Québec 1989-2019, une semaine plus tard

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J’ai publié dimanche dernier mon histoire personnelle du Québec de 1989 à 2019. Comme une façon de réfléchir à haute voix sur mon état d’esprit politique à l’aube d’une nouvelle élection.

J’ai choisi d’en faire un site web autonome. Un ami m’a aussi rendu le service de convertir tout ce texte aussi en format ePub afin d’en faciliter la lecture dans les applications de lecture de livres numériques. 

Quel lectorat le texte a pu rejoindre une semaine plus tard? 

Pour le plaisir de partager — et de réfléchir ensemble à la diffusion des textes dans l’univers numérique — voici le bilan de la semaine: 

  • 218 personnes ont lu la première page.
  • 71 personnes ont lu la dernière page.
  • 35 personnes ont vraisemblablement lu le texte entier dans sa version web.
  • 13 personnes ont téléchargé le texte dans sa version ePub.

Ce résultat a été obtenu avec une diffusion très sobre, annoncée uniquement par une publication sur mon blogue et un tweet. Rien sur Facebook, où je ne suis plus.

Certains m’ont dit que j’aurais eu deux, cinq, voire dix fois plus de visiteurs/lecteurs si j’avais utilisé aussi Facebook pour faire connaître la publication. 

Peut-être. C’est un sujet de réflexion intéressant.

Crottes de chien

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Y’a des journées comme ça où le thème du jour s’impose à nous, malgré nous même! Aujourd’hui ce sont les crottes de chien.

Trois occurrences étonnantes dans mes pensées matinales:

Première: mes notes quotidiennes personnelles me rappellent que ce jour, l’an dernier, j’avais parlé de crotte de chien dans une entrevue à la radio de Radio-Canada — au sujet des trolls qui pourrissent les médias sociaux: pas chic, mais efficace.

Deuxième: les notes que j’ai prises en lisant hier le Petit manuel de résistance contemporaine de Cyril Dion. On peut y lire à la page 119 le rôle des crottes de chien dans le parcours politique de Harvey Milk:

«Sa première candidature [à la mairie de San Francisco] fut un échec cuisant. La seconde en 1975, même si elle échoua, lui permit d’obtenir une certaine visibilité (…) Il se lança [plus tard] dans la course pour siéger à l’Assemblée de Californie. Malgré une campagne efficace, il perdit à nouveau (…) Après ces trois échecs, Harvey changea son fusil d’épaule et en 1977, opposée à une candidate républicaine très populaire, chercha à comprendre ce qui pourrait faire l’unanimité chez les administrés de sa ville. Il étudia les sondages pour dénicher LE sujet qui cristallisait le mécontentement de toutes les couches de la population. Et le dénominateur commun qu’il vit émerger fut… les crottes de chien. (…) Il fallait organiser un système qui débarrasserait la ville de ce fléau. C’est donc derrière cet objectif, non clivant, pragmatique, facile à atteindre (démagogique, diraient certains) que Harvey les unit. (…) il remporta l’élection, devenant ainsi le premier conseiller municipal ouvertement gay du pays [et pu ensuite faire] voter une loi interdisant toute discrimination basée sur l’orientation sexuelle.» 

Une belle leçon de politique.

Troisième: je planifie un souper d’échanges politiques avec des amis demain soir et je prévois pour l’entrée une légendaire (j’exagère à peine) recette de kefta d’agneau… qu’un autre ami surnomme affectueusement les crottes de chiens.

Avec une petite sauce au yogourt, lime et herbes fraîches… j’espère que ça nous aidera à réinventer le monde… un peu plus concrètement!

Quelle vision (numérique) pour le Québec?

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Mise à jour du 7 septembre: la démarche s’est poursuivie après la publication de ce texte. La formulation finale des questions, et les réponses qui auront été obtenues des partis politiques, devrait faire l’objet d’une publication au cours de la semaine du 17 septembre.

Yves Williams est un homme persévérant. Il fait partie de ceux et celles qui nous rappellent périodiquement, depuis plus de dix ans, qu’il est essentiel que le monde politique comprenne les enjeux liés au développement du numérique. Il le fait à nouveau cette année dans un texte intitulé Des élections et du numérique:

Au fil des ans, Yves a parfois été enthousiaste, résigné, voire déçu, mais cette fois, il se montre optimiste — et ça fait du bien. La présence parmi les candidats de Mario Asselin pour la CAQ, de Michelle Blanc pour le PQ et de Dominique Anglade pour le PLQ, lui fait croire qu’on a enfin des conditions favorables pour se parler franchement de la place du numérique dans l’avenir du Québec.

«Je suis tellement positif que j’espère même qu’on passe à l’étape suivante. (…) C’est-à-dire que les partis ne fassent pas qu’un long listage d’actions à inscrire au programme, mais qu’ils nous présentent leur vision politique de notre avenir numérique, qu’ils soient plus précis sur les options politiques contenues dans leurs propositions technologiques et numériques.

[Il faut que les partis politiques nous présentent] leur vision politique de notre avenir numérique, [qu’ils soient] plus précis sur les options politiques contenues dans leurs propositions technologiques et numériques.»

Je pense qu’il a raison de dire qu’on est encore généralement beaucoup trop naïfs de la transformation numérique de notre société, comme si elle allait nécessairement être positive, alors qu’on sait bien que ce ne sera pas forcément le cas:

«Nous souhaitons les changements numériques; nous trouvons qu’entreprises, État, organisations ne vont pas assez vite ni assez loin; nous voulons plus d’initiatives et d’allant, mais nous définissons rarement quels changements numériques nous espérons. (…)

[Il faudrait donc que] les aspirants députés, au moment de parler de numérique, nous décrivent leur projet de société, leurs convictions politiques et nous montrent comment le numérique est un allié dans leur projet.»

Effectivement, ce qu’il est important de comprendre aujourd’hui, c’est à quelle vision du Québec chacun compte mettre à contribution le numérique.

Je propose donc de bâtir ensemble un court questionnaire que nous pourrions éventuellement adresser aux porte-paroles numériques de chaque parti.

Il pourrait s’agir d’une douzaine de questions, forcément un peu dichotomiques, que chacun pourra nuancer à son aise. 

Par exemple:

Démocratie — S’il fallait choisir entre mettre en place le vote électronique ou une structure de consultation citoyenne, que privilégieriez vous? Pourquoi?

Éducation — L’apprentissage du numérique doit-il d’abord servir les besoins des entreprises ou le développement de la créativité? Pourquoi?

Culture — Croyez-vous que le numérique sera globalement positif ou négatif pour les créateurs québécois? En conséquence, quels principes devraient guider une éventuelle mise à jour des mesures de soutien à la culture au Québec?

Santé — Faut-il privilégier l’efficacité du système de santé ou la protection des renseignement personnels? Pourquoi?

Développement urbain — Une ville intelligente, c’est une ville où tout est informatisé, ou une ville où les citoyens peuvent interagir plus facilement avec les services municipaux? Qu’est-ce que ça veut dire concrètement?

Médias — Est-ce qu’il est possible de réglementer la diffusion d’informations? Si oui, en vertu de quels critères? 

Commerce — Faut-il taxer le commerce en ligne transfrontalier? Si oui, faut-il le faire surtout pour protéger les commerçant locaux, ou pour alimenter les coffres de l’états?

Innovation — Devant l’apparition de modèles économiques subversifs (Uber, Airbnb, etc.), est-ce que l’État doit prioritairement protéger les acteurs qui opèrent selon un modèle traditionnel, ou soutenir les acteurs qui prennent le risque d’adapter leur écosystème ou d’inventer un nouveau modèle?

Administration publique — Dans le prochain gouvernement, doit-on souhaiter la nomination d’un.e ministre responsable des technologies et du numérique ou d’un.e ministre responsable de la valorisation des données publiques? Quelle différence faites-vous entre les deux?

Accès à l’information — Serait-il souhaitable de définir par une loi-cadre que tous les documents produits par l’État québécois doivent être publics et accessibles sans restriction, à moins de justifications explicites? Pourquoi? 

Transport — Vous semble-t-il préférable d’investir dans le développement des véhicules électriques autonomes ou dans le développement de services (sur les téléphones cellulaires, par exemple) favorisant l’efficacité des transports collectifs (covoiturage, transport multimodal, etc.). Est-ce la même réponse pour Montréal, pour Québec et en région?

Accès à Internet — Ça fait vingt ans qu’on dit que tous les citoyens du Québec auront bientôt accès à l’Internet haute-vitesse. Quel moyen croyez-vous le plus efficace pour que cela devienne enfin une réalité: nationaliser les services d’accès à Internet? Subventionner les entreprises de télécommunication pour le faire? Pourquoi?

Si l’exercice vous plaît, je vous invite à m’aider à préciser les questions en formulant vos propositions dans les commentaires ci-dessous ou en contribuant directement à ce document Google.

Mario Asselin, Michelle Blanc, Dominique Anglade (et un.e éventuel.le porte-parole numérique de QS) pourront évidemment suivre l’élaboration des questions — voire y participer. Ben oui, pourquoi pas… si ça permet de rehausser le débat?

Je lève d’ailleurs mon chapeau à Mario Asselin, qui a posé un geste dans cet esprit-là aujourd’hui en partageant sur son blogue ses notes préparatoires en prévision d’un débat qui aura lieu demain sur l’éducation. Je trouve que c’est une initiative qu’on gagnerait tous à voir se reproduire plus souvent.

Ça va tout à fait dans le sens du type de leadership que je décrivais avant-hier en réponse à une question de Anne-Marie Dussault.

L’indifférence, oui mais…

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Éditorial intéressant de Paul Journet, dans La Presse de ce matin:

La vraie menace: l’indifférence

L’éditorialiste nous invite à porter un regard un peu plus intéressé (voire positif) sur notre monde pour ne pas céder au désabusement et au cynisme.

«Ces menaces partagent un point en commun : le désabusement des électeurs. C’est de cela qu’elles se nourrissent. Car plus on croit que les partis et les institutions sont tous pourris, plus on gobera les ragots et complots à leur sujet. Et c’est ainsi que la roue du cynisme tourne…»

Je suis évidemment tout à fait d’accord avec ça — et ça d’ailleurs été le principal sujet du texte avec lequel nous avons conclu nos 52 rendez-vous sandwich:

Pour en finir avec le cynisme systémique

Le hic, c’est que l’éditorialiste réussit le tour de force d’évoquer les sources de l’indifférence, du désabusement et du cynisme sans jamais évoquer le travail des médias (Facebook en prend pour son rhume, mais rien au sujet des médias traditionnels)…

Je trouverais intéressant qu’il y ait une suite à cet éditorial, dans lequel Paul Journet pourrait aussi porter un regard critique sur l’influence des bons vieux médias (journaux, radio, télévision) sur le regard que les citoyens portent sur leur milieu, sur le Québec et sur le monde en général. 

Il me semble tellement évident que les choix éditoriaux et la façon par laquelle on produit l’actualité aujourd’hui (instantanéité, répétition, multiplications des opinions et des faits divers, etc.) a des effets négatifs sur l’attitude des citoyens. Ils donnent souvent bien plus envie de baisser les bras et de s’en remettre aux politiciens et autres puissants que de se retrousser les manches et de s’engager socialement.

Il n’y a pas que les citoyens qui doivent porter un regard neuf sur la société. Les médias aussi.

Les qualités d’un.e leader

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Anne-Marie Dussault demande aujourd’hui sur Twitter:

Quelles qualités recherchez-vous chez un leader?

C’est une très bonne question, à laquelle j’ai envie de répondre librement, sans égard au contexte électoral actuel. J’interprète la question comme une réflexion générale sur le leadership, plutôt qu’une grille pour analyser les chefs de partis. C’est d’ailleurs une réflexion qui pourrait tout aussi bien s’appliquer à la situation d’un.e simple député.e, dans son action locale, ou à celle d’un.e dirigeant.e d’entreprise ou de toute autre forme d’organisation.

Les trois qualités qui me semblent le plus essentielles chez un et une leader sont:

  • L’écoute;
  • La pédagogie;
  • La capacité de mobiliser.

Pour moi, un bon leader ou une bonne leader, c’est d’abord quelqu’un qui est attentif à la réalité de sa communauté et des gens qui la composent. C’est une condition nécessaire à sa légitimité.

C’est aussi quelqu’un qui est habile pour identifier les défis auxquels cette communauté est confrontée et qui est capable de les expliquer clairement, de manière à ce qu’ils soient bien compris par la majorité.

C’est finalement quelqu’un qui sait susciter l’adhésion et qui donne envie aux gens de se mobiliser pour relever ensemble ces défis. C’est quelqu’un qui comprend que son rôle est de faire émerger des solutions à partir de l’intelligence collective, et non pas de trouver des façons de faire accepter «sa solution».

Je trouve malheureusement encore très d’actualité ce texte écrit en 2007 — au moment du décès de la mairesse Boucher — dans lequel je souhaitais l’émergence d’une nouvelle forme de leadership au niveau municipal, encore marqué par une forme archaïque de leadership autoritaire.

Il m’apparaît aussi plus important que jamais de ne pas oublier que le leadership n’est rien si on n’évoque pas aussi le communautéship — soit la manière dont une communauté arrive à interagir avec son/ses leader/s (et ça aussi ça s’apprend, parce qu’il ne s’agit pas seulement de suivre aveuglement);

Et pour cette raison, j’aime toujours autant la métaphore du ski nautique pour décrire le leadership.

Ou, dit très simplement dans les mots de Malcom Knowles:

« …the highest function of leadership is releasing the energy of the people in the system and managing the process for giving that energy direction toward mutually beneficial goals. »

***

La réflexion est générale — mais il est vrai qu’il convient aussi de s’en servir pour juger des attitudes et des propositions des personnes qui sollicitent notre confiance dans le cadre de la prochaine élection.

En demandant par exemple aux candidats et candidates de notre circonscription s’ils/elles prévoient:

  • rencontrer régulièrement les citoyens dans une assemblée publique (au moins une fois par mois) notamment pour solliciter leurs points de vue sur les défis auxquels ils/elles feront face;
  • partager occasionnellement leurs idées et réflexions, et des versions préliminaires de certains documents, afin de pouvoir les enrichir des contributions des citoyens.

Ce que j’attends le plus d’un.e député.e et d’un leader politique aujourd’hui, c’est de savoir faire remonter les bonnes idées qui émergent de la population vers les instances décisionnelles, plutôt que de servir de courroie de transmission pour justifier des décisions impopulaires auprès de la population.

Québec 1989-2019

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Je viens de mettre en ligne un texte qui me tient particulièrement à cœur:

Québec 1989-2019: Cultiver l’optimisme quand y s’passe pas c’qu’y devrait s’passer

Le texte prend la forme d’un site Web qui regroupe l’équivalent d’une cinquantaine de pages. J’y formule une rétrospective de mon rapport à la politique et à la société québécoise dans son ensemble, de 1989 à aujourd’hui — c’est-à-dire de mes 16 ans à mes 45 ans. 

Je ne suis certainement pas le premier à partager un tel plongeon dans mes souvenirs, mais je pense que le fait de pouvoir m’appuyer très directement sur les quelques 1800 textes que j’ai publiés sur mon blogue depuis 2002 procure à l’exercice un caractère pas mal inédit. 

Bien qu’il s’agisse d’un point de vue éminemment personnel sur l’histoire récente du Québec, j’espère qu’il pourra contribuer à renouveler le regard qu’on porte sur l’état d’esprit de la génération à laquelle j’appartiens.

Je ne vous cacherai pas que c’est avec un certain vertige que je publie ce texte; mais aussi avec quelque chose comme un grand soulagement. La rédaction m’a permis de beaucoup mieux comprendre pourquoi je ressens aujourd’hui un aussi puissant besoin de changer de perspective sur l’avenir de mon pays.

J’ignore combien de personnes s’intéresseront suffisamment au récit pour le lire en entier, mais j’espère que certain.e.s prendront le temps de me faire part de quelques réflexions.

Et si, d’aventure, le récit s’avérait susceptible de nourrir quelques échanges dans un contexte éducatif (au secondaire? au cégep? voire à l’université!) ce sera avec un très grand plaisir que je me rendrai disponible pour y contribuer d’une façon ou d’une autre.

N’hésitez évidemment pas à partager ce texte.

***

Immense merci à Ana-Laura, avec qui je partage ma vie depuis 25 ans, et qui a été la première lectrice de la très grande majorité des 1800 textes qui servent de matériaux essentiels à cette rétrospective.

Merci également à Helene Jutras, qui a accepté le rôle de relectrice privilégiée (et réviseure) de Québec 1989-2019 — et d’être par le fait même complice d’un amusant clin d’œil à l’histoire.

 

AJOUT — 20 août 2018:

Mon ami Gilles Herman m’a fait cadeau d’une version ePub de l’ensemble du texte. Il est donc maintenant possible de lire (et annoter) le texte à partir d’une application comme iBooks, sur iPhone ou iPad. Très très grand merci Gilles!

Québec 1989-2019, en version ePub

J’ai aussi préparé une image qui résume les manipulations à faire pour importer le fichier dans iBooks sur un iPad. Elle est ici…

 

Photo: Clément et Étienne devant le Lac Léman, en juillet 2007

Pour rompre avec l’angoisse

Joseph Facal publie ce matin un texte dans lequel il évoque les angoisses avec lesquels seraient aux prises les souverainistes lucides.

Son texte résume très bien ce que j’entends abondamment autour de moi. Sauf que je trouve que c’est une erreur de présenter ça comme une impasse — comme un problème insoluble.

Je me demande si la grille d’analyse qui sous-tend ce raisonnement n’est pas désuète. Ou incomplète. Ou simplement piégée. Elle repose, je pense, sur l’hypothèse que l’arène partisane serait la seule capable de faire éventuellement se concrétiser l’indépendance du Québec.

Je me mets à penser que cette grille d’analyse fait partie du problème et contribue fortement à ce qu’on perçoive la situation comme une impasse.

Est-ce qu’il ne serait pas plus utile, et efficace, d’arrêter de penser que l’avenir du Québec sera déterminé par les partis politiques?

Est-ce qu’on ne devrait pas (re)commencer à se dire que les partis politiques n’ont pas pour but de décider où s’en va le Québec, mais de réaliser ce qu’on aura décidé d’en faire?

Faut-il s’étonner de ne pas savoir pour quel parti voter quand on ne sait pas à quel Québec on rêve?

Je pense qu’il va falloir arrêter de se perdre en conjonctures partisanes et recommencer à rêver, à imaginer le monde dans lequel on aimerait vivre; le monde qu’on souhaite laisser aux générations suivantes.

Il va falloir (re)commencer à partager ces rêves, à en faire des récits rassembleurs, à élaborer des projets et à faire en sorte que les partis politiques s’en saisissent pour pouvoir les transformer des réalités. C’est d’ailleurs ce que disait aussi Cyril Dion dans sa plus récente chronique publiée dans le Nouveau magazine littéraire.

En l’absence de rêves et de projets forts pour le Québec, ce sont forcément toujours ceux qui se présenteront, à tort ou à raison, comme les meilleurs administrateurs de l’État qui remporteront les élections. Quoi faire de mieux qu’administrer bêtement quand on a pas/plus de projets à réaliser?

L’impasse ce n’est pas la division du vote, ni même dans les bonnes ou mauvaises stratégies des partis politiques, elle se cache plutôt dans notre indifférence devant l’avenir.

Si on veut changer ça, je pense qu’il va d’abord falloir tout faire pour que les Québécoises et les Québécois reprennent confiance dans leur capacité à définir ce que va devenir le Québec.

Tant qu’on n’aura pas fait ça on va être condamné à lire une chronique comme celle de Joseph Facal avant chaque élection.

Pis ça ne me tente pas pantoute…

Valeurs, légitimité et méthodes

Un passage de l’entrevue que Philippe Couillard a accordée à La Presse canadienne a attiré mon attention:

Il faut savoir «nommer des valeurs en politique, avant de nommer des éléments de programme», dit-il.

Je suis d’accord sur le principe et je me réjouis de le lire aussi clairement exprimé. Sauf que.

Sauf que je trouve qu’il se dégage par ailleurs de l’ensemble du texte une inconfortable impression de paternalisme qui m’apparaît en contradiction avec les valeurs que prêche le premier ministre. Comme ici, par exemple:

il [se] voit comme celui qui donnera aux jeunes, bientôt aux commandes, tous les «leviers» nécessaires pour composer avec ce monde changeant aux valeurs différentes de celles de la génération actuellement au pouvoir. (…) Le gouvernement devra donc agir en ayant toujours à l’esprit les attentes des jeunes.

«Agir en ayant à l’esprit les attentes des jeunes». Ça ressemble un peut trop à mon goût à «faire à la place des jeunes». Je trouverais préférable qu’on trouve des moyens d’impliquer davantage les jeunes dans les processus décisionnels, sans attendre.

Ça m’a aussi ramené à un autre constat important de mes réflexions des derniers mois: la légitimité du message politique sera de plus en plus tributaire de la nature de la démarche qui l’aura précédé.

Si on ne change pas les façons de faire de la politique, pour engager davantage les gens dans la définition des valeurs et des programmes qui animent les partis, on ne changera pas grand chose, au fond. Comme le rappelait François Chartier récemment, dans un tout autre contexte:

«La démarche génère le produit. Si on ne change pas la démarche, on va toujours produire la même chose.»

Et c’est là que la réflexion qui inspire le courant l’Initiative, auquel j’ai déjà consacré cet autre texte, me semble le plus inspirant. Pour reprendre les mots d’un de ses instigateurs:

À notre époque un parti politique ne devrait plus prétendre dire aux gens ce qui est bon et ce qui est mal pour eux. Un parti politique devrait plutôt être perçu un véhicule pour porter leurs besoins et leurs désirs.

Plus facile à dire qu’à faire, évidemment, mais une chose est certaine: avec tous les moyens de communication et de collaboration dont on dispose aujourd’hui, il ne manque pas de ressources pour le faire — c’est surtout la volonté de le faire qu’il nous manque encore.

Il va bien falloir commencer à y penser plus activement (et très concrètement!) en prévision de la prochaine fois ou nous aurons à (ré)inventer un parti politique.

Photo: une oeuvre de Geneviève De Celles.

Les engagés publics

Je souhaite la bienvenue à celles et ceux qui découvrent mon blogue après avoir écouté le neuvième épisode des Engagés publics.

L’émission a été enregistrée hier soir. C’était ma première expérience de participation à une balado et j’y ai pris un très grand plaisir.

Un peu de préparation et beaucoup de spontanéité pour une heure de sujets sérieux ponctués de rire. Ce ne sera certainement pas la dernière fois!

D’ici-là, voici quelques liens en rapport avec les sujets que j’ai abordés au cours de l’émission:

Ma suggestion de lecture:

Quelques autres sujets évoqués:

Et un texte du site du MCC qui résume bien ce à quoi je travaille actuellement:

N’hésitez pas à utiliser la zone commentaires ci-dessous!

L’élargissement d’Henri IV… encore!

D’une élection à l’autre, de 2011 à 2018, pour des coûts évalués à un montant qui aura varié de 500M$ à 291M$, l’élargissement de l’autoroute Henri IV est devenu un thème obligé de la politique régionale.

Question de garder une trace de tout ce cirque, je place ici quelques articles sur une ligne du temps, accompagnés de quelques commentaires.

28 février 2011

L’élection approche…

4 septembre 2012

Élection au Québec: le Parti Québécois forme un gouvernement minoritaire

Il faudrait bien donner de bonnes nouvelles…

23 octobre 2012

29 mars 2013

7 avril 2014

Nouvelle élection au Québec: le PLQ forme un gouvernement majoritaire

Ce n’est peut-être plus aussi urgent au fond…

30 mai 2014

20 juin 2014

25 juin 2014

La fin de mandat du gouvernement approche, il faudrait bien bouger un peu…

27 avril 2017

Ouin, c’est peut-être un peu cher… faudrait revoir un peu les chiffres et confirmer l’élargissement…

28 août 2017

L’élection approche, faut faire une autre annonce pour dire la même chose…

14 mars 2018

L’élection est dans un mois, c’est le moment de prendre une photo — et d’annoncer une bonne nouvelle: ça va finalement coûter beaucoup moins cher que prévu…

8 août 2018

1er octobre 2018

Élection au Québec: résultats à venir…

Et reste à voir quand ce sera terminé et combien tout ça aura vraiment coûté…

QUESTION: Pourquoi la gestion du réseau routier est-il encore un sujet aussi politique au Québec en 2018? Ça ne fait pas un peu république de bananes?

Dialoguer, mais encore?

J’ai publié ce matin un court texte pour partager mon appréciation de la chronique d’Odile Tremblay dans Le Devoir de ce matin. Ça n’a pas été très long avant que je reçoive de premières réactions — tant positives et négatives, en privé pour la plupart. Normal pour un sujet aussi controversé.

Cela a aussi donné l’occasion d’un échange avec mon beau-frère, René Audet, qui est professeur de littérature à l’Université Laval. J’en reprends ici l’essentiel, avec son autorisation.

Ça démarre sur un désaccord au sujet de la pertinence d’organiser des « États généraux de la culture » (suggestion formulée par Odile Tremblay, à laquelle je m’associe) et ça se termine (si un tel échange est jamais terminé !) sur une question reformulée… et une idée à laquelle il resterait à donner forme.

N’hésitez pas à commenter à votre tour !

***

René: « quartiers [états] généraux du monde culturel pour établir des balises de protection créatrice » : euh… pour laisser toute la place à la bien-pensance et à la rectitude, pour laver du linge (en partie) sale sur la place publique, peut-être. Mais ce genre de grand-messe pourra difficilement faire avancer les mœurs – ça sera plutôt un motif de jeter encore un peu plus d’huile sur le feu, de se limiter à la rhétorique de la faute antérieure irréparable. Il faut regarder par en avant, garder un regard ouvert sur les cohabitations culturelles, donner sa chance à chacun. Pas favoriser une attitude voulant policer les mœurs et les intentions… M’enfin, y’a de quoi s’y perdre.

Clément: Oh, la police des mœurs et des intentions : loin de moi cette idée. Mais est-ce que cette idée de temps d’arrêt collectif est contradictoire avec le vœu, que je partage, de « regarder en avant, garder un regard ouvert sur les cohabitations culturelles [et] donner sa chance à chacun » ? On serait condamné à une version cheap de la commission Bouchard-Taylor recevant la famille Pineault-Caron ? Je ne peux (veux) pas croire ça.

René: Les états généraux me font frémir. Parce qu’ils sont parfois noyautés par des visions politiques opportunistes, par des purs et durs qui veulent casser la baraque… et qu’ils rassemblent aussi des gens qui ne sont pas les premiers acteurs du domaine visé (parce que les acteurs sont plutôt sur le terrain, en train de bosser). On ne peut pas régler ce genre de trucs par une grand-messe, mais plutôt par du travail de terrain, sur le moyen terme, et peut-être aussi par des interventions solides de gens respectés qui pourront agir sur les modes de pensée. My 2¢…!

Clément: « Des interventions solides de gens respectés qui pourront agir sur les modes de pensée.» – bien sûr, c’est le meilleur scénario ! Mais où sont-ils ces gens ? Et quelles tribune auront-ils si on ne crée pas les conditions favorables à leur prise de parole ? Dans l’environnement médiatique actuel…

René: Peut-être, justement, ce n’est pas par les médias que ça doit passer, mais par de plus petites rencontres, loin des caméras. Je suis sûrement pessimiste et idéaliste sur ce coup. Mais je crois que l’affaire a beaucoup trop « bénéficié » du spin médiatique et que l’outil n’est pas approprié pour renverser la vapeur. Les acteurs du monde du théâtre s’en parleront intensément dans les prochains mois, les échos seront perceptibles dans le secteur du cinéma, de la télévision. Des gens poseront des questions, ne voudront pas être au centre d’une semblable polémique… Le travail se fera peu à peu dans les milieux, je crois.

Clément: Trop de spin médiatique : *assurément*. Mais à mon avis la question est maintenant plutôt de savoir si on peut faire la suite « à l’abri de la réalité médiatique », ou si on doit trouver moyen « de faire avec ».

René: Ou, plus précisément : si le monde médiatique est partie prenante de la suite ou simplement une instance de relais. Ça me semble assez différent. L’option 2 est peut-être illusoire (au sens où les médias sont de plus en plus interventionnistes), mais il est possible que le scénario vise d’abord à impliquer les gens concernés et que le spin médiatique vienne en appui, dans un deuxième temps…

Clément: Cela dit, je suis d’accord avec toi que la forme d’éventuels « états généraux » devrait aussi faire l’objet d’une réflexion approfondie. Ce ne peut pas être qu’une grande messe de quelques jours. Ce serait jouer le jeu des médias plutôt que de faire avec lui. Pensons à un événement plus participatif, plus sur le modèle de la co-construction que d’une série de dépositions devant un tribunal ou une commission d’enquête ; quelque chose qui se réalise sur une ou deux années plutôt que sur quelques semaines ou mois – avec des interventions réelles dans les milieux, entre des étapes un peu plus exposées publiquement/médiatiquement… Soyons ingénieux !

René: Ouep, en effet. Ça correspond davantage à mon idée de travail sur le terrain. Ceci dit, le succès réside dans la légitimité de l’instance qui prendra l’initiative (et la parole) – plusieurs instances se sont mouillées, avec une réaction plus ou moins consensuelle, alors que d’autres brillent par leur absence/silence. Qui pourra être bien perçu dans le comité d’organisation d’un tel projet ?

Clément: Pourquoi pas des « états généraux » dans le cadre desquels on demanderait aux musées (et aux musées nationaux, en particulier), aux bibliothèques (et à BAnQ, en particulier), ainsi qu’aux établissements scolaires, cégeps et universités, de participer ? Une démarche où les milieux de travail (publics et privés) auraient aussi la possibilité de se raccrocher ? Pourquoi pas une démarche très décentralisée, donc, qui serait aussi plus susceptible de rendre compte de la diversité des points de vue et des réalités régionales ? Tout cela pourrait par la suite être « ramassé » à l’occasion d’un événement-synthèse destiné à dégager des consensus (parce que oui, je crois toujours à l’importance des consensus, plus que jamais même).

René: Dans l’absolu oui, pourquoi pas. Mais quel serait le pitch, quelle serait la commande ? (de façon à ne pas seulement enfoncer le clou de l’auto-flagellation) Plutôt centrer la démarche autour de projets ou initiatives qui illustreraient là vers où on veut aller, et non centrer sur les travers à éviter ? Une définition de la culture commune/partagée ? Ça finira par être un projet de pays :)

Clément: Me voilà démasqué !

René: Cela dit, la question qui me paraît fondamentale est : quelle est la commande, l’orientation du truc ? Trop facile de se limiter à la seule rhétorique de la réconciliation (avec un arrière-plan de contrition piteuse), alors qu’on peut plutôt/aussi se demander comment on peut faire à l’avenir, tous ensemble.

Clément: Je suis d’accord, le mandat confié aux responsables de ce genre d’États généraux est déterminant. Une discussion à son sujet (forcément très politique – d’où le besoin d’un leadership dont on est toujours à la recherche !) est un passage obligé avant d’aller plus loin, à défaut de quoi je te concède qu’on en restera très probablement aux vœux pieux.

Dialoguer c’est bien. Développer des pratiques culturelles (et éducatives !) communes, partagées, c’est encore mieux !

Image: Vaduz (fragment), 1974, Bernard Heidsieck. Vu au Centre Georges-Pompidou en août 2017.

Dialogue éclairé

J’ai beaucoup lu sur les très délicats enjeux autour de l’annulation de SLÀV et Kanata. J’ai été touché par plusieurs points de vue, parfois contradictoires. Ça remue.

Je crois constater que le débat avance… malgré des exagérations de part et d’autre. Je m’en réjouis. Si, au moins, tout cela n’est pas vain.

Odile Tremblay signe dans Le Devoir d’aujourd’hui un texte qui me semble être une remarquable synthèse de la situation: Après le séisme théâtral. Un texte engagé, nuancé, ouvert.

J’en cite la conclusion:

Ces questions sont complexes et ne peuvent se réduire à un seul point de vue. Le débat débouchera, espérons-le, sur des quartiers généraux du monde culturel pour établir des balises de protection créatrice. On lui souhaite aussi d’accroître le niveau de conscience collective en temps de mutation, quand seul le dialogue éclairé peut nous empêcher de frapper un mur.

Reste à trouver qui aura le leadership nécessaire pour organiser pareille rencontre — pas trop vite, mais sans trop tarder.

Image: Tapisserie aux mille-fleurs, A Moment of Beauty in a Land of Misery (fragment), de Myriam Dion. Vu au Musée national des Beaux Arts du Québec en juillet 2018.

Des scénarios pour imaginer l’avenir

Dans Le Soleil de ce matin on peut lire un texte du biologiste Claude Villeneuve dans lequel il présente les cinq scénarios qui vont servir au prochain rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC).

Le premier décrit un monde où on appliquerait le développement durable alors que le second explore ce qui se passerait si rien ne change dans le monde politique. Le troisième décrit un monde où le protectionnisme et les rivalités régionales dominent et où les organismes internationaux ne peuvent pas jouer efficacement leur rôle. Le quatrième présente une société à deux vitesses où les plus riches s’en tirent et les plus pauvres casquent. Enfin, le cinquième scénario socio-économique présente un monde où la technologie est reine et où le développement économique est partagé à la grandeur de l’humanité.

En lisant ce texte, je me suis demandé quels scénarios on pourrait formuler pour nous aider à imaginer les futurs possibles de la société québécoise, dans son ensemble.

Je me lance donc avec une première mouture de cinq scénarios:

  1. Rien ne change — tout continue comme maintenant.
  2. L’environnement médiatique s’emballe, la durée des cycles d’information continue à raccourcir et les polémiques occupent de plus en plus d’espace.
  3. Les technologies transforment l’exercice démocratique et permettent aux citoyens de participer de plus en plus régulièrement aux décisions politiques.
  4. Les dynamiques politiques sur l’île de Montréal et dans le reste du Québec deviennent de plus en plus irréconciliables.
  5. La transformation de l’activité économique se fait de plus en plus au détriment des travailleurs, contribuant à l’accroissement des inégalités économiques et sociales.

On peut alors se demander, pour chacun des scénarios, quelle tournure prendrait le Québec dans un horizon de 20 ans? 50 ans?

Dans quel genre de société vivraient nos enfants? Leurs enfants?

Et selon qu’on juge que ce sont des scénarios globalement positifs ou négatifs, qu’est-ce qu’il convient de faire pour les stimuler, ou éviter qu’ils ne se réalisent.

***

Ce ne sont peut-être pas les scénarios les plus pertinents mais, de prendre le temps de les formuler, même très spontanément, m’a permis de réfléchir à quelles sont, de mon point de vue, les variables les plus déterminantes pour l’avenir du Québec.

Les changements climatiques? L’éducation? Devraient-ils être l’objet de scénarios spécifiques? Ou se trouvent-ils indirectement présents dans ceux-là? Est-ce suffisant? Je continue d’y penser.

Vous croyez qu’il manque quelque chose? Dites-le dans un commentaire!

Sandwich BBQ

Pendant un an nous nous sommes donné rendez-vous le vendredi midi devant l’Assemblée nationale le temps de manger un sandwich et de parler un peu de l’actualité et de l’état de notre démocratie.

Un peu plus de six mois après la dernière rencontre, nous avons prévu nous revoir, dans quelques jours, pour un BBQ estival. Question de nous revoir, se donner des nouvelles et jaser un peu.

Je profite de l’occasion pour réfléchir quelques instants sur ce que je retiens de l’expérience. Et j’invite les autres sandwicheux à en faire autant, dans les commentaires ci-dessous, s’ils en ont envie.

Très spontanément:

  1. La rencontre hebdomadaire, en personne, devant l’Assemblée nationale était une formule très exigeante, mais j’appréciais beaucoup son côté rituel. Et je m’ennuie d’un rendez-vous régulier qui nous amenait à nous forger un regard partagé sur l’actualité. On avait évoqué un rendez-vous mensuel en personne, on ne l’a pas fait — il y a sans doute d’autres pistes à explorer.
  2. C’est au cours de cette année de rencontres que j’ai choisi de quitter les instances du parti politique dans lequel j’étais très impliqué depuis dix ans. Je pense que nos échanges y sont pour quelque chose. J’ai progressivement senti le besoin d’explorer d’autres façons d’agir. La recherche se poursuit, mais c’est déjà, pour moi, une première retombée directe de notre démarche. Je sais que d’autres ont fait le chemin inverse et je m’en réjouis!
  3. Je crois que ma décision de quitter Facebook découle aussi, en bonne partie, de nos conversations. Paradoxal, parce que cette année de rendez-vous n’aurait pas été possible sans la facilité de communication qu’offre Facebook. Ça représente un défi pour le futur (on en parlera la semaine prochaine).
  4. Est-ce qu’on a changé quelque chose avec ça? Peut-être pas encore. Mais je suis convaincu qu’on a pas fait ça pour rien. Entre autre parce qu’on a piqué la curiosité de beaucoup de monde (je me suis fait interpellé encore récemment par une dame que je ne connaissais pas qui souhaitait savoir qu’est-ce qui se passait avec les sandwichs!). Peut-être y a-t-il une suite en gestation. Peut-être commune — ou différente pour chacun de nous?
  5. D’ici notre sandwich-BBQ, je nous suggère de relire notre texte de conclusion et de noter sur un papier une idée qui permettrait de rendre le propos encore plus concret au cours de la prochaine année. J’installerai un babillard pour épingler tout ça, en mode remue-méninges.

Et pour finir, je vous partage quelques lectures/relectures des derniers jours:

Le cynisme, on le sait, n’a pas très bonne presse. Il n’est pas possible de parler cinq minutes de politique sans que surgisse d’un buisson un commentateur pour nous rappeler le « cynisme ambiant » qui règne, qui fait que la population ne croit plus en ses dirigeants ni en ses institutions. Dans ce sens, le cynisme serait la doctrine de ceux qui, désabusés, s’attendent au pire.

Personnellement, je n’ai pas de problème avec cette épithète, si on accepte le petit bémol suivant. Ce cynisme est avant tout la posture de ceux qui refusent de se scandaliser de ce que les humains agissent quelquefois en humains (notamment sur les réseaux sociaux, mais aussi partout ailleurs où ils n’arrivent pas à cesser d’être humains). En ce sens, pour pasticher un titre bien connu, le cynisme est un humanisme, non pas parce que le cynique s’attend toujours au pire, mais plutôt parce qu’il tâche de ne pas nommer le prévisible « le pire ».

Et vous, que lisez-vous par les temps qui courent?

J’ai hâte de vous revoir!

Être patriote en 2018

On célèbre aujourd’hui la Journée nationale des Patriotes — un jour férié qui a été institué en 2002 par le premier ministre Bernard Landry:

«Nous avons choisi d’honorer de cette manière la mémoire des hommes et des femmes qui, depuis l’implantation des institutions parlementaires, en 1791, ont milité pour les droits de la majorité, dont celui du peuple à se gouverner lui-même ».

J’ai vu passer beaucoup de messages sur les réseaux sociaux depuis ce matin pour honorer le combat des patriotes pour libérer le Québec de l’occupation britannique — et ça mérite très certainement d’être souligné puisque sans leur combat, la présence francophone au Canada aurait vraisemblablement été compromise.

Toutefois, ma réflexion personnelle aujourd’hui consiste plutôt à m’interroger sur ce que ça signifie d’être patriote en 2018. Qu’est-ce que cela signifie de militer pour le droit du peuple à se gouverner lui-même?

La réponse facile est évidemment de dire que cela signifie de militer pour l’indépendance du Québec. J’en suis — mais ça me semble une réponse un peu simpliste si on ne s’interroge pas en parallèle sur les véritables obstacles à cette autonomie politique.

Qu’est-ce qui empêche aujourd’hui le peuple québécois de se gouverner lui-même réellement? C’est à dire de faire des choix propices à son épanouissement?

Est-ce que c’est la monarchie britannique? Le gouvernement fédéral? Le contrôle trop centralisé de notre économie? La corruption? L’influence croissante des médias sociaux sur notre façon de comprendre le monde? Les inégalités sociales croissantes? Le désintérêt des citoyens pour la politique? La perte de confiance dans le pouvoir du gouvernement?

Je crois personnellement que le dernier facteur est le plus lourd. J’aurais même tendance à croire que la liste présente les facteurs en ordre croissant — et que l’histoire ancienne est peut-être un mauvais guide par les temps qui courent.

Cela me fait penser que s’ils nous rendaient visitent aujourd’hui, les Patriotes nous inviteraient probablement à travailler prioritairement sur notre confiance en nous — parce que l’indépendance politique ne peut pas se faire avec des citoyens fatalistes.

Pour cette raison, il me semble qu’être patriote en 2018, c’est proposer des solutions concrètes pour:

  • aider les gens à gagner plus de confiance en eux (l’éducation, la culture, l’entrepreneuriat, un filet social rassurant, etc.);
  • concrétiser les pouvoirs du gouvernement du Québec — c’est à dire à démontrer réellement son utilité pour permettre l’épanouissement du peuple québécois;
  • démontrer le contrôle effectif de la population sur ce gouvernement.

***

Il y a deux ans j’ai écrit ceci — dans le contexte d’une course à la chefferie du Parti Québécois:

«[J’ai la conviction] que pour convaincre les Québécois de s’offrir un pays, il faut d’abord leur redonner confiance en eux-mêmes. Il faut qu’ils sentent que tout ne se décide pas sans eux, sous le contrôle de l’État ou de multinationales dont l’influence échapperait à toute forme de contrôle. Il faut que les citoyens sachent qu’ils peuvent prendre des initiatives, et que c’est la somme de ces initiatives qui contribueront à définir ce pays — pas des décisions prises à leur insu.

C’est pour ça qu’il faut repartir de la base, localement, des groupes, des communautés, des petites et des moyennes entreprises. Il faut parler au monde. Il faut faire de l’éducation une priorité absolue. Il faut simplifier l’administration de l’État pour la rapprocher des gens, éliminer les réglementations inutiles ou désuètes, stimuler l’entrepreneuriat, offrir de meilleures protections aux gens vulnérables, assurer la solidarité des uns et des autres, redonner sa place à la culture. Il faut repartir des aspirations des gens et refaire la démonstration qu’il sera plus facile de les réaliser dans un Québec Pays que dans un Québec Province. (…)

Je pense que tout ce qui est de nature à redonner du pouvoir aux citoyens, qui leur permet de se prendre en main, d’avoir confiance en eux (et au fait que l’État ne les laissera pas tomber s’ils sont dans le besoin) et, surtout, de sentir qu’ils ont prise sur leur destin, nous rapproche du jour où nous aurons un pays. Tout ce qui va dans le sens contraire nous en éloigne.

Je trouve que ça correspond finalement assez bien à ce qui est, pour moi, la forme la plus indispensable de patriotisme au Québec en 2018.

 

Photo: Nos joyeux étés, oeuvre de Myriam Coulombe-Pontbrilland.