements des pays « trop riches pour y avoir accès » et « trop pauvres pour investir aussi massivement que d’autres » (comme le Québec). On découvrira avec émerveillement en 2008 de nouvelles formes d’utilisation éducative de l’ordinateur dans les pays concernés, qui feront preuve d’une ingéniosité qui pourrait bien devenir le principal moteur des changements que nous attendons dans le domaine scolaire depuis des années (mais là, je suis déjà rendu en 2010… au moins!).

Et dans ce qui m’occupe plus particulièrement à l’heure actuelle :

Après la musique, le cinéma et la télé, le monde du livre prendra la juste mesure des bouleversements auxquels il est convié par la généralisation d’Internet dans la population. On assistera à beaucoup d’expérimentation et d’innovation dans ce domaine (tant dans l’usage des réseaux, qu’au plan matériel avec l’arrivée des premiers eBook, papier électronique, un peu convainquant pour le grand public).

Qu’est-ce qui te rend le plus optimiste pour la prochaine année?

De façon générale :

En dépit de tout le verbiage autour du « Web 2.0 » et de la vision que les médias donnent de cela à partir de quelques exemples démesurés (YouTube, etc.), les forces qui influencent le développement du Web demeurent accessibles « au monde ordinaire ». Il reste possible aujourd’hui aux gens qui ont de bonnes idées de créer des projets « qui feront la différence » avec des moyens raisonnables, un peu d’ingéniosité (et beaucoup de détermination). C’est une condition nécessaire à l’innovation.

Au plan éducatif :

Je pense que les développements du Web rendent inévitable et irréversible « l’ouverture des écoles sur leur milieu ». Idée dans laquelle je crois profondément et qui accélérera sans doute l’intégration du concept de « cité éducative » dans le développement de nombreuses villes et villages [il fallait bien que j’en parle, non?  ;-)].

Qu’est-ce qui aurait tendance à t’inquiéter pour 2007?

Ce qui m’inquiète le plus c’est que grisés par le côté enivrant de toutes ces technologies aussi puissantes que simples, nous négligions d’évaluer tous les risques associés au fait de laisser des informations personnelles un peu partout « sans trop nous en rendre compte ». La banalisation de la diffusion d’information personnelle me préoccupe beaucoup, et, ce, tant chez les jeunes que chez les adultes.

Peut-être y aura-t-il en 2007 des événements pour nous faire prendre conscience des risques associés à cela. Je le souhaite… en espérant que ces événements n’aient pas de répercussions fâcheuses et qu’ils n’auront pas  aussi pour effet de trop effaroucher les gens au fait de contribuer activement au développement du web par leurs commentaires, leurs clics, leurs textes, leurs photos, etc.

Qu’aimerais-tu voir se développer?

J’aimerais beaucoup voir se développer au Québec un mouvement politique qui appuie son discours et ses méthodes sur la possibilité d’engager plus étroitement qu’auparavant les citoyens dans « la vie politique » et ce, non pas seulement au moment des élections, mais au quotidien. Et pas seulement « pour consulter quand ça lui convient » ou pour « mobiliser après avoir pris une décision », mais dans un véritable processus démocratique.

Je fais l’hypothèse que les partis politiques provinciaux et fédéraux n’auront pas le courage d’aller aussi loin aussi rapidement et qu’ils feront tout un autre tour de piste avec des usages exclusivement « marketing » du Web, essentiellement à l’occasion de campagnes électorales.  En conséquence, je pense que les changements que je souhaite se produiront d’abord au niveau municipal… et donc, s’ils commencent à prendre forme en 2007 ne pourront se concrétiser vraiment qu’en 2009. Mais j’aimerais bien en voir poindre quelques signes… déceler quelques encouragements… À suivre.

Colloque de l’APOP

Je viens de terminer une expérience pas mal particulière: la présentation d’une conférence » dans un espace télécollaboratif, à l’occasion du colloque de l’APOP.

J’aimerais d’abord lever mon chapeau (très haut!) à l’équipe de l’APOP pour avoir osé l’expérience d’un colloque de ce type entièrement en mode télécollaboratif. L’organisation a été impeccable! Les communications préalables, les préparatifs, les équipements remis aux participants (webcam, micro, écouteurs, etc.), les formations (documents et séances), etc. Je lève également mon chapeau à l’équipe de SVI dont l’outil, VIA, offre un excellent service.

Je veux ensuite garder une trace de l’impression très étrange (vraiment pas désagréable, mais étrange) que me laisse cette première expérience. J’ai trouvé que c’était beaucoup moins intimidant que de parler « en personne, devant l’auditoire », mais beaucoup plus difficile à la fois — parce que le feedback est vraiment très limité, et qu’il est difficile d’aller chercher même la petite part de feedback possible parce que cela suppose des manoeuvres un peu trop distrayantes. Décidément le « non verbal » est encore plus riche qu’on peut le croire… on en sait des choses en regardant le groupe à qui on s’adresse! Sauf qu’en contrepartie… si on se limitait à cela, je n’aurais pas pu participer à partir de Londres, dans une chambre d’hôtel, entre deux rendez-vous au BETT. Et sans doute la même chose pour certaines personnes de Sept-Îles ou de Rouyn — ou même de Québec, qui ne se seraient pas déplacés à Montréal, par exemple.

Il était d’autant plus important que tout le reste soit irréprochable parce que cette absence relative de feedback rend vraiment difficile les « enchaînements »: lancer la présentation (quand? de quelle façon?), passer d’une section à l’autre (les gens ont compris ou pas?), conclure (oui mais… et est-ce que les gens ont compris? sont contents? ont des questions qu’ils n’osent pas poser?). En conséquence, je ne suis pas particulièrement satisfait de ma prestation, mais les quelques avis recueillis à la fin me permettent de tourner quand même avec la conviction que c’est une première expérience réussie.

C’était évidemment agréable de « revoir » par la même occasion (même si indirectement) une quarantaine de Québécois, donc quelques-uns qui ont contribué à faire naître les quelques idées que j’avais à partager. Merci André, Michel, Robert, Charles-Antoine, Denis…

Une belle expérience qu’il faudra répéter pour apprendre à beaucoup mieux maîtriser ce type de communication.

Merci l’APOP — et bravo à tous ceux et celles qui ont rendu possible cet audacieux colloque.

Parole, blog, cité, légitimité…

« C’est prendre le droit à la vie de la cité que de s’exprimer, de surcroit de la manière la plus aboutie chez les humains, pas l’écrit. Si je prends droit à participer à la vie de la cité, c’est que j’y ai un intérêt qui vaut surement autant que celui des autres. […] [Or, au cours des dernières semaines] ma légitimité m’a fait défaut ou en tout il m’a fallu l’interroger. C’est ce que je vous invite aussi à discuter en cette fin d’année 2006 »

Extrait d’un texte de Bruno Devauchelle sur lequel je souhaite trouver le temps de revenir dans les prochains jours.

Mise à jour 2 janvier 2017: le lien vers les texte est maintenant plutôt celui-ci.